Tort, tourdre ‘grive’
Tort et le dérivé tordre, tourdre ‘ »grive » viennent du latin tŭrdus « grive ». Tort est attesté en Rouergue depuis le début du XIIIe siècle. Pour la répartition et les formes voir le Thesoc s.v. grive. Nous le retrouvons dans les parlers italiens AIS 494 (Ce lien vous mène à la page d’accueil de l’Atlas, tapez le chiffre 494 dans la case à droite de LOAD MAP).
Pour écouter le chant de la grive musicienne trida suivez le lien.
En provençal plusieurs verbes ont été formés à partir du nom de l’oiseau, comme tourdoulià, tourdoulear « voltiger; roder; muser »; un tourdouloun est quelqu’un qui rode: un importun qui cherche l’occasion d’accrocher un repas ». Dans le Gard et l’Hérault le dérivé torier ou toro désigne le ‘sorbier des oiseleurs1 ‘ appelé ainsi parce que les oiseleurs s’en servent pour appâter les oiseaux ( d’après l’abbé de Sauvages) . Le Thesoc fournit le type tourier ( tòrièr) pour ARDECHE, HAUTE-LOIRE, LOZERE. Je pense que tourier a été formé par analogie aux autres noms d’arbres.
Le diminutif tŭrdulus a abouti à la forme tortre attesté au XVe siècle à Montagnac, tordre et plus tard tourdre qui est même passé au Québec. Tourdre se trouve dans les parlers provençaux, languedociens et limousins.
La grive passe pour être un oiseau lourdaud et maladroit. A Barcelonnette tourdre signifie aussi « nigaud », comme l’italien tordo. Tourdre fait donc partie des noms d’oiseaux que l’on peut donner à quelqu’un.
Cette évolution sémantique explique aussi le sens du verbe estourdir, étourdir, plus spécialement de étourdi « qui n’a plus l’usage de ses sens ». Voir le FEW XIII/2, 428-429 pour plus d’exemples.
C’est le nom de Impasse des Tourdres à Nîmes (Aimé Serre) qui m’a incité à cette recherche.
Tourd, tourde, tourdre a été introduit en français au XVIe siècle, mais il n’est vivant que dans le Midi. Voir le TLF