cat-right

Jolverd

Jolverd. En occitan, à l’exception du limousin, de l’auvergnat et du gascon, le composé de jōlĭum + viride littéralement « ivraie verte » sert à désigner le « persil ». Le catalan jolivert également. Les premières attestations (Nîmes, Arles, Sisteron) datent du 14e siècle. En français régional de Gignac tchaubert. (Lhubac). Le Thesoc fournit une seule attestation dans les Alpes Maritimes. Une explication de cette dénomination n’a pas encore été trouvée. Si vous avez une idée, contactez-moi svp.
Il y a une suggestion dans le Diccionari etimològic qui pense à une confusion avec un représentant de jilium déformation de lilium attestée en occitan de la Lozère jusqu’aux Alpes. Il existe aussi une « fausse ivraie » (Catapodium loliaceum) et un « faux persil » (Aethusia cynapium L.), qui contient des faibles quantités d’alcaloïdes = toxique.  Pourrait-il  y avoir une confusion entre la fausse ivraie (un bon fourrage) le faux persil (toxique) et le persil frisé. ???
Panoccitan : jòlh, jolheta ; jolverd, : ~ salvatge jolverdar, jolverdassa, jolverdat, jolverdada, jolverdina.

Allemand lolch « ivraie; nielle des blés », basque loilo; catalan jull,julivert, espagnol joyo, portugais joio. Moyen néerlandais lolic, néerlandais dolik

cigue
Ivraie                           Persil                                       Persil frisé                                   Cigue, faux persil

 

Jostar, justar

Jostar, Justar, « jouter; se cosser en parlant des béliers » a la même étymologie que français jouter : « Du latin vulgaire *juxtare (avec un -u- court) proprement « être attenant, toucher à » (v. jouxter), dérivé de juxta, voir jouxte. » (TLF). Joustaire « jouteur » est dérivé de joustar.

La graphie avec un -u- de Mistral, suivi d’Alibert et par le Panoccitan est probablement influencée par une  fausse étymologie, à savoir latin justus « juste ». Le -u- court de juxta était devenu -o- (-o- fermé) à l’époque du latin vulgaire.

Ancien occitan jostar signifie d’abord « rassembler, réunir », mais il est vite remplacé par ajostar. Dans le terminologie de la chevalerie féodale, jostar est un terme technique et a pris le sens « combattre à cheval, d’homme à homme, avec des lances » à partir du XIe siècle.. Le mot n’est pas très vivant en occitan exception faite pour  Sète.


Chevaliers-Jostaires Deux apprentis-jostaires

jostaires à Sète


Jupa

Jupa s.f. « jupe; cotte; souquenille; sarrau ou blouse de travail ample à manches longues, portée par-dessus les vêtements. » (Alibert). L’abbé de Sauvages écrit jhipo ou jhipou avec en plus le sens « estomac » et il cite Goudouli « …për më fair’ un jhipou de fusto » (pour me faire un estomac de fût). L’étymologie est un mot d’origine arabe « veste de dessous ».Voir à ce propos le TLF

D’après les données du Thesoc la forme avec un -i- attesté en occitan depuis le XVe siècle, a complètement disparue sous l’influence du français. Cela s’explique par le fait que les données reposent sur la demande  des enquêteurs : « jupe » sous-entendu « vêtement féminin ». Je n’y ai pas trouvé des représentants du mot arabe avec un autre sens. Dans les dictionnaires par contre,  la forme avec –i- est fréquente pour les mots qui désignent des « pourpoints, des veste, des gilets ou d’autres vêtements masculins » et la forme avec –u- pour les mots qui désignent des vêtements féminins. L’influence de Paris est évidente.

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jupa de paysan13e s.                          jupe 16e s.                          corps et bas de jupe 17e s.

Il ressort des attestations très anciennes (Xe-XIe siècle) que le mot arabe a été introduit  probablement avec le vêtement via la Sicile en Italie et de là en France, dans les deux formes, avec –u- et avec –i-. Dans la péninsule ibérique nous ne trouvons que la forme avec –u- : aljuba qui a été empruntée directement à l’arabe.

Jusqu’au XVIe siècle la jupe est surtout un vêtement d’homme, un genre de blouse qui est portée sur la chemise et qui est recouverte d’un autre vêtement. La longueur varie de la mi-cuisse jusqu’aux genoux, ou même jusqu’aux chevilles. Il y a des images dans Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné du mobilier français de l’époque carlovingienne à la Renaissance. 6 vol. 1858-1875.

La première attestation de jupe « vêtement féminin dont le haut est ajusté à la ceinture, et qui descend plus ou moins bas selon la mode » ne date que de 1603.(TLF). En 1623 une nouvelle mode a prescrit aux femmes une « jupe » qui était ouverte sur le devant. Le vêtement porté en dessous était rallongé et embelli. Le haut de ce vêtement s’appelait corps de jupe et le bas bas de jupe , plus tard abrégés en  corps et jupe. Le TLF s.v. corps note : « La robe se compose de la jupe et du buste ou corps de la jupe : ensuite toutes les femmes ayant la prétention d’être minces, le corps de la jupe est devenu par courtoisie un petit corps ou corset et il deviendra sans doute un corselet. GOURMONT, Esthétique de la lang. fr., 1899, p. 207.

Le jupon suit la même évolution que la jupe qui est descendue physiquement de l’épaule vers la taille, mais est montée socialement des « petites gens » à la cour de Versailles. Le cotillon par contre a perdu la bataille : « on le dit particulièrement de celle [la cotte] des enfans, des païsannes, ou des petites gens » Trévoux 1704 d’après TLF. `

Labech

Labech s.m. « vent du sud-ouest » (Alibert) est un mot méditerranéen d’origine arabe labag « vent du sud » (en marocain lebach, en syrien labach), emprunté au grec lips « vent du sud » c’est-à-dire « vent de Libye », devenu libs en latin. La première attestation occitane date du 13e siècle, dans un texte provenant de Béziers. Nous ne le trouvons qu’autour de la Méditerranée: provençal labesc, labet, labe. Labechada « coup de vent du sud-est » (Panoccitan) est un dérivé existant ou une création  en –ata .

Un visiteur me signale: Le labech, à Pézénas est appelé « lo vent de las damas« , parce que c’est un vent plutôt agréable.
Pendant une balade  autour du bassin de Thau, nous avons trouvé un point d’attache dans le camping Lou Labech, après avoir tourné en rond pendant une heure à Sète pour trouver une place de parking. Un lieu de calme et de repos que je peux vous recommander. Tous les emplacements ont un nom en occitan, dont une dizaine un nom d’un vent, d’autres un nom d’un type de  filet ou d’une manière de pêcher.


Voir les articles Palalngre et /ou Arseilhera

Lac

Lac 1.maie de pressoir; cuve (ancien occitan) 2. lac.

Même les panneaux routiers en Ecosse n’ont pas de secret pour ceux qui s’intéressent à l’étymologie: Gaelic Loch c’est notre lac bien sûr et Loch Ness est le Lac Ness, et Inbhir Nis c’est « l’embouchure de la rivière Nis’.

monstre Loch Ness
Ci-dessus une photo que j’ai prise du fameux monstre du Loch Ness.

Latin lacus  » bassin, auge, fontaine ; lac » a la même racine que le grec lakkos « creux » et lacuna « fosse, fossé, trou où l’eau s’amasse ». Le sens « bassin » s’est conservé en ancien occitan « cuve » et en occitan moderne « maie de pressoir ». Voir aussi l’espagnol lagar « pressoir ». Le sens « fossé, sillon » est passé en basque lako « gouttière ». A Castres est attesté le dérivé laco « ados de sillon » par métonymie. Les pentes d’un fossé, d’une colline, ou les versants d’un vallon, ayant les mêmes caractéristiques et la même fonction que les ados des potagers.

En très ancien français lacus est devenu régulièrement lai, mais la forme occitane lac l’a remplacé dès le XIIe siècle.

Lacus se retrouve en roumain lac, italien, epagnol, portugais lago, catalan llac, anglais lake, gaelic et irlandais loch.

Lachinan "anguille"

Lachinan « variété d’anguille »  vient d’après le FEW du latin lac « lait ».  Occitan leitanço  et  français laitance « Substance molle et blanchâtre que le poisson mâle, à l’époque du frai, répand sur les œufs de la femelle ainsi fécondés, et qui peut être utilisée en cuisine » ont la même étymologie.   Dans plusieurs endroits le mot pour désigner la laitance a pris le sens de « poisson mâle », ou plus spécifiquement de « hareng mâle ».

Lachinan  est synonyme de  margagnons  et de   soufflards .

Dans ses Considerations le baron de Rivière donne la description suivante:

Ailleurs dans son texte il écrit que  » pour quelques auteurs le margagnon ou  lachinan  est l’anguille mâle.  Cette remarque s’accorde avec l’étymologie proposée par le FEW. Il n’y a pas d’autres attestations en dehors de celles de  Duhamel du Monceau1  et du baron de Rivière. Le mot semble limité à la Camargue.

Cet article fait partie d’une série sur le possibilité de la pisciculture de l’anguille en Camargue.

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  1. cf. aussi  mon article rasal

Lachusclo 'euphorbe', lachusclada et gin...

Lachusclo « euphorbe réveil matin » (Mistral. Voir l’explication du nom « reveil matin » en bas de la page). Mot provençal et est-languedocien jusqu’à l’Aveyron. Attesté dans l’Aude avec le sens « laitue ».  L’étymologie est un dérivé non attesté du latin lac « lait »  *lactūscŭla  ou  *lactŭscŭla,  cette dernière entre autres  pour la forme marseillaise lachousclo . Je ne peux mieux faire que vous donner l’article de A.Thomas, Mélanges d’étymologie française. Paris, 1902,  p.97.

Dans le Trésor de Mistral il y a le dérivé :

Mistral

Sa source, le Cartvlaire de Removlins; recueilli, classé, annoté et pub. sous les auspices du Conseil municipal de Remoulins. 2. livr. by Charvet, Gratien, d. 1884. Remoulins, France. Conseil municipal.Published 1873,   a été  numérisé aux Etats Unis et il est consultable pour les Américains. Mais les Européens doivent l’acheter parce qu’il a été ré-imprimé par un Anglais, le British Library,  et  est vendu par Amazon !  Par contre si vous l’avez scannez-le et mettez-le en ligne!  vous avez le droit.

Heureusement, avant de publier le  Cartulaire..  Gratien Charvet a écrit un petit livret intitulé lesCoutumes de Remoulins, qu’on peut lire et télécharger sur Gallica. Ce que j’ai fait. Ces Coutumes  datent de 1500.  Ci-dessous l’extrait qui nous intéresse:

dans le note 3  nous trouvons

Le mot lachusclada  avait peut-être vieilli?  En tout cas lachuscle  était devenue lajuscle.

A la suite de cet article Gérard Jourdan m’a envoyé un extrait des mémoires de son père, qui à l’âge de 9 ans a encore pratiqué la lachusclada.  Son histoire savoureuse se trouve  dans l’article lagagno « euphorbe ».

Le mot montpellierain ginouscla1 dont parle Thomas dans la note reproduite ci-dessus,  se retrouve dans de grands dictionnaires2copié avec une coquille typographique:

Lachusclo « euphorbe réveil matin ». Dans RollandFlore vol.IX p.225 se trouve l’explication que voici:

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  1. D’après RollandFlore IX également attesté dans le Gard 
  2. dont Littré  qui définit « nom vulgaire de l’épurge »

Ladrot

Ladrot s.m.est le nom languedocien de « l’anchois » d’après Joubin., appelé en catalan aladroc. L’origine est   l’arabe azraq « bleu » (FEW). Le lien sémantique est le fait que l’anchois devient bleu foncé quand on le sort de l’eau. Le mot est confirmé pour le bassin de Thau par Rolland et divers sites sur le Web, p.ex. celui-ci.

Le dictionnaire Panoccitan donne anchòia ce qui est manifestement un gallicisme.

Lagagno ‘euphorbe’

Lagagno « euphorbe »  est attesté dans les B.d.Rhône, à Puisserguier et à Pézenas et dans 5 autres villages dans l’Hérault ( Thesoc). Le sens le plus répandu et attesté en ancien occitan de laganhalagagna, lagagnes  est  « chassie1« . Le dérivé lagan  signifie « goutte qui découle des yeux  chassieux »,  laganhos, lagagnous  « chassieux »2

   

Il y quelques dérivés dont le lien sémantique avec « chassie » ne m’est pas clair, mais qu’un ornithologue pourra certainement expliquer: dans la Drôme lagagnousa « fauvette », à Marseille lagagnoua « roitelet » et à Teste lagagnoun « sorte de coquillage ».

En provençal existent des dérivés  comme lagagnoro « pluie soudaine et de peu de durée » qui ont un lien sémantique avec la notion « goutte, larme ».  Le  sens « euphorbe » a le même lien sémantique, comme le sens « pissenlit » , par exemple à Toulouse lagaigno,  et lagaino « renoncule » dans le Gard.

L’étymologie d’après le FEW IV,130  est le latin lagănum « gâteau fait de plusieurs couches de pâte, genre de feuilletée3 » emprunté au grec  λαγανων « gateau ». Pour les formes occitanes le FEW écrit qu’il faut supposer un dérivé ancien *laganea, mais il y a en grec déjà un dérivé qui les explique:

λαγανιον « petit gâteau ».  Le lien sémantique serait la comparaison de la chassie à un petit gâteau à l’huile; comme en allemand la chassie s’appellle Augenbutter littéralement « beurre des yeux »; ik y a aussi l’anglais eye booger littéralement « crotte des yeux » ou crusty  qui sont plus proches du sens « petit gâteau ».  En occitan c’est la notion « goutte » qui a été retenue. Voir ci-dessus.

Le Diccionari etimologic  du catalan propose une origine protohispanique, le basque  lakaiña, mais je n’ai pas réussi à en savoir plus.

Dans l’article Lachusclo j’ai déjà parlé de la pêche à l’aide de l’euphorbe la lachusclada  interdite au XVe siècle à Remoulins. La lecture de cette histoire a incité Gérard Jourdan à m’envoyer un extrait des mémoires de son père, Raymond Jourdan, ouvrier agricole à, Montagnac (34), dont je le remercie cordialement! Le voici:

Mon grand-père paternel (Milou del Cougun) m’avait enseigné un moyen facile et peu onéreux de prendre du poisson. C’était la « lagagno facile et peu onéreux de prendre du poisson. C’était la « lagagno(1)  » et un jour, j’avais 9 ou 10 ans, et avais une confiante infinie en mon grand-père, je me décidai à tenter le coup. La  « lagagno » ce n’est pas ce qui manquait à Montagnac. J’en cueillis un « fai » un fagot, que je plaçai sur un sac et avec le battoir de lavandière de ma mère, j’écrasai les plantes, faisant exsuder le latex. Repliant ensuite le sac, je liai le tout et j’allai jeter l’ensemble dans un gourg de Poudérous(2) où j’avais vu pas mal de poissons : sofis (hotus) en majorité. J’étais avec Marcel Dores et Eugène Nozeran, mes amis d’enfance, et le résultat dépassa nos espérances. Je pense que la totalité des poissons se retrouva le ventre en l’air et nous revînmes triomphants et joyeux à la maison. Mais nos mères respectives soupçonneuses (à juste titre, nous n’étions pas de petits saints), demandèrent l’origine et tout fiers, nous expliquâmes notre truc, et suprême affront pour moi, nous nous fîmes engueuler car, paraît-il, les poissons empoisonnés par le latex des euphorbes étaient immangeables et dangereux à consommer. Je fus extrêmement déçu mais n’ai jamais su si vraiment les poissons étaient dangereux à manger. Je pense qu’ils l’étaient et que le latex tuait les sofis (hotus) mais n’était pas nocif pour l’homme(3). Je n’ai jamais plus expérimenté ce procédé, peut-être aussi mon grand-père s’était-il moqué de moi ? Je ne le crois pas, sûrement qu’il avait ainsi péché dans sa jeunesse et mangé sans inconvénient le poisson.

1 Lagagno : occitan, l’euphorbe. Plante secrétant un latex, lait, « lach » en occitan, d’où son nom et ce latex est, paraît-il, toxique et ce fut vrai pour les poissons.
2 Poudérous : rivière affluent de Hérault, née à Sept-Fonts, de 8 ou 15 km de long et qui garde l’été venu de grands gourgs qui ne tarissent jamais. Le poisson remonte en hiver et au printemps de l’Hérault et restaient parfois prisonniers dans les gourgs.
3 Dans certains pays africains, le latex d’euphorbe est utilisé pour la pêche (NdG)

Cette méthode de pêche s’appelait lachusclada  à Remoulins au XVe siècle. Voir mon article  lachusclo.

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  1. voir Thesoc s.v. chassie.
  2. Gérard Jourdan m’écrit à propos de la marrana : « J’ai souvenir que nous traitions cette maladie de l’oïdium avec du soufre qu’il fallait projeter sur le cep de vigne avec une soufrette (tu dois avoir le schéma dans le document de mon père) ce qui projetait du soufre un peu partout (y compris sur le visage (surtout s’il y avait un peu de vent) et nous rentrions à la maison (le traitement se faisait tôt le matin, justement pour éviter le vent) avec des yeux « lagagnous » et gonflés.
  3. voir Zeitschrift 41,690 . Le FEW écrit que lagagno ne vient certainement pas du gaulois láginon « euphorbe » comme propose Bertoldi Zeitschrift 44,112

Lagasto, langasta

Langaste « tique qui s’accroche sur la peau de nombreux animaux » (Camargue), langasta « tique; sauterelle; brocard » (Alibert). Dans un glossaire anglosaxon du VIIIe siècle se trouve ladasca: piae. Piae est une sorte de tique. Le type ladasca se trouve dans différentes formes dans toute la Galloromania.

En occitan domine un type *lacasta. La métathèse (c-à-d. échange de  leurs places  du -c- et du -d-) et le remplacement de -d- par -t– serait dû à l’influence d’un autre mot qui désigne des insectes: locusta. Nous trouvons le même type en catalan llagasta et en basque lakasta.

L’origine du gallo-latin ladasca est probablement un gaulois *laus daska « puce qui mord ». La forme avec insertion d’une nasale se trouve en provençal et en languedocien jusqu’en Aveyron. La forme lagasto se rencontre partout en Occitanie

La vie d'une tique