Esquillà, resquillà
Esquillà, resquillà avec le sens « déraper, glisser ». Voir l’article quilha
Esquillà, resquillà avec le sens « déraper, glisser ». Voir l’article quilha
Esquisso ‘ébauche, premier crayon d’un ouvrage » (Marseille, Achard C.-F) a bien sûr la même étymologie que le mot français. J’y reviens parce que cette histoire mérite de une place à part. Elle était un peu perdue dans l’article esquicher, mot occitan que tout le monde connaît.
Dans les parlers italiens, occitans et catalans existe une grande famille de mots qui ont tous comme origine une onomatopée skits, skitš qui imite le bruit que fait un liquide quand on le fait sortir par pression1. Pour le riche développement de ce mot voir l’article esquicher.
A cette famille appartient le mot italien schizzare qui signifie « faire jaillir un liquide sous pression » et le substantif schizzo qui désigne cette action. . Schizzo signifie également « la tache qui naît en faisant jaillir un liquide ». Puis au XVIe siècle Giorgio Vassari2 peintre, architecte et écrivain utilise schizzo avec le sens « premier plan d’un ouvrage d’architecture ».
A cette époque la langue italienne jouait en France le rôle que l’anglais joue de nos jours. La première fois que le mot apparaît en français c’est sous la forme esquiche « premier plan d’un ouvrage d’architecture » en 1567, ensuite c’est esquisse depuis 1611 dans le dictionnaire de Cotgrave, qui donne quand-même le verbe « esquicher » pour « tracer le premier plan etc. ». Le sens du mot s’est généralisé en passant dans les autres arts plastiques, dans la littérature et enfin depuis la deuxième moitié du XIXe siècle esquisse devient pratiquement synonyme de « ébauche ».
Plusieurs dictionnaires proposent schedium comme étymologie, mais von Wartburg écrit que cela est peu probable sinon impossible pour des raisons d’ordre phonétique. FEW XII, 6
Estirgonhá et estrigoussá « tirailler, étirer » . Une étymologie assez compliquée.
D’après le FEW il s’agit d’un mot composé de es- + tir- + gonhá. Il est attesté en languedocien, en gascon ainsi qu’en catalan: estireganyar « déformer quelque chose en l’étirant » . L’abbé de Sauvage donne en plus les formes estrigoussa ou trigoussa et les sens « traîner; tirer par les habits ou par les bras ».
L’élément es- de estirgonha ou estrigongha a été ajouté par un croisement avec le verbe trigoussá, estrigoussá « tirailler quelqu’un, secouer avec violence » un dérivé du latin tricare « susciter des embarras, créer des difficultés » d’un latin classique tricari qui est conservé en occitan trigar « tarder, se faire attendre ». En catalan exiqte le verbe estiregassar « estirar violentament alguna cosa per fer-la seguir, allangar-la, arrencar-la » (DE).
L’élément –tir- vient de tirá « tirer » un mot dont l’étymologie a été longuement discutée et qui semble venir du latin martyrium « tombeau d’un saint, mort ou tourments endurés pour la religion chrétienne ». La torture la plus courante au moyen âge était justement d’étirer le condamné. Le bourreau s’appelait en ancien fr. tirant du latin tyrannus. Le verbe tirá doit être très ancien parce qu’on le trouve dans toutes les langues romanes.
L’élément –gonhá se retrouve dans les patois suisses et les régions voisines : vougni « tirer par les cheveux » et le mot tirvougné « tirailler » également. A cause de la forme et de la répartition géographique, von Wartburg propose une origine gotique *wunnjan « blesser, faire souffrir », dérivé de wunds « blessure », Wunde en allemand, néerlandais wond, anglais wound.
Dans le TLF estive est défini comme « Pâturage de haute montagne dans les Pyrénées. », et par métonymie : »Séjour dans ces pâturages ». Le mot est assez récent: 1933 avec le sens « pâturage » et a été emprunté à l’occitan du département du Puy-de-Dôme en 1876 avec un sens très spécifique de l’Aubrac « unité exprimant la valeur de la consommation d’une tête de bétail pendant une saison et sur le pied de laquelle on paie la dépaissance « . Ce sens se trouve dans les Larousses de 1876 jusqu’en 1945.
Le mot estiva est attesté en ancien occitan depuis 1216 avec le sens « récolte » et à Montauban au XIVe s. » travaux d’été ». On le trouve dans de nombreux parlers occitans avec le sens « pâturage ».Cf FEW XXIV, 235a
Un séjour d’une semaine dans le Puy-de-Dôme m’a donné l’impression que de nos jours estive et festive sont bien associés dans l’esprit des touristes et désigne en premier lieu un bon restaurant ou une fête locale, votive celle-là. Dans l’Aubrac c’est peut-être devenu « la valeur de la consommation d’une tête de touriste pendant une saison »
J’ai failli oublier l’étymologie : latin aestivus « qui a rapport à l’été ».
Des estivenques.
Où peut-on encore trouver ces petits escargots sur les menus des restaurants ? D’après Sylvain, auteur d’un site qui a disparu, on trouvait dans les années soixante encore dans les rues de Marseille « la marchande de limaçons dont le cri était phonétiquement : à l’aïgue sont, les limaçons pour la rime, et petit escargot à l’eau salée pour la signification. ». Confirmé par Marius Autran dans le lexique de La Seyne : Aigo-sau « aumure, eau salée, mets de poissons bouillis (litt., eau et sel). A l’aigo sau ! : C’était l’appel du marchand d’escargots et de limaçons blancs. » Sylvain décrit les estivenques : « Ces limaçons sont une espèce de petits escargots, quelquefois aussi appelés colimaçons ou limaces, que l’on trouve en été sur les fenouils montés. Le diamètre est de un centimètre à un centimètre et demi environ. La couleur part du blanc (attention, pas blanc immaculé, c’est une autre espèce un peu plus petite) au marron clair en passant par toutes les nuances de beige, avec des stries plus nuancées qui épousent la spirale de la coquille. La chair est beige translucide. »
Voici une recette de Claude Viallat Estivenques à l’huile d’olive, a été publié par la Gazette de Nîmes dans un petit recueil Les Nîmois livrent leurs secret de cuisine. 30 recettes du Sud.
Mistral écrit dans le Trésor du Félibrige que estivenco désigne dans le département de l’Hérault un « escargot d’été ». Il doit s’agir du colimaçon dont le nom scientifique est « hélix vermiculata L. » ou « eobania vermiculata ». Comme il s’agit d’un escargot d’été l’étymologie est transparente ; il doit avoir la même origine qu’ estiu « été .» En effet il est dérivé du latin aestivus « qui a rapport à l’été » à l’aide d’un suffixe -incu.
Estivenc avec le sens «qui a rapport à l’été » se trouve déjà dans des textes en ancien provençal. Il a le même sens dans de nombreux mots occitans, comme albenc « vêtement ou couverture de couleur blanche », blavenc « bleuâtre » et dans notre département La Gardonnenque. Ce suffixe qui date d’avant les Celtes semble bien vivant dans notre langue occitane.
Ces mêmes escargots blancs s’appellent aussi missounaire, missounenque ou mourguéto. Glibert Lhubac donne pour Gignac (34) le mot cagaraoule et le diminutif cagaraoulette. D’après lui ce mot est devenu un générique pour plusieurs espèces de petits escargots dont le Cernuella variabilis qui grimpent vers la fin de l’été sur les tiges des fenouils mais aussi des graminés. Il ajoute que le mot meisonencas est provençal.
Estobla « chaume, paille » vient du latin stipula > latin parlé stupula. Un visiteur me donne l’information suivante :
on appelle la mante réligieuse: lou prego-Dièu d’estoublo ou de restouble, ce qui se dit aussi d’une personne maigre et pâle.
stipula « chaume, paille » < latin vulgaire stupula
C’est un des nombreux exemples qui montrent que les Occitanophones sont particulièrement avantagés pour l’apprentissage des langues étrangères.
Latin stipula a donné le verbe > stipulari « exiger un engagement formel, stipuler » (on rompait une stipula « paille » en signe de promesse) > français stipuler, > anglais stipulate, catalan, espagnol estipular, néerlandais stipuleren.
Estoc Un visiteur m’écrit: : à Marseillan et ici, les locaux désignent la rive sud-est de la lagune de Thau en disant : les tocs. J’ignore s’ils l’écrivent ainsi ou thoc. En français maritime classique on a appelé « étoc » un recif.
J’ai pu lui répondre: Dans le TLF je trouve: E(S)TOC : SYLVIC. Coupe d’un bois qui n’en laisse rien subsister (cf. coupe blanche). Synon. vx blanc-être. Couper à blanc-étoc . Étymologie : un ancien francique stok « souche, tronc d’arbre ».
Mais le problème est que ce mot avec ce sens n’existe nulle part en occitan. En occitan estoc désigne » un grand bloc de bois sur lequel les serruriers et les forgerons fixent les pièces qu’ils travaillent : Marseille estoq, Aix en Provence esto, Lozère éstok etc. Ensuite j’ai trouvé à Gap toc « pieu » et dans le Cantal estocado « pieux de soutien dans un barrage », qui correspondent à un ancien français estoc « poteau, pieu ». Alibert donne estoc « étau » , mais il n’y a aucune confirmation dans les dictionnaires occitans. Ceux-ci viennent bien du germanique stok, néerlandais stok « bâton ». Pour être sûr, il me faudrait une photo de la rive sud de la lagune, peut-être même une ancienne photo pour voir s’il y a(vait) des estocs.
L’origine du terme stock-options n’est pas tout à fait clair.
Estaque « tronc d’olivier » dans Lexique de Labrusse. L’Estaque à Marseille dont l’étymologie est discutée.
estourelhà « faire sécher devant le feu » voir l’article tourin, touril.
D’autres dérivés bien languedociens sont les verbes se tourilhà , se tourrouya ‘se chauffer, se câliner devant un bon feu », qui en gascon devient estourelhà « faire sécher devant le feu ». L’abbé de Sauvage connaît la forme s’estoulouirà « se câliner au soleil ».