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Font

Font « fontaine, source », prononcé fong ou fwong (p.ex. à Avèze) dans le Gard d’après le Thésoc.

Latin fons, fontis signifie « source » et est masculin en latin classique, mais devient féminin à partir du IVe siècle. Fons a disparu dans une grande partie de la Romania, notamment dans le Nord de la Gaule, probablement par l’homophonie avec fond provenant de fundus. Fons est conservé en italien fonte, en catalan font et en espagnol fuente, en occitan et en franco-provençal. Des toponymes prouvent qu’il a dû exister dans le domaine d’oïl jusqu’aux départements de l’Aisne (Fontvannes) et de l’Aube (Fontette). Une grande fontaine publique s’appelle grifol

Français fonts, sousentendu baptismaux est un emprunt au latin de l’Eglise. 

Une étymologie peu intéressante! Mais j’en parle parce que pendant un week-end à Barcelone j’ai pu voir le spectacle grandiose de la Font de la plaça d’España. Cliquer sur ce lien pour avoir une idée!

Bien sûr il y a aussi la A la Font de Nîmes…. (Musique et images)! Celui-ci vous mène à You Tube. Texte et musique en même temps.

 

 

Foriscape: un crime devenu un droit

Foriscape « droit aperçu par le seigneur en cas de mutation » Ce mot  composé de capere « saisir » + le préfixe  foris « for- »  (comme dans  forfaire) est né dans le latin  administratif du haut Moyen âge.

(Source A. Thomas,  Essais de Philologie française.  Paris , 1897. p.87).

Il semble qu’au début du IXe siècle foriscapium  (Du Cange ) avait encore le  sens d’un  « don » illicite, contraint par la force, exaction : per vim vel contra jus captum…..  « saisi par force ou conte le droit » et  tributul haud debitum  « une contribution vraiment pas due » :

(DuCange, et la p. suivante)

Nous voyons qu’une infraction ou un crime peut devenir un droit.

 

Fougasso

Fougasso « gateau ».

Etymologie: le mot lat. focacium  un dérivé  de focus « feu », désigne une sorte de pain cuit dans les cendres et non pas dans le four. Le mot est resté en ancien occitan fogasa  1391, en français  fouace, italien focaccia, catalan fogassa, espagnol hogaza, portugais fogaça et dans les patois pour  désigner toutes sortes de gâteaux, tartes, pains  avec ou sans grotillons.

L’expression provençale faire fougasso signifiait « être surpris par la pluie, lorsqu’on  a ses gerbes étendues sur l’aire » et de là « ne pas réussir ». Cette évçolution sémantique peut s’expliquer par le fait  qu’une fougasse  est plate.  En languedocien esfougassa  signifie «aplati » et  le substantif   fougasse « fiasco » (Job) .

          

occitan fougasso, italien focaccia, espagnol hogaza  sont toutes plates!

Fougnar

Fougna,  fonhar a deux significations  en occitan 1. « pousser, cogner, soulever, presser » etc. 2. « bouder,  faire la tête ». Le composé fougne-merde prouve que le verbe languedocien fougna a (eu) deux sens

  • 1) fouiller, fureter, péjoratif ou parlant des animaux
  • 2) grogner, bouder. .
Il représente un verbe latin*fundiare « fouiller la terre  (en parlant du sanglier) » dérivé du latin fundus « fond ; terre ».

Le sens « fouiller » est attesté à Nice et dans le dictionnaire d’Alibert s.v. fonhar « pousser, cogner, soulever, fouiller ». On le retrouve dans le Nord-est de la France et en Wallonie.

Le sens « bouder » est issu du premier par la comparaison d’un animal qui fouille la terre aux joues gonflées d’une personne qui boude. Fougner en français .régrégional (Lhubac). Il  se trouve en Normandie, Le Maine, Poitou, Franche-Comté, en provençal et en est-languedocien : par ex. Alès « faire grise mine », jusqu’en Velay et au Périgord, mais pas en gascon.

. Se fougner veut dire « s’éviter » : « Toutefois à certaines occasions… on se fougnait » (Domergue p.161). Fougna  est à l’origine de nombreux dérivés comme fougnaire « boudeur »  et de

Fougnarello « ancienne danse provençale mentionné par C.Brueys » (Mistral, mais il m’est impossible de retrouver le passage exact. Il n’est pas impossible qu’il s’agit d’un mot « fantôme », mais il me permet une petite excursion dans le moinde de la danse et de la musique1).

Ce dérivé.  de fougna « bouder ». « La Fougnarello (“Boudeuse”)  paraît se rattacher au mythe de la Mort de l’Hiver  qui ressemble à l’Angrismène des Grecs et à la Fachée française ». (Christian Mandon ‘L’origine de l’arbre de mai’ A paraître). Cette danse est exécutée en honneur de Vénus.


Coré d’Eutydichos dite « Boudeuse »,

Il y a aussi un ballet dont Stravisky a composé la musique. Dans La Fâchée les acteurs dansent  l’histoire d’une belle qui refuse les avances d’un amant.  Quand, désespéré, il tente de se suicider, elle accourt et tout finit bien. L’histoire complète de cette danse  se trouve dans le site : http://www.streetswing.com/histmain/z3angry.htm  (en anglais).

 

  1. Vu les liens étroits entre la Provence et la Grèce avant l’arrivée des Romains, il est intéressant de noter que cette danse provençale correspond à l’Angrismène  une danse  qui est toujours très populaire en Grèce et cela depuis l’Antiquité.

Fouiro

Fouiro, « diarrhée  où les évacuations fécales sont presque liquides » comme fr. foire (vieilli)  et l’adj. foireux viennent du latin  foria.

Ce mot se trouve dans tout le domaine gallo-roman,  en portugais et en Italie du Nord. Le verbe languedocien  fouirá ‘foirer’ et l’adj. fouirous  sont dérivés du substantif.

Fourfouillar

Fourfouilla(r) «farfouiller (S) ; gigoter, s’agiter en tous  sens »(Job). Le mot qui n’existe qu’en galloroman, y est fortement répandu.

La forme avec le préfixe four-  est limitée au dauphinois, le provençal et au Gard et à l’Hérault en languedocien.  Il faut  supposer un lat. *fodiculare « creuser la terre pour chercher quelque chose » dérivé de fodere « piocher ».

fourniá, foronisar, denisar

Fourniá, foronisar, denisar « quitter le nid » est composé de foras (dehors) + nidus +are. La forme donné forgnar par Alibert n’est attestée nulle part d’après le FEW 7,122a-b., ce qui est confirmé par les données du Thesoc. Partout c’est foronisà, horoniza dans le Gers, frognar, fo(u)rniá, fourniá. Le verbe existe aussi dans le Bourbonnais, le Centre et le Berry.

Un jeune oiseau qui a quitté le nid s’appelle un fourniau (Marseille), un foronison (Toulouse, Tarn, Castres) ou un froniol (Cahors). Dans la Haute Provence , le Poitou et dans la Sologne le verbe a été renforcé par ex- : s’efforgner « quitter le nid; s’émanciper », qui existe aussi dans le Nord de l’Italie. Voir aussi l’article asirar  « se mettre en colère »  devenu  « abandonner le nid »  > « s’émanciper ».

A partir de nidus ont été formés aussi les verbes  déniar, denizar « dénicher, abandonner son nid » < de + nidare (Creuse, Dordogne) et aniar, anizar « nicher, faire son nid, couver » et s’aniar, s’anizar « se nicher » < ad + nidare.

Dans l’Aveyron le participe passé onià, oniqua, aniat a pris le sens  » affaibli par défaut de nourriture »; ce sens a dû naître sous l’influence d’un dérivé de nihil : (a)nequeriment « faiblesse par manque de nourriture » (FEW 7, 139b).

Toujours dans l’Aveyron on a créé le verbe desonisà « dénicher » < de + ad + nidare , dans la Corrèze désanià (Thesoc) .


prêts à  fournia, déniar, ou denizar.

Fourniol

Fourniol « pièce où est le four » fournil  en français.

Un fidèle visiteur m’écrit:

bonjour,
je trouve dans le compoix d’Espédaillac (1758) dans l’énumération des biens
sujets à allivrement : maison, four, fourniol. j’ai cherché dans plusieurs dico
anciens et ne trouve pas de rapport avec le four ? ms pourquoi ces 2
expressions consécutivement?? endroit où l’on rangeait le bois pr ou près du
four??

J’ai pu lui répondre:

Bonjour,
Je vous remercie de votre commentaire.
Je crois qu’elle mérite un article fourniol  plutôt qu’un commentaire  dans la page d’accueil.
Elle montre aussi que le prof. J.P. Chambon  a raison quand il écrit dans la Revue de linguistique romane 76 (2012)1

Images intégrées 1…..

Le mot  fourniol  se trouve dans le FEW vol. III, p.904 b;
Attesté  à Cahors,  dans l’Aveyron  fourniol, ofourniou,  à Ytrac  fourgnéw,  à  Chavanat (Creuse) fourgnôou,  dans le bas-limousin  fournial  (comme dans le Tarn  fournial)  et à  St-Pierre de Chignac  fourniau. Dans le Poitevin c’est le fourniou  comme dans les Deux-Sèvres.
Le sens de toutes ces attestations est  « pièce où est le four ».
Vu le fait que votre village se trouve dans le Quercy, il n’y a pas de doute sur le sens de  fourniol  dans le Compoix.
Si cela vous intéresse, je peux vous fournir les sources du FEW concernant ces attestations.
Amicalement,

Cette attestation dans le Compoix d’Espédaillac de 1758 est probablement la première. Il reste tujours beaucoup de travail pour les occitanistes :

TLF :

Occitaniste, adj. et subst.a) Adj. Relatif, propre à la langue occitane. La recherche occitaniste (Amiras,1983, no6, p.55).b) Adj. et subst. (Personne) spécialiste de la langue et de la littérature occitanes. Chercheur occitaniste. « On remarque la rareté des occitanistes, leur faible pouvoir d’intégration à l’appareil de recherche, jusqu’à une date récente du moins « (Amiras,1983, no6, p.55).

 

 

Fourrupa, forrupa

Fourrupa, forrupa « humer, sucer, boire d’un trait (Gers), boire avec avidité » etc. et un fourrup une « gorgée » un mot occitan de l’ouest, à partir de Toulouse. En lisant l’introduction à l’oeuvre de Goudouli, j’ai trouvé la description que voici:

fourrupa dous poutets

D’autres formes avec h-, ch-, ou s- initiale. h- < f- est l’évolution régulière en gascon. ch- sous l’influence de l’espagnol. Ce groupe de mots a son correspondant en espagnol churrupear  » boire du vin en petite quantité en le dégustant » et il est probablement d‘origine onomatopéïque et imite le bruit de quelqu’un qui aspire en buvant. Le f- initial des formes occitanes provient peut-être de l’influence du verbe fourrá « faire entrer ». Voir encore Corominas 2,98
Néerlandais slurpen, allemand schlürfen, norvégien slurpe,, anglais slurp (verbe) signifient tous « boire en aspirant et faisant du bruit ». Anglais slurp subst. « an intake of food or drink with a noisy sucking sound ». Le bruit est essentiel! En français il n’y a pas de verbe qui décrit cette action. FEW XXI, 465b.
Mon amie catalane m’écrit : Je suis le petit « débordement « de bleu catalan dans ta carte, d’ où petites divergences. exemple ::on dit xarrupar pour « siroter, siffler ( boire) ». (x en catalan = [ch] français)

Voir l’article  chourler   « boire en aspirant » et le commentaire de Stéphane.

 

Frago

Frago « fraise ». La fraise est rarement solitaire; c’est la raison pourquoi nous la trouvons généralement au pluriel du latin fraga et non pas au singulier fragum. Par la suite ce pluriel a été pris pour un féminin singulier, qui a été conservé en gascon: frago, arago ( > basque arraga) et en franco-provençal freye. Mistral donne le dérivé flaiousso « fraise » pour le Var.

En languedocien c’est le type pré-roman majofa qui s’est maintenu.

Au Nord de la Loire, les noms de la fraise et de la framboise se sont mutuellement influencés1 Framboise qui vient d’un étymon *brambasi a pris le f- initial de fraga et frey, forme conservée en wallon et en franco-provençal,  a pris le –s final de framboise, ce qui a abouti à freise (depuis XIIe s.). Avec le succès de la culture de la fraise qui commence au XVIIe siècle, la forme de la langue littéraire a supplanté les formes et les mots locaux, de sorte que ceux-ci comme par ex. majofa ne désignent souvent que la « fraise des bois ». FEW III; 478

Emprunté au français : espagnol fresa.

C’est Antoine_Nicolas_Duchesne qui en 1766 donne la première description scientifique de la fraise telle que nous la connaissons. Il semble que c’est l’officier du Génie maritime Amédée-François Frézier revenant d’une mission d’espionnage des ports espagnols au Chili et au Pérou pour le Roi soleil, qui en 1714 a importé en France les fraises chiliennes qui sont à l’origine des fraises actuelles. Un prédestiné?? Le Musée de la Fraise  pense que c’est le cas.

     Frézier

  1. En Corrèze et dans le Puy-de-Dome frezo signifie « framboise »