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enquestre ‘vieillerie’

Enquestre souvent au pluriel enquestres « vieux objets inutiles  et encombrants ». A Marsillargues
enquestre
peut aussi prendre le sens « gêneur qui est toujours au milieu comme le jeudi et auquel on dit :

lève toi de là vieil enquestre » (Source : jeandumas.unblog.fr).

Il semble que le mot est assez courant dans la région nîmoise, en tout cas je l’ai entendu régulièrement à Manduel.I Le mot ne se trouve pas dans le dictionnaire d’Alibert, et dans le Trésor de Mistral il est caché avec un autre signification dans l’article Enquesto.

enquestoMistralEnquestro pour ourquestro.

Mais  enquesto peut aussi avoir le sens de « chose de peu de valeur ».

Mistral nous fournit aussi encastre mais pas le sens « vieillerie »:

encastr

Il y a plusieurs années j’ai rattaché enquestre au nom d’un marché aux puces toulousain l’Inquet, « hameçon »,mais cela me semble un peu tiré par les cheveux maintenant.

 

 

 

 

 

Enquiller

Enquiller v. Dans la moyenne vallée de l’Hérault, G. Lhubac signale en français régional le verbe enquiller avec les sens :

  • « se faire avoir »; à mon avis il s’agit d’un euphémisme pour « entuber, enculer « ; l’expression est se faire enquiller. En argot enquiller « entrer, faire entrer (depuis 1725), pénétrer quelque part ». La métaphore est claire. Un visiteur me signale qu’ à Nîmes on dit enquiller une vis dans un trou, et enquiller des perles sur un fil. Je ne sais s’il s’agit de l’argot parisien qui est descendu dans le Midi ou de l’occitan qui est monté à Paris.
  • au figuré « endosser, assumer » comme en fr.populaire « caser, pourvoir d’une place » et en Sologne « endosser, mettre un vêtement »
  • « supporter, blairer au fig. », dans une phrase comme Cinq ans de prison, il faut les enquiller. (Lhubac). Probablement lié au sens « empiler ».

Le TLF  écrit argot  enquiller « dissimuler entre ses cuisses un objet volé » 1847.   Dérivé  de quille* sens  en argot  de « jambe ».

L’étymologie pourrait être quilha

 

Ensarria(da)

Ensarria(da) s.f. « sacoche », ensarriada « contenu d’une sacoche ». (Panoccitan). Alibert donne des définitions plus précises : ensarrias f.pl. « grands cabas de sparterie qui se placent de chaque côté du bât des bêtes de somme ».

Mais  une ensarriada est aussi une « ravine », et le verbe ensarriar « creuser des ravines », comme verbe réfléchi il signifie « s »égarer; battre la campagne ». Etonné de trouver ensemble une ravine et une sacoche j’ai cherché une explication dans leur histoire.

Le lien entre ensarriar et ensarriada étymologie n’est pas évidente. Tous les mots que l’on trouve dans les langues romanes supposent une origine *sahrjo avec le sens « panier, corbeille ». Dans le sud de l’Allemagne existe le mot sahar « jonc ». Or, le matériel utilisé pour ces paniers est du jonc ou de l’esparto et cela permet d’après le FEW de supposer une origine germanique. Pour les parlers occitans, il faudrait supposer une forme gotique *sahrrja.

En ancien languedocien du XIIe siècle (Nîmes, Montpellier, Narbonne) est attesté le pluriel sarrias  » manne à double compartiment mise à cheval sur le bât des mules ». Un verbe *ensarriar avec le sens « mettre dans les sarrias » a dû exister (Il y a encore beaucoup de manuscrits en occitan à dépouiller !). A partir de ce verbe a été formé le substantif ensarri « manne à bât en treillis », ensarios « les cabas qu’on met sur la barde d’un cheval »  (S1).

jonc     ensarias    esparto

jonc                                             ensarios                                                    esparto

L’évolution sémantique de ensarriado « contenu des panier » > « ravine; torrent qui descend avec impétuosité des montagnes » n’est pas évidente. Le FEW l’explique par une image : des ensarriados pleines de terre et de cailloux se vident en descendant de la montagne lors des grands orages et créent les ravines. Les formes avec ei- < ex- ( sortir ) au lieu de en- < in- (mettre dans) s’expliqueraient aussi par cette image.
Je dois dire que je ne suis pas convaincu, mais je n’ai pas une autre étymologie à vous proposer. Si vous avez une idée, n’hésitez pas à me contacter. !

Ensucar, ensuquer

Ensucá(r), ensuquer en fr.rég. « assommer » absent d’Alibert dans son article suc « sommet de montagne » . En ancien provençal  suc signifiait « sommet de la tête; occiput; nuque », et une forme suca « tête, crâne » conservée jusqu’à nos jours dans les composés ensucar littéralement « frapper sur la tête », et supela , dans a lou supela « il est chauve » ( = le suc pelé).

Le FEW rattache notre suca à l’italien zucca « courge; au fig. tête » et à un groupe *tukka avec les sens

  • 1) « courge » : languedocien tuco « courge » (S2), tuquiè « plante de courge »;
  • 2) « tête » : tucasso « grosse tête » (Béziers, M); languedocien atuca « assommer » (S2);
  • 3) « sommet, colline » tukó « hauteur, tumulus » (Gers), languedocien tuqel « tertre, coupeau, sommet de montagne » (S2). Cette famille de mots serait d’origine pré-indoeuropéenne et fait donc partie d’un héritage qui date d’avant l’arrivée des Celtes en Gaule. Vous vous rendez compte? Cela m’ensuque!.

Pour ceux qui veulent approfondir ce sujet, il y a un article d’A.Dauzat  dans la Revue des Langues Romanes, t.66 (1929-1932)pp.66-73 : CUCC-, TUCC-, ZUCC-, suc « hauteur, montagne », consultable grâce à Gallica (lien direct)! et le FEW 13/2, 399b*tukka.

L’Originalité de la Ville  (sc. Yssingeaux) et de son  Environnement tient des Montagnes Qui l’entourent appelées les Sucs.

au fond un suc

Erugo ‘chenille; roquette’

Erugo, rugo, arugo « chenille »  et « roquette » (eruca sativa)

Erugo S2

L’étymologie est le latin erūca  qui est attesté avec les deux significations « roquette » et « chenille ». L’étymologie de erūca n’est pas claire, en particulier du point de vue sémantique. Quel est le point commun de la roquette et d’une chenille?. Ernout-Meillet fait la proposition suivante:

eruca_ErnoutMLa forme ūrūca qui est à l’origine de l’espagnol oruga  et attestée chez Pline est expliquée par le FEW comme une simple assimilation, tandis que  Ernoult pense à  ūrō « enflammer, exciter » ce qui reste à prouver.

Les attestations de eruga, auruga « roquette » sont plutôt rares1, parce qu’au début du XVIe siècle le diminutif roquette a été emprunté à l’italien par les Parisiens, de sorte que le nom roquette a gagné tout le pays et a remplacé  russe ou  de l’eruce, d’un dérivé *erucia,  noms attestés dans l’ouest de la France.

La roquette vendue sur le marché actuellement est un cultivar produit en Italie.  A Manduel et je pense ailleurs dans le Mdi, la roquette à fleurs jaunes pousse un peu partout en bordure des chemins et des vignes. Elle est comestible mais les feuilles sont plus dures.

roquette

FEW III, 241

  1. Voir RollandFlore II,p.83 eruca sativa

escabot ‘troupeau transhumant’

Escabòt  « Troupeau transhumant » dans Thesoc, AUDE, GARD, HERAULT, PYRENEES ORIENTALES. vient du latin scapus « tige, tronc, fût d’une colonne ». Pour les formes et les sens voir FEW XI, 287b

L’évolution sémantique surprend, mais la même évolution a eu lieu avec ramus « tige » dont le dérivé en ancien occitan   ramat  signifie également « troupeau », ramat ou arramat en languedocien  moderne FEW X, 44 b « tronc ».

En plus, une évolution analogue s’est produite dans le sens du mot allemand Stamm « tronc »  qui a pris le sens de « partie d’un peuple, famille », sens qui est utilisé dans le classification des plantes et des animaux et dans la généalogie. Eve est la Stamm Mutter du genre humain.  Toute la descendance d’un Mère fait partie du Stamm. A partir de cette l’évolution on comprend  le sens « troupeau » dans l’élevage, à partir d’une mère ou d’un père.  En français on parle de l’ arbre généalogique, en néerlandais du stamboom.

Troupeau-transhumant venant-de-Lasalle-credit-photo-Guy-Gregoire

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Escafar

escafar « écosser les légumes, écaler les noix, les amandes » voir cafo

Escafit "morue séchée"

Escafit s.m. « morue séchée à l’air libre » voir l’article  estofi

Escafit, -ida

Escafit, escafida adj. »étriqué » (Pan); « étroit, étranglé » (S2). En ancien occitan escafit signifie « svelte, allongé, élégant », comme eschavi en ancien français.  Raynouard le traduit par « potelé » , mais dans le contexte « svelte » est peut-être mieux. Il s’agit en tout cas d’une qualité. Jugez vous-même:

Le verbe de l’ancien français eschavir signifie « parer, façonner. »

Le FEW propose comme étymologie un ancien franc *skapjan « créer, former » , néerlandais scheppen, allemand schöpfen. (Cf. Grimm). Escafit, -da faisait partie du vocabulaire de la culture chevaleresque du Moyen Age.

Uniquement en provençal, notamment à Marseille, nous trouvons l’expression parlar d’escaffi « parler ironiquement à quelqu’un » et escaffi s.m. « chagrin, inquiétude », escaffiar « mépriser, rebuter, dédaigner ». Je ne vois pas très bien quelle évolution sémantique peut expliquer celà ??

Escagassar

Escagassar, v.tr. « fienter avec effort » escagasser en fr. rég., v.r. s’escagassar « s’efforcer pour aller à la selle »,  « écraser, aplatir » (Alibert) est devenu français depuis 1902 voir le TLF. L’évolution sémantique en français vers

L’étymologie de la forme, latin ex + cacare ne pose pas de problèmes.

Le verbe escagassar était limité à l’ouest-provençal et l’est-languedocien. avec comme sens principal « s’accroupir ».  Louis Rouquier l’utilise pour dire « se pâmer de rire ». Il a été introduit en français à l’aide de l’argot, probablement à partir de Marseille.

Cacare est une onomatopée qu’on trouve dans beaucoup de langues indo-européennes, catalan, espagnol, portugais cagar, allemand kacken, néerlandais kakken, etc.  La forme française chier a perdu par l’évolution phonétique tout consonance onomatopéique, de sorte que dans le langage des enfants elle a été remplacée par caquer, caguer.