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Carrel, quéron

Carrèl, cairèl « carreau, compartiment carré; case de damier; carreau de cartes; outil de tailleur; pavé plat (voir plan ) ;etc. …..voir Alibert.  Dans les Cévennes : carré de papier fort à bords relevés sur lequel on place les vers à soie nouveau-nés. L’étymologie de la forme est la même que celle du français carreau latin vulgaire *quadrellus (dérivé de quadrus « carré ») représenté par le latin médiéval quadrellus « mesure agraire de superficie ». Les sens varient suivant le milieu dans lequel il est utilisé : un carrèl n’est pas la même chose pour un joueur de cartes que pour un éléveur de vers à soie. Le plus utilisé est le sens parpaing (appelé aussi bloc béton, moellon ou queron, caironselon les régions).

                                                                En bas à droite un carrèl (Wikipedia

Cartagène

Cartagène «mélange de moût de raisin et d’alcool ». Etymologie: du nom de la ville Cartgena dans la province Murcia en Espagne. Il remplace le mot calabre, qui n’existe plus, mais qui d’après Mistral avait exactement ce sens. Un vigneron du coin  m’a appris que la cartagène est faite  comme on faisait le calabre.

Comme il y a des controverses sur l’orthographe du mot : cartagène ou carthagène, l’origine  du  nom  du  produit peut nous éclairer.

Mistral

Entre 1860 et 1870 il y a eu beaucoup de contacts entre le Félibrige et la  Catalogne. En 1867 Victor Balaguer trouve refuge politique en Provence. Pour remercier les félibres provençaux, les
félibres Catalans leur offrent la Coupo Santo qui représente deux sœurs,  la Catalogne et la Provence.  Frédéric Mistral chantera en leur honneur la Cansoun de la Coupo (= ) lors d’un banquet en Avignon le 30 juillet 1867. La Coupo Santo est  devenu l’hymne régional du pays d’oc,.

Prouvençau, veici la Coupo
Que nous vèn di Catalan

En catalan existe le verbe calabriar « couper le vin ». Calabriar a dû être un mot péjoratif car déjà au 17e siècle, il y avait en Espagne  la croyance populaire que Judas, le traître, était un  Calabrese. Un calabrese était un traître ou un bandit.  Le mot calabre avait le sens «vin coupé ».   Déjà à l’époque les lois du marketing s’imposaient.  Vin coupé n’est pas très vendeur. Le nom du produit a été changé à la fin du 19e siècle en  cartagène d’après le nom de la ville de Cartagena dans la province Murcia. Le mot cartagène s’écrit donc sans –h- parce que son origine est Cartagena.

Casau

Casau « cabane »(Alès) . vient du latin  casalis «ce qui fait partie de la ferme » en aoc. casal un dérivé de casa . A partir du VIe s., le mot casalis désigne également des bâtiments, conservé dans casau.

En provençal et languedocien, le mot a pris un sens péjoratif  « maison en ruines », déjà attesté en ancien provençal en 1475 et en languedocien. en  1655.

Cascalhar

Cascalhar, cascailler « caqueter; bavarder », d’un latin *quasicare « secouer; écraser », formé sur quasare qui avait le mêmes sens.

Quasicare a donné casca(r) « secouer; frapper, émotter » en occitan. Le dérivé cascalha a pris le sens de « grelot » à Marseille probablement sous influence de cascavel. Dans le Périgord et le Médoc cascà a gardé le sens « écraser » comme dans le Lot et Garonne « herser ».

Le verbe cascalhar « gazouiller, caqueter, bavarder » se trouve surtout en provençal et est-languedocien. Le FEW donne certaines localisations de cascalhar sous l’étymon *quasicare d’autres sous l’étymon onomatopéique kak- « caqueter » avec la note « sous influence de quasicare, mais je pense qu’il faut les réunir tous  sous quasicare.

Le félibre Camille Reybaud (Carpentras 1885 – Paris 1866)  dans son Adieu a ma muso coumtadino   écrit:

Adiéu! me sovendrai, ma Muso, de moun jas,
De moun riéu que cascahio oû mitan dei roucas,
De ma cabreto blanquinèlo,
Doû galoubé tan dous e doû gai tambourin,
De l’orgue de la gléiso e de soun vièi refrin,
E de moun ciel clafi d’estèlo.

René Domergue étudie les rapports sociaux dans les villages du Midi. Dans son premier ouvrage, ‘Des Platanes on les entendait cascailler‘, il analyse la vie quotidienne et le changement social en mettant en exergue le point de vue des paysans.

Si vous voulez connaître les rapports entre notre cascalhar et le français casque de l’espagnol cascar, casco allez voir le TLF.
L’espagnol cascar signifie aussi « papoter, bavarder ».

La notion sémantique ou l’image exprimé par quasicare » écraser, casser, frapper » est aussi à l’origine du verbe barja < *brekan « casser, broyer » qui d’après l’étymologie  fait référence au bruit que fait la braga « instrument pour broyer le chanvre ». (Voir brega).

Une nouvelle approche pour expliquer certaines étymologies.

Jean-Philippe DALBERA Des dialectes au langage. Une archéologie du sens (Linguistique française, 13). – Paris : Champion, 2006, fournit de nombreux cas où les différends  noms (signifiants) qu’on trouve dans les dialectes occitans pour  le même sens (signifié), s’expliquent par l’ image qui est à l’origine de ces mots.

Un exemple le martinet. Certains noms du martinet « s’éclairent à partir de faucilh, qui compare l’oiseau à la lame de la faucille, pour la forme de ses ailes déployées et la vivacité tournoyante de son vol. Comparé à un instrument coupant en mouvement, le martinet devient raspalhòu, rasclòu  » coupeur, trancheur  » ou  » (petit) barbier  » (manieur de rasoir) : barbairòu, barbairon… Ces formes éclairent l’étrange barbajòu, littéralement  » barbe de Jupiter  »  qu’il faut renoncer à comprendre autrement que comme une variation arbitraire à partir d’une base évoquant le  » barbier  » (plus l’attraction gratuite de la forme barbajòu désignant la  » joubarbe « ).(Compte-rendu du livre de J.-Ph. Dalbera, par Patrick Sauzet, Zeitschrift für französische Sprache und Literatur 118.2, 2008, 173-180.).

Cascalhar  « bavarder », barjar, barjaquar   « bavarder »  viennent  tous les deux de verbes qui signifient  « faire du bruit en frappant« .  En regardant ce qui se passe ou s’est passé en dehors de nos frontières, nous constatons que non seulement l’espagnol  cascar « casser »a aussi pris le sens « bavarder » dans le langage populaire, mais que la même évolution a eu lieu dans les langues germaniques : néerlandais kletsen « bavarder » et flamand klappen « parler »,  conservé en néerlandais dans une expression 1 et le dérivé verklappen « révéler »  viennent d’étyma qui signifient « frapper ». Néerlandais  klap « coup; baffe ».

Un autre cas qui s’explique de cette façon se trouve dans le mot ruscle  « forte pluie » à Nîmes,  et « une faim de loup » ailleurs.

L’étymon braso « braise » a donné abrasa « affamé » dans les Hautes Alpes.

  1. uit de school klappen « révéler un secret »

Cascavel

Cascavel (Gard) « grelot ». L’étymon  *cascabella n’est pas attesté, mais il s’agit d’un dérivé de cascabus  « poêle,  chaudron ». Le mot vit en occitan, catalan cascavel  et espagnol cascabel  et  cascabillo. Ce dernier a donné kaskabil en basque. En galloroman le mot est limité aux domaines occitan et franco-provençal. A Nice il y a une expression amusante : avé de cascavèu en testa « être écervelé ».

Le transfert de sens de « chaudron » > « cloche, clochette » est fréquent.

Cascavéou « taureau réfractaire, qui hésite, ou refuse, de suivre la manade lors de l’acampado » en Camargue.
En néerlandais il y a un mot similaire belhamel littéralement « bélier à sonnailles » qui a suivi une évolution sémantique analogue, utilisé surtout au fig. « boutefeu ».

La révolte des Cascaveous (ou Cascavèus) désigne une révolte populaire survenue à Aix-en-Provence en 1630 sous le règne de Louis XIII, roi de France, en raison des craintes d’inflation que provoque un édit du cardinal Richelieu. (Plus dans Wikipedia)

Dans le site de World Wide Words vous trouverez l’histoire amusante de cascabel  en anglais américain modernes et en anglais britannique. Pour les premiers un cascabel est un genrie de medium hot chili, pour les seconds un élément d’un canon qui a la forme d’un grelot. Cliquez ici.


Meriam Webster : Definition of CASCABEL :

1: a projection behind the breech of a muzzle-loading cannon.

2: a small hollow perforated spherical bell enclosing a loose pellet = « grelot ».

Le cascabel, qui se trouve sur la culasse  du canon ressemble en effet à un grelot. Le deuxième sens est donc à l’origine de celui donné en premier.

 

Cassagne, chassaigne

Voir aussi rove et rore et l’article qui approfondit  les différentes dénominations des chênes en occtan : Cassanus, robur, quercus, carra.

Castagnes et marrons.

   

Agriculture et histoire

En agriculture les châtaignes  ne sont pas du tout la même chose  que les marrons.  « Il existe une différence fondamentale entre la châtaigne et le marron. Elle est facile à voir. L’enveloppe de la châtaigne, la bogue, est cloisonnée et elle contient deux ou trois fruits. Le marron, égoïste, mûrit seul dans sa bogue.1.

L’un et l’autre, la castagno comme le marron nous sont parvenus de très loin. Les  fruits du châtaigner étaient  un des premiers aliments des races primitives. Et cela a duré longtemps Dans le Grand Larousse du XIXe siècle, Pierre Larousse pouvait encore écrire

« il forme  presque à lui seul toute la nourriture des montagnards de l’Auvergne, des Cévennes , de la Corse… ». Au moyen age il y avait l’expression parer  chastaignes à quelqu’un ce qui voulait dire «  lui préparer un bon accueil », et aussi peler chastaignes à quelqu’un  pour « lui dorer la pilule ».

L’origine du mot castagno est à chercher en Asie mineure. En persan existe le mot kashtah « fruit sec, pépin » et les savants pensent que l’arbre et son nom sont introduits en Europe, notamment en Grèce à partir de l’Iran.   Virgile (70-19 avant JC) connaît déjà le mot castanea  qui  donne dans notre région castagno ou costognos  (Aveyron) et castagne en français régional.

Il y a de nombreuses « Fêtes de la Chataignes » dans notre région: En automne, le petit fruit à coque piquante est au coeur de toutes les attentions gastronomiques et au centre des fêtes traditionnelles du Languedoc-Roussillon. Fêtes, foires et autres castagnades lui font la part belle cet automne !

Avec ce mot dans votre vocabulaire,vous pouvez  voyager très loin: aux Pays Bas et en Belgique kastanje, en Allemagne Kastanie, en Scandinavie kastania, en Russie kashtanu en Pologne kasztan, en Lithuanie kasztanas et même en Bretagne kistin et le pays de Galles kastan.  Les Anglais par contre ont emprunté le mot chestnut à la langue d’oïl, où par étymologie populaire ils ont ajouté un –t  au –chestne  pour ranger la châtaigne avec les noix (nut).

Il y a en languedocien pas mal de mots dérivés de castagna: castagniè « relatif aux châtaignes ou qui aime les châtaignes »(Mistral), castagná verbe « récolter les châtaignes » mais aussi « dépenser tout »,  languedocien castagnaïro  « ramasseuse de châtaignes »  et  dans le Languedoc,  des castagneirou « petits châtaigniers » (Mistral). Spécial pour le Gard sont  castagnolo « roitelet » et castagno « sexe de la femme ». D’après le Thesoc à Maillanes (13) ce sont les testicules. A Alès kastagnados  est la « veillée à l’époque de la récolte des châtaignes », et comme on grillait des châtaignes pendant ces veillées il a pris le sens  « grillade de châtaignes »2.

En français  castagne  ou castagnole , empruntés à l’occitan, servent à désigner un poisson, le « sparus chromis »  (Linné 1758), mentionné dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. D’autres noms de petits poissons  comme castagnot ou castagneau, ou castagnole  viennent également  du Midi.

TOPONYMIE. Beaucoup de noms de lieux où poussent les châtaigniers sont dérivés de castanea.

Dans le Grand Larousse du XIXe siècle, vol. III, vous pouvez trouvez une description détaillée du travail de la chataigne : la récolte, la conservation, des recettes, etc. Il y  décrit entre autres le procédé que pour récupérer les châtaignes,  dans la claie :

«On [les]chauffe ainsi pendant dix jours environ. Vers le cinquième jour, lorsque toute la récolte est rentrée, on retourne les châtaignes pour achever de sécher la couche supérieure. on considère les châtaignes comme suffisamment sèches et prêtes à être blanchies, quand leur écorce se détache bien et qu’elles sont dures sous la dent. On les fait alors tomber sur le plancher inférieur (de la claie), dont on a enlevé le feu et les cendres; puis on les dépouille de leur écorce, soit en les plaçant dans des sacs que l’on frappe sur un billot revêtu d’une peau de mouton … , .soit au moyen des soles, qui brisent moins les châtaignes.».

Par hasard j’ai trouvé une liste des variétés de châtaignes cévenoles à l’Université des Jésuites à New York :Source: « Recueil de Mémoires et d’observations de Physique, de Météorologie, d’Agriculture et d’Histoire Naturelle » par le Baron Louis-Augustin d’HOMBRES-FIRMAS, Nismes, 1838, volume 3, page 81: Mémoire sur le châtaignier et sur sa culture dans les Cévennes (1819).

QUI LES RECONNAIT ENCORE DE NOS JOURS??? Contactez-moi

D’après Andolfi la castagne est « un sport ancestral cévenol qui se pratique à mains nues… » et castagne dans ce sens est synonyme du français marron. Châtaigne = marron est attesté en francais depuis 1635 ; châtaigne signifie d’abord un « coup sur les doigts » et ensuite un « coup de poing » (D’après Delvau A., « Dictionnaire érotique moderne » Bâle, sans date ). Marius Autran est plus sérieux quand il écrit à propos de l’expression: ça va castagner ! « c’est de l’argot français qui n’est pas spécifiquement provençal. »

Le mot marron a le même sens depuis 1835. A.Rey pense que le sens « coup de poing spécialement sur la tête », s’explique par métonymie de la tête qui reçoit le coup (un coup sur le marron) au coup lui-même . Mais le sens « tête » pour le mot marron n’est attesté que depuis 1896. Von Wartburg est d’avis que c’est la couleur que prend la tête quand elle a pris des marrons qui est déterminante. Quoi qu’il en soit, c’est du pareil au même, quand on les reçoit, ça peut faire très mal.

 

  1. Il y a quand-même un risque de confusion de 12% : « Le castanéiculteur est tenu quant à lui de classer la production de ses arbres en châtaignes, si la proportion moyenne des fruits cloisonnés est supérieure à 12%, et en marrons, si cette proportion est inférieure à 12%.»
  2. . Dans les Cévennes la « grillade » s’appelle rabanelo, voir le mot rabinar

Catigot

Catigot  est la dernière, toujours un ragoût:

« matelote de poisson; pot pourris, ragoût épais » (FEW XXI, 490b). Il s’agit toujours d’une sorte de ragoût, d’un mélange. Le début de la recette : « Dans une poêle, faire revenir, dans du beurre, les filets de poisson, coupés en morceaux et farinés… (source) .

Voir l’article  quincarlota  , une réunion de famille des  Ragoûts

Catolic

Catolic, catoulic « catholique ». Du grec katholikos > latin catholicus « universel, régulier, général ». Un fourneau catholique sert « à toutes sortes d’opérations chimiques ».

Dérivé adverbe catoulicamen, uniquement avec le sens péjoratif. Le TLF donne l’exemple vin pas catholique « vin dilué à l’eau ».

  

L’expression est toujours couramment utilisée, surtout en politique.

Cauna, caouno "creux, grotte"

Cauna,  caouno, caunha, adj. et s.f.  « creux, cavité, grotte » vient de *cavo, cavonis « creux » transformé dans le Midi  en *cava et  dérivé de cavus « creux » > cau en occitan ancien et moderne (Voir Thesoc s.v. creux).  Les formes avec un -ñ- écrit  –nh–  sont limitées au Sud-ouest (Ariège, Pyrénées-Orientales, gaunio  dans l’Aveyron).

Un visiteur qui m’avait demandé cette étymologie, m’a fournit le complément que voici:

 Chez nous, en basse Ariège nous avions (et avons toujours) le verbe caunhar, qui consistait à pêcher à la main (formellement interdit !) dans les caunhas c’est à dire dans des trous d’eau, sous les racines des arbres où le poisson se réfugie.

caunhar

Autres dérivés:

Cauni « trépassé » ;s’escaounar « s’infiltrer »;   à Barcelonnette;  s’encaounar « s’abriter »;  encaunar « cacher » à Marseille.

Le toponyme Caunas , hameau de Lunas (Hérault) est attesté depuis 794. Dans le Dictionnaire topographique de l’Hérault se trouvent d’autres dérivés comme Caunette, Caunelles.

Cau, cava « creux » du latin cavus, cava    ne semble pas très vivant d’après les données du Thesoc s.v. creux.