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Artiga "terre défrichée"

Artiga « terre défrichée »est un mot fossile,  plutôt gascon, probablement d’origine préromane1 et qui n’a survécu que dans des noms de lieux. Il est rare dans le Var, mais devient  de plus en plus fréquent en allant vers l’Ouest.

Le Pégorier mentionne Arteaga  « lieu défriché » pour le basque, artiga, artigou « parcelle de terrain défrichée sur les hauteurs »  pour la Gascogne et le Languedoc, artigue  dans le Var.

Le village d’Artigue correspond à 100% à la définition  donne:

Artigue (Hte-Garonne)

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  1. FEW XXV, 387b *artīka

Balma "grotte, cavité"

Balma, bauma « baume ». Etymologie:  Emprunt au gaulois balma (Dottin, p. 230), le mot étant attesté dans l’aire géographique où s’établirent les Celtes (domaine gallo-roman entier, Italie du Nord, Suisse) Plus dans le  TLF s.v. baume²

Thesoc :balma ALPES DE HAUTE-PROVENCE, ALPES-MARITIMES, BOUCHES-DU-RHONE, DROME, HAUTES-ALPES, VAR, VAUCLUSE.

bòrna DROME.

Le mot est également connu dans les parlers germaniques de la Suisse  barma. Voir à ce propos:  Jud, dans Zeitschrift 38(1817) 4-5 disponible grâce à Gallica.

J. Jud a aussi publié un article dans  Archiv für das Studium neueren Sprachen und Literaturen  124 (1910)92 , mais il n’est disponible que pour les Américains. Si vous avez un ami là-bas…..

Un autre article, disponible cette fois même pour les Français , publié dans la Revue Celtique 39(1870)47  par

J.Loth  intitulé  « La Gallo-roman  Balma ».

Je proteste contre ces lois abusives des droits d’auteur pour des publications qui datent de plus d’un siècle.

Boulmière-bolmeria

Boulmière « local du bain; cuves des tanneurs ».  Depuis plus d’un an mon amie   La dormeuse  me poursuit pour connaître  le sens exact et l’étymologie de boulmière.  Ci dessous un extrait de son blog:

Carte dressée en 1766, du “moulon du pont de Raillette jusqu’au ruisseau de Contirou et à la rivière de l’Hers jusqu’au grand pont sur la dite rivière”. En haut à gauche le n° 1 en bordure d’un ruisseau  (!!), 1. Jacques Rivel, marchand tanneur : maison servant d’adoubairie à tanner des cuirs7 avec un patu8 ou boulmières9, jardin et breil à Countirou

J’ai fait des recherches sans trouver la réponse.  C’est elle qui l’a trouvée en fin de compte:

La source est l’article de J.-L. Abbé, Paysage urbain et rural à Limoux, d’après une source méconnue: le terrier royal de 1316. Trouvé par la Dormeuse  dans le Bulletin de la Société Scientifique de l’Aude, CIII (2003), 91-100.

cuve de tanneur

La suite de cette trouvaille est un magnifique article sur les boulmières avec de très nombreuses images dans  la Dormeuse blogue 3.

Il y a encore beaucoup de travail à faire pour les philologues et linguistes occitanistes. Voir à ce propos  J.-P. Chambon, Développement et problèmes actuels des études occitanes.

Dans les articles du FEW  balneare, balnearia, balneator, balneolum, balneum ,  il n’y a aucun mot en rapport avec la tannerie1.

Pourtant il y a une petite phrase dans l’article balnearia  du FEW qui va dans la direction  que nous cherchons à savoir le sens « cuve ».   En occitan est attesté bagniero  « lieu où l’on se baigne; bains d’eau thermale », également dans les toponymes Bagnières. L’auteur se demande si le rétoroman2 bagnèra   « cuve pour le linge; grande cuve » viennent directement de balnearia  ou qu’il s’agit de créations à partir du verbe balneare « baigner ».

Le plus intéressant est le fait que d’après les données de l’ALF, presque partout dans le Sud-Est  « mouiller, tremper » est traduit par  le verbe banhar   du latin   balneare . Ci-dessous la carte tirée du livre  Lectures de l’ALF par Guylaine Brun-Trigaud3

L’emploi de balneare  > banhar pour  « mettre les peaux dans des cuves » par les tanneurs  a logiquement entraîné le sens de balnearia > boulmière > « cuve pour les peaux ».

Les attestations de  Limoux (Aude) de 1316 ne sont certainement pas les plus anciennes, mais nous n’avons pas mieux pour le moment.

Le nom de lieu  Bagnières  est attesté pour la première fois en 1258 :  Decimarium Beate Marie de Banheriis. (par l’abbé Sabarthès).

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  1. Il faut dire que le premier vol. du FEW date de 1922-1928 et la lettre A a été entièrement refaite à partir des années ’70 (3 volumes maintenant), mais la lettre B est restée la parent pauvre.   A part les mots d’origine germanique ou autre  13 nouvelles rédactions ont vu le jour et il y a encore une quarantaine en préparation, dont balneare. Je pense que le dérivé balnearia « bains, salle de bains » y sera inclus
  2. parlé en Suisse
  3. cf. Sources et liens s.v. ALF

Droulho ‘chêne’

Droulhio,  droui, drui (Mistral)  vient de *derullia  « chênaie » dérivé d’un gaulois *derua « chêne »1. Pierre-Henri Billy,  Toponymie française et dialectologie gauloise.  dans Pierre-Yves Lambert, Georges-Jean Pinault, Gaulois et Celtique continental.  Paris, 2007. résume et développe  très bien l’article du FEW :

droulho "chêne"Pour ne pas vous laisser sur votre faim, voici les données du FEW2.

droulhe "chêne" en gallo-romanPlus sur les toponymes dans le livre de P.Skok (cf. mon article Toponymes en acum)

SkokDrouiSkokDroui2

Quelques données topographiques du Pégorier.

toponyme drouil

Dans le Périgord est attesté un droulho  « alisier » qui a été repris par le Larousse de 1872 comme français drouiller. Je me  demande si le type  drouilho « chêne » n’a pas disparu par confusion avec le type  drulho « aliser ».

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  1. FEW III,50a
  2. Publié en 1934.   Le type droulho n’a été relevé ni par l’ALF ni par les Atlas linguistiques occitans Thesoc

Drulier, drolhier "alisier"

 Drulier, drolhier « alisier ». Étymologie :  drulier ‘est un  dérivé de druliodruelha « alise ».  Le drulier  est l’Alisier torminal, ou Sorbier torminal (Sorbus torminalis) un arbre appartenant au genre des sorbiers de la famille des rosiers. (Wikipedia).  Les baies de la grosseur d’une cerise sont comestibles (Sauvages S1).

Etymologie : drullho, drélho (en Lozère)  est d’après le FEW un dérivé du gaulois   *derco « baie » ou du celtique *dergos  « rouge ».

drulhier   drulho

J’ai reçu d’une fidèle visiteuse  le texte d’un chant occitan Sem Montanhols 1:

Sem montanhols n’avem l’independença
L’avem, l’aviem e mai la gardarem
Si a pas de rei en França
N’autres i renharem!

Nòstre sol mestre es aquel que fa naisser
Lo blat l’autumn e l’erba lo printemps
Lo pregam que nos laisse
Lo gost del pan longtemps!

Fasem justicia a mòda montanhòla
Sens derrengar los jutges inustiers
Lo còde de Laguiòla
Es lo bòsc del drulher

Tu vinhairon, sias fier de ta vendemia
Mas ieu te planhi, paure costovin
Tu coltivas ta vinha
N’autres bevem lo vin

Dels vielhs Gales n’avem lo crit de guerra
Possam de crits que fan tot ressontir
En passant sus la terra
Aimam de nos far ausir.

Le  code de Laguiola, lo bòsc del drulher   m’intriguait.  Un promoteur d’une maison de retraite en Lozère, me fournit l’explication suivante:

L’alisier…. que l’on trouve en nombre dans les forêts du nord Lozère et dont on dit que les fruits étaient la nourriture des Dieux. Dans la tradition celte, l’alisier était un talisman contre la foudre, et les légendes racontent que les fouets dont le manche était en sorbier permettaient de dompter les animaux ensorcelés. Pour les germains encore, les agneaux devaient passer dans un cercle en sorbier dès leur naissance et un bâton de même essence était planté au milieu des pâturages pour protéger les troupeaux.

Cela reste à vérifier.

D’après Pégorier on trouve des toponymes   Drulé, Drulhier  uniquement dans le domaine occitan:

Avec Google »maps » j’ai trouvé  Drulhes,  Labrousse (Cantal),  par exemple.

Pour l’étymologie  dalise suivez ce lien TLF.

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  1. de nombreuses versions chantées sur YouTube Joanda