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Panis

Panis s.m.« setaria italica »  est une sorte de millet, qui n’a rien de commun avec le « pois chiche » (voir panisse).

        
panis
setaria italica                                                            panis-setaire

Ce panis-ci vient du latin panicium « sorte de millet », une forme secondaire de panicum. La première attestation en occitan date de 1100. Le -s final est toujours présent dans les formes occitanes. En occitan a été formé un dérivé féminin panissa toujours avec le sens « sorte de millet », et panisset « sétaire verte ».

Panicium est aussi à l’origine des mots du Nord de l’Italie, comme piémontais panis et de la péninsule ibérique, catalan panis, espagnol panizo, portugais paínzo.   En provençal a été formé un dérivé féminin panisso « sorte de millet » , panissa à Nice, panisso dans la Vaucluse, (Mistral), à Marseille (Avril), et à Aix (Pellas), toujours avec le sens »millet ». Piemontais paniss  « millet ». La forme féminine panissa se trouve aussi ailleurs, par exemple à Vic(h) en Catalogne où elle a pris le sens de « maïs ».

Latin panicum est à l’origine du français panis, panic (voir TLF) ou dans des parlers locaux panil, pané « sorte de millet », et a été emprunté par des langues germaniques: anglais pan(n)ick, néerlandais panik.

pounical

pounical  « chardon bleu » voir panicaut

Panicaut

Panicaut est le nom de l' »eryngium campestre » qui s’appelle aussi chardon bleu, chardon Roland ou roulant en français. Le nom panicaut a été emprunté à l’occitan (par Rabelais?) où il est courant des Alpes-Maritimes jusqu’en Vendée (ancien territoire oc). En latin médiéval il s’appelle pane cardus, cardus panis. Les feuilles tendres du panicaut au printemps font un excellente salade. Mais en été les feuilles deviennent dures et piquantes et provoquent une sensation de brûlure quand on les touche. C’est cette sensation de brûlure qui explique le changement de panecardus en panecaldus « chaud ».

Une expression languedocienne dans le manuscrit de Rulman (1627) : Vay te freta au panicaut,  dont je ne  connais pas le sens exact.

Dans l’Aveyron le panical devient aussi le pounical. Dans ce dernier l’élément panis est remplacé par pungere « piquer ». Les formes de la Vendée et de la Vienne pencho, pouencho,  montrent qu’elles sont indigènes. Dans le Gard et l’Hérault le panicaut est aussi appelé pan blanc d’ase. La zone géolinguistique panis+caldus comprend aussi la Catalogne.  Les composés  pan de …. désigne une grande quantité de plantes et de champignons.

 

Pano, panous

Pana « taches de rousseur » (Alibert), panos « idem » (Sauvages), adj. »qui a des taches de rousseur » (Alibert), pano « nuage léger qui flotte dans les airs », panous « tacheté de nuages ». La première attestation pour ce mot typiquement languedocien vient du dictionnaire francais/anglais de Cotgrave 1611 avec la note « languedocien ».

L’abbé de Sauvages (1756) donne  un remède contre les panas : « la sève qui dégoutte de la vigne au temps qu’on la taille est, dit-on, un bon cosmétique pour faire passer les rousseurs ». Si vous l’essayez, renseignez-moi sur les résultats!

Le FEW rattache ce groupe de mots à l’étymon pannus « morceau de tissu ».

Mais dans mon dictionnaire latin  (Nouveau dictionnaire latin-français par Benoist, Eugène – Goelzer, Henri) et dans le Gafiot je trouve que le mot  pānus  avec  un ā  long et un seul -n- signifie « fil de trame enroulé sur le dévidoir; épi à panicules » et « tumeur »   et le diminutif panicula « panicule »  également  » sorte de tumeur« . Le fameux Nomenclator octilinguis ( ‘dictionnaire de huit langues’) de Junius Hadrianus (1511-1575) traduit : « Pānus ( attesté chez Pline) par Vne enfleure « une enflure » et mammosus panus par « téton ». et là nous ne sommes pas loin des « taches de rousseur » languedociennes.

Ma conclusion est que  tout le groupe pano  placé dans l’article pannus « morceau de tissu »,  FEW  VII, 557 a,  doit être placé dans un nouvel article pānus  « tumeur, enflure ».

FEW  VII, 557 a

Le mail d’une lectrice de l’Aveyron renforce cette hypothèse. Elle aime faire la cuisine et m’écrit :

« j’ai découvert les  panous [panouss] ce sont en fait les fleurs qui poussent au printemps sur les choux fourragers et les choux de Bruxelles et que l’on mange (ça ressemble à des asperges) ». Le dérivé panous a donc conservé le sens « épi de panicules » du mot latin pānus. Elle a eu la gentillesse de m’envoyer une photo:

panous de choux
Les panous de l’Aveyron

Une panicule est une inflorescence en grappe composée.


panicules rouges et blanches

Dans le domaine franco-provençal existe un dérivé pana  « donner une giffle à  » et surtout le substantif  panà « giffle » (FEW VII, 560b).  Etant donné que le résultat d’une giffle est souvent une « enflure » cf. bonha, je me demande si ce mot ne doit pas être rangé également dans le même nouvel article pānus « enflure ».

Ortiga

Ortiga « ortie ». L’étymologie est la même que celle du mot français ortie : latin urtīca.

A l’est du Rhône, il y a de nombreux villages (cf.Thesoc) où l’accent s’est retiré vers la première syllabe, par exemple en Champsaur ürtyə qui suppose un étymon ūrtĭca avec l’accent sur le  ū.

L’explication peut être qu’on a formé un verbe *urticare « fouetter, piquer avec des orties » et que par la suite le nom de la plante y a été adapté.

J’ai pris l’occasion d’écrire cet article quand j’ai trouvé dans le livre de Claudette Germi,  Mots de Champsaur Hautes Alpes,  l’expression imagée être ürtiə  « ne pas tenir en place » (comme fouetté par les orties).