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Mistral

Mistral « vent froid du nord ».  Le sens précis dépend de l’endroit où l’utilisateur se trouve. De là les petites différences qu’on trouve dans les dictionnaires : « nord, nord-ouest, nord-est ».

Etymologie :  latin magistralis « du maître ». Ancien occitan maestral « du nord-est » attesté depuis le XIVe siècle. Catalan mestral. Voir CNRTL s.v. mistral. Français mistral est emprunté à l’occitan au XVIe siècle.

Nom de famille

Mocar

Mocar signifie  « moucher; frapper sur le nez, pincer un bourgeon ou un lumignon ». L’étymologie est bien sûr la même que celle du verbe français moucher , latin tardif muccare  « moucher ».  Voir à ce propos le TLF.

En occitan et en français régonal mocar, moucher, moquer  signifie  aussi « boire, chopiner ».

Plus loin dans cet article, Mistral donne trois exemples : Mouca ‘n veire de vin « sabler un verre de vin » (= boire d’un trait)  et moucho pas mau « il boit bien ». Se mouca v.r. « chopiner,boire ». Comment expliquer cette évolution sémantique? Alibert suit Mistral, mais ni l’un ni l’autre s’est posé la question.

On pourrait  s’imaginer l’évolution sémantique suivante : « (se)moucher » (pour se moucher on lève le coude!) > « lever le coude » > « boire » ; ou bien « pincer un lumignon » > « émousser » > « émousser la soif » > « chopiner, boire ».

Un article de Jacques Bruyère  dans le Midi Libre du dimanche 22 février09, intitulé « Moque Cabanel, quelle histoire » m’a mis une puce à l’oreille.  Jacques Bruyère a relevé qu’il y a un mot moque s.f. avec le sens « chope » en français régional. Le TLF dit : « Région. (littoral de la Manche et de l’Atlantique). Petit pot de terre en forme de tasse avec anse, servant à boire, ou gobelet en fer-blanc servant à mesurer des denrées. »  J’ai vérifié dans le FEW. Le mot moque , mouco se trouve en effet en galloroman dans une bande étroite le long de la côte atlantique, qui va de Boulogne-sur-Mer (Nord) jusqu’à Teste (Gironde).

En effet moque est attesté à Boulogne-sur-Mer, mock « pot pour la boisson à bord du bateau », en normand moque « tasse sans anse, servant à boire » dans le Dictionnaire du patois normand de E.et A. Duméril; Caen, 1849 ! dans le Calvados « godet pour le cidre », dans le Bocage, dans l’île de Guernesey mogue « vase à boire », à St-Malo, dans l’Ile-et-Vilaine moque « tasse, mesure pour les boissons (1/2 l) », dans le Poitou, à La Rochelle en 1780, dans le Saintonge, dans la Charente Maritime, et enfin à Teste dans la Gironde   mouco  » gobelet en fer blanc des matelots ». Cette répartition géographique montre clairement qu’il s’agit d’un mot de marins.  (FEW)

Moque a traversé l’Atlantique pour arriver au Canada (TLF) et en Louisiana (J.Bruyère).

Je ne suis pas Néerlandais pour rien, et il n’y a aucune raison pour s’arrêter dans le département du Nord!  En passant la frontière, en Flandres et aux Pays Bas mok est le mot courant pour une grosse  de tasse avec anse, ainsi qu’en bas-allemand mukke « chope », Suédois. mugg « mug,, » norvégien et danois  mugge « tasse pour boisson chaude », anglais mug. Nous avons donc affaire à un mot européen! Il y pas de collectionneurs de mugs. 

 un mok avec ta photobas-allemand: mukke

Le seul problème qui nous reste à résoudre est de savoir comment moca, mouca, mouco est arrivé à Palavas. Par la mer ou par la terre?  A la suite de l’article du 22 février, Jacques Bruyère a eu beaucoup de réactions qu’il a publiées dans le Midi Libre du 15 mars. (La consultation est hélas payante). L’expression Moque Cabanel est bien vivante en Languedoc, mais les sens donnés par Mistral également. Il y a certainement eu des contacts entre les marins de l’Atlantique et ceux de la Méditerranée.
Je ne crois pas que dans Moque Cabanel!, moque soit un verbe . A Laval dans la Mayenne,on appelle une « tasse de cidre » mok-mok. Je les vois bien lever le coude et dire mok-mok, comme on dit chin chin.

Etymologie :  moque, mouca « chope » vient d’un germanique mokke « chope ». Si moque est un verbe dans l’expression donnée, il s’agit d’un verbe  moquer créé à partir du substantif, comme chopiner de chope.

Le nouveau dictionnaire étymologique du néerlandais (EWN), suit le FEW en supposant un lien entre mok « sorte de tasse » et l’ancien néerlandais mokka* « motte (de terre), morceau ». On aurait comparé la chope à une motte à cause de sa forme grossière. Les représentants de cet étymon germanique *mokka sont absents de l’occitan, mais assez fréquents dans le Nord. Voir à propos de *mokka le TLF s.v. moche et moque et le DMF s.v. l’étymon ou le mot moquet « motte ».

Mourre

Mourre « colline, hauteur, mamelon ». Dans une grande partie du domaine où nous trouvons le type * murr- avec le sens « museau », existe également le sens « petite hauteur de terrain, mamelon ».
        
une morrosca italienne et un mourre cévenol (Photo d’Alain Avesque).

Comme toujours, le sens du mot s’adapte au terrain : à St.-Amé dans les Vosges il désigne un « tas de pierres dans un champ », à Barcelonnette une « hauteur arrondie », à St.-André de Valborgne un « mamelon », mais dans les Pyrénées Atlantiques ce n’est plus qu’un « tas ». A Alava en pays basque une morrosca est « une jeune fille avec une belle poitrine ».

Le géologue Horace de  Saussure  a introduit en français un autre dérivé de *murr-  la  moraine:

  « les paysans de Chamouni nomment ces monceaux de débris rocheux entraînés par le mouvement de glissement d’un glacier, la moraine du glacier). »   (SAUSSURE, Voyage dans les Alpes, éd. Neufchatel, Genève,1779, t.1, p.455)

et de là anglais moraine, allemand Moräne. Il semble que le suffixe ena est également d’origine préromane.etc.

moraines moraine
Horace -Benedict de Saussure: le premier géologue alpin (1749-1799)

Mor, mourre

Mor, morre 1) « museau, groin »  fait partie d’une grande famille de mots qui vit dans les langues romanes autour de la Méditerranée, par exemple en catalan morro « museau; le devant d’une voiture, d’un avion etc. », fer morros « faire la moue », faire de mourres en occitan,  inflar els morros a algu = « casser la gueule à quelqu’un ». D’après Raymond Covès il est très vivant en français régional.

La répartition géographique de cette famille de mots jusqu’en sarde suggère une origine préromane *murr- d’après le FEW.
A partir du sens « museau » on arrive facilement à « nez, visage, figure » que nous retrouvons dans les dérivés comme ancien occitan morada « coup sur le museau ». La conséquence d’une morada  est qu’on  devient morut « qui a de grosses lèvres » (aoc.). Quelqu’un qui fait de mourres  est un  mouru « bouru, incivil, maussade, d’une humeur sombre et farouche » comme l’écrit l’abbé de Sauvages. En parlant d’un couteau ou d’une aiguille mouru est « émoussé ». Lou bé dë las âoucos ës mouru « le bec des oiseaux est mousse » dit-il.
A Alès le « rouget grondin » est appelé mourudo , à cause du grondement qu’il fait entendre quand il est pris ».

mourudo

Et d’après la forme du museau  nous avons dans le Gard le  moure pounchu « musaraigne », mais à Puisserguier le moure pounchu‘ est un  » rychnite de la vigne ». Pour les nombreux dérivés voir Alibert, qui donne entre autres le composé morre ponchut « sparaillon ».

    

En provençal et est languedocien le moure-pourcin est une plante, le « taraxacum officinalis » appelé ainsi parce que le soir quand la fleur s’est fermée elle ressemble à un groin de porc. L’image contenue dans cette dénomination  n’étant plus comprise, le mot a subi les pires traitements phonétiques dans les différents patois, au point d’ aboutir à repounchou à St Afrique par exemple.

Les habitants d’Aigues-Mortes sont appelés les morres pelats « museaux pelés » par les Pérolais.  (Achard, p.412)

Voir aussi l’article mourre « colline ».

Dans le Nord de la France et même en moyen néerlandais (morre « museau »), on trouve quelques attestations du type  *murr-. Le FEW suppose qu’il s’agit  d’emprunts à l’occitan. Il faut admettre qu’en galloroman *murr- est pratiquement limité à l’occitan et au franco-provençal., mais pas ses dérivés et les composés.  Je ne suis pas convaincu qu’il s’agit d’emprunts, parce qu’on trouve un mot comme mornifle composé de la même racine *murr- + nifler dans les patois du nord et pas dans le Midi. Un lien avec le germanique murren  » grommeler, bouder », néerlandais morren ou au moins une influence sémantique ne me semble pas exclu non plus . En catalan le morro «  groin, le museau, la gueule d’ une personne qui fait la gueule » ; et fer morros « bouder » c’est plus que faire la moue, 

Mousti, masti

Mousti, masti « gros chien qu’on emploie à la garde des maisons, du bétail ». Ci dessous un extrait de Pierre Borel Trésor des antiquités Gauloises et Françaises. Paris 1655, qui traduit moustis par « dogues ».

Le latin avait créé le mot mansuetus à partir de manus + suetus ce qui voulait dire « habitué à la main » , c’est-à-dire « apprivoisé, domestiqué ». Ce mot est conservé en béarnais maset, masede adj. « dompté, calmé; docile ». En latin tardif, au début du Moyen Âge a dû être formé l’adjectif *mansuetinus attesté seulement dans la forme mastinus au IXe siècle, avec le sens « serveur ». Le mot était le plus souvent utilisé en combinaison avec canem : canem mastinum « chien de garde d’une ferme » ce qui est devenu mastinum tout court. Attesté avec ce sens en ancien français depuis 1155, mastin, mâtin et en ancien occitan masti, mastin,  en occitan moderne masti, mousti etc. le plus souvent avec chute du –n final. Au figuré masti(n) prend le sens de ‘luron, rusé ». Sens premier du français mâtin.

La mastino est la « femelle » et le mastinas ou maustinas « un très gros chien », et le verbe mastinar « quereller, grogner » (1646).


2 mastis des Pyrénées

Masti(n) a été emprunté par l’italien mastino, le catalan masti, l’espagnol mastin, le portugais mastim, le breton mastin (Vannes) et l’anglais mastiff « dogue », german mastiff « berger allemand ». Ce dernier a été re-emprunté plus tard par le français.Voir le TLF.