cat-right

Douts, dotz "conduit"

Douts s.f. « source », est devenu avec agglutination de l’article adotz en ancien occitan, adous à Barcelonnette, « petite source à fleur de terre » dans l’Aveyron ; dans l’Ariège a été créé le verbe doutsà « puiser ».

L’étymologie est le latin dux, ducem « conducteur, guide; prince (vers la fin de l’empire romain) ». En ancien français ducem > doiz, doet a pris le sens « canal, conduit » (Godefroy), dont duciculum (ci-dessus dousil ) est dérivé. En occitan et dans l’Est de la Galloromania s’est développé le sens « source ».

Voir aussi l’article  duc, du  1. duc  2. rapace nocturne.

Drac

Drac « lutin, farfadet, follet diable » du latin draco, draconem.« gros serpent; la constellation Le Dragon; vieille souche de vigne et d’autres sens au fig. »

Ancien occitan drac « dragon »: (Raynouard), et dragon. Draco est utilisé en latin chrétien pour désigner le dragon de l’Apocalypse (12, 3) et le diable.(TLF ). Voici le texte en question:

« 3 Un autre signe parut encore dans le ciel; et voici, c’était un grand dragon rouge, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes sept diadèmes. 4 Sa queue entraînait le tiers des étoiles du ciel, et les jetait sur la terre. Le dragon se tint devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer son enfant, lorsqu’elle aurait enfanté. »

Au figuré drac, dragon, prend des sens plus ou moins méchants, par exemple dans l’Aveyron dragoun « bourdon », à Pézenas le drac est un être diabolique qui suivant la tradition, sortait d’un puits, appelait à lui les enfants vicieux et désobédients pour les fair monter sur son dos infiniment long et se précipitait avec eux dans son puits!   Ailleurs un « esprit follet » , etc. Languedocien dragas « femme d’un caractère violent ».

Un visiteur de Pézenas m’écrit : La gourgue ( les eaux de l’Etang, entre Pézénas et Tourbes vont se jeter dans la « gourgue », sous le château de Conas, hameau proche du cours de l’Hérault) était le repaire d’un « Drac« ; un de ces chevaux fantastiques dont le dos s’allonge, il invite les enfants à l’enfourcher, après quoi il va les noyer. Un autre habitant de la gourgue était « lo Serrà ». Dans les bestiaires médiévaux, « la Serre » (elle change de sexe en occitan) est un animal tout aussi fantastique qui se précipite sur les vaisseaux pour les faire couler. Il s’agissait d’inspirer aux enfants une frousse bleue par ces récits, pour les empêcher de s’approcher des endroits dangereux.

   
Drac
à Beaucaire              Tarasque à Tarascon    Drakkar des Vikings

Drac et dragon est un des rares cas où la forme du nominatif et celle de l’accusatif latin sont conservées. D’autres exemples français sont : pute, putain; gars, garçon. En ancien anglais on trouve drake et en anglais moderne dragon emprunté au français. Néerlandais draak, Allemand Drache, Suédois drake , au pluriel drakkar « bateau de Vikings ».

Draconien par contre est dérivé du grec Dracon, législateur d’Athènes (fin 8e s. av. J.-C.), célèbre pour sa sévérité

Dralha

Dralha « sentier pour les troupeaux « , fr.rég.draille mot commun à l’occitan et le sud du franco-provençal. Voici la description d’une draille trouvée dans le site http://membres.lycos.fr/gtmc/etape06.htm:

« Deux grandes voies de transhumance traversent le Mont-Lozère: la plus importante – qui s’introduit au cœur même de la montagne – est la grande draille du Languedoc au Gévaudan. Elle amenait les troupeaux de la région provençale et gardoise ainsi que les petits troupeaux des contreforts cévenols jusqu’au Col de Finiels puis redescendait vers la vallée du Lot avant de gravir la montagne du Goulet et de déboucher enfin sur les plateaux du Gévaudan. Le tracé des drailles n’est plus guère entretenu mais il est encore facile de repérer leur empreinte rectiligne: celles-ci vont de crêtes en cols en évitant les fonds de vallée. Resserrées sur les terrains escarpés, elles peuvent atteindre jusqu’à 80 à 100 mètres de large dans les espaces dégagés et, sur leurs bords, figurent des murettes de pierres sèches pour canaliser les troupeaux. »

      
draille de Valleraugue vers le Mont Aigoual, 4000 marches

 
Draille entre l’Aubaret et St.Maurice                               Autre draille        

Von Wartburg le rattache au verbe *tragulare, un dérive de trahere « tirer » ou de tragula « traineau ».*Tragulare devait avoir un sens spécifique pour les chasseurs « chercher la bête avec les chiens sans avoir aucune piste ». L’évolution sémantique s’explique alors à partir d’un sens « chemin ou piste fait par les traineaux » et ensuite « piste » tout court. En ancien occitan il y a en effet le mot tralh « piste; glissoire pour lancer le bois du haut de la montagne » et en aveyronnais moderne estroillá « suivre à la trace ». En gascon la drailha est en effet appelée la tralha, d’après le Thesoc « piste pour troupeaux ».

Mais le dr- au lieu de tr- n’est pas une évolution phonétique normale. Elle ne peut s’expliquer que par l’influence d’un autre mot avec un sens plus ou moins proche, comme languedocien dressieiro « sentier » qui est souvent un raccourci, un dérivé du latin directus. En effet, les « drailles » que je connais dans les Cévennes sont des raccourcis comparés à la route normale pour matériel roulant. Il y a une draille qui va de Bertézène au Col du Pas.

J’aimerais attirer l’attention sur le fait que le sens du mot draillo s’adapte à la configuration du terrain (voir les images): « trace dans la neige, sentier pour les troupeaux » en montagne mais « chemin » à Montpellier, « ravine » à St.André de Valborgne, « couloir pour descendre le bois », mais aussi  « trace de quelqu’un dans une récolte » en Limagne.

Gard drayaou « petit sentier dans les champs »; Montpellier dralhason « itinéraire ». Composé: languedocien s’adraya  » s’acheminer; se mettre en train de faire quelque ouvrage » Borel 1655, Alès idem; v.n. « frayer un chemin » 13/2,174a ;
.Panoccitan : endralhar « mettre sur la voie » , adralhar v. tr. 1. viabiliser; 2. acheminer; 3. impulser; v.r. » s’acheminer ». etc.

Voir aussi l’article trallar « troller »!

 

 

L’hôtel La Draille d’Alès,  ce n’est pas la même chose.


 

Drolle, drolla

Drolle, -a « garçon, fille ». Une discussion qui date de 2007 sur le Forum Babel me fait revenir sur l’histoire de ce mot. D’après les dictionnaires il s’agit d’un mot d’origine néerlandaise drol qui signifie en néerlandais moderne « crotte; enfant potelé ». La première attestation en néerlandais date de 1477 drol(le) avec le sens « lutin, satyre » et en 1599 chez Kiliaan, le fondateur de la lexicologie néerlandaise, drol est « lutin, petit bonhomme ». Le sens affctueux pour « petit enfant » date du 19e siècle! (EWN qui ajoute: si le mot drol « lutin » n’est pas un emprunt à l’ancien norvégien troll « monstre », le sens d’origine est « une personne petite et grosse « .)

Les premières attestations en français datent du 15e siècle drolle, drole, draule s.m. »plaisant coquin » , au 16e et 17e s. Ce sens devient péjoratif  « personne rusée , qu’on méprise; mauvais sujet ». Au 19e s. drôle devient aussi adjectif avec le sens « qui a quelque chose de singulier et de plaisant ». Dans les dialectes l’adjectif garde le sens « drôle, capricieux, amusant; gentil, joli » . Il est attesté dans tous les dialectes, du wallon jusqu’au béarnais. Parfois le substantif devient indépendant, comme à Vissoye (Valais, Suisse) drola « femme », et dans le Périgord drolo « drôlesse ». Dans l’Isère drol désigne le « bourdon ou le frelon » , mais la raison de ce transfert sémantique ne m’est pas clair.

Les dérivés comme drôlerie, drôlichon, drôlet vivent surtout dans la langue officielle.

La première attestation de drôle « enfant » date de 1771 et vient du Midi dans la forme drollet dans le » Catholicon, ou Dictionnaire universel de la langue françoise/ Catholicon oder französisch-deutsches Universalwörterbuch der französischen Sprache » de Johann Josef Schmidlin (qui n’est pas encore numérisé, presque 4000 p.pour le premier vol. ). Les sens « enfant » > « jeune homme, fils » > « domestique, aide-berger » etc. vivent dans les dialectes au sud de la Loire, en Bourgogne et en franco-provençal’.

L’évolution sémantique  » amusant, rigolo » > « enfant » a dû se produire en occitan. On n’a qu’à écouter des mamans parler de leur bébé pour comprendre que drôle ou coquin peut passer du sens  » mon plaisant coquin » à « mon enfant ».

Je pense que cette évolution sémantique s’est produite indépendamment dans les deux langues.

              
                                       petit coquin.                      Ce chat néerl. s’appelle drolletje (diminutif de drol).

Droulho ‘chêne’

Droulhio,  droui, drui (Mistral)  vient de *derullia  « chênaie » dérivé d’un gaulois *derua « chêne »1. Pierre-Henri Billy,  Toponymie française et dialectologie gauloise.  dans Pierre-Yves Lambert, Georges-Jean Pinault, Gaulois et Celtique continental.  Paris, 2007. résume et développe  très bien l’article du FEW :

droulho "chêne"Pour ne pas vous laisser sur votre faim, voici les données du FEW2.

droulhe "chêne" en gallo-romanPlus sur les toponymes dans le livre de P.Skok (cf. mon article Toponymes en acum)

SkokDrouiSkokDroui2

Quelques données topographiques du Pégorier.

toponyme drouil

Dans le Périgord est attesté un droulho  « alisier » qui a été repris par le Larousse de 1872 comme français drouiller. Je me  demande si le type  drouilho « chêne » n’a pas disparu par confusion avec le type  drulho « aliser ».

_________________________________________________________

  1. FEW III,50a
  2. Publié en 1934.   Le type droulho n’a été relevé ni par l’ALF ni par les Atlas linguistiques occitans Thesoc

Drouya "bardane"

Drouya « bardane, herbe aux teigneux, oreille de géant ».  Rolland FloreVII, 131 a relevé une attestation occitane:

(E.Edmont est l’enquêteur de l’Atlas linguistique de la France ALF).

Pour des images de la bardane voir l’article lampourde.

Etymologie : le FEW propose avec beaucoup d’hésitation:  gaulois dravoca   « ray-grass; ivraie »,  qu’on retrouve en  breton draok. Dravoca  est attesté  dans un Glossaire latin du Xe siècle1.  Il est peut-être à l’origine de  dravière (TLF) et dragée « mélange de diverses graines »(TLF). Il n’y a que quelques rares attestations  en  occitan, dans les Alpes-Maritimes drouya,  et la Drôme draouvyo (ALF112) , d’autres en franco-provençal, Rolland Flore VII, 137..

Voir à propos de l’étymon dravoca   probablement d’origine celtique, l’article  de Joachim Grezega,  Romanica Gallica Cisalpina. Studien zu den oberitalienische-rätoromanische Keltizismen.  Zeitschrift Beiheft Band 311. Tübingen, 2001, p.162 dravoca < drabuka gall.?  qui n’ajoute rien à l’article du FEW;   dans le Glossaire des Patois de la Suisse Romande il y a l’article dravase.

___________________________________

  1. dravière se rattache prob. au b. lat. dravoca (xes. CGL t. 3, 592, 30), mot gaulois Pokorny, p. 209

Drulier, drolhier "alisier"

 Drulier, drolhier « alisier ». Étymologie :  drulier ‘est un  dérivé de druliodruelha « alise ».  Le drulier  est l’Alisier torminal, ou Sorbier torminal (Sorbus torminalis) un arbre appartenant au genre des sorbiers de la famille des rosiers. (Wikipedia).  Les baies de la grosseur d’une cerise sont comestibles (Sauvages S1).

Etymologie : drullho, drélho (en Lozère)  est d’après le FEW un dérivé du gaulois   *derco « baie » ou du celtique *dergos  « rouge ».

drulhier   drulho

J’ai reçu d’une fidèle visiteuse  le texte d’un chant occitan Sem Montanhols 1:

Sem montanhols n’avem l’independença
L’avem, l’aviem e mai la gardarem
Si a pas de rei en França
N’autres i renharem!

Nòstre sol mestre es aquel que fa naisser
Lo blat l’autumn e l’erba lo printemps
Lo pregam que nos laisse
Lo gost del pan longtemps!

Fasem justicia a mòda montanhòla
Sens derrengar los jutges inustiers
Lo còde de Laguiòla
Es lo bòsc del drulher

Tu vinhairon, sias fier de ta vendemia
Mas ieu te planhi, paure costovin
Tu coltivas ta vinha
N’autres bevem lo vin

Dels vielhs Gales n’avem lo crit de guerra
Possam de crits que fan tot ressontir
En passant sus la terra
Aimam de nos far ausir.

Le  code de Laguiola, lo bòsc del drulher   m’intriguait.  Un promoteur d’une maison de retraite en Lozère, me fournit l’explication suivante:

L’alisier…. que l’on trouve en nombre dans les forêts du nord Lozère et dont on dit que les fruits étaient la nourriture des Dieux. Dans la tradition celte, l’alisier était un talisman contre la foudre, et les légendes racontent que les fouets dont le manche était en sorbier permettaient de dompter les animaux ensorcelés. Pour les germains encore, les agneaux devaient passer dans un cercle en sorbier dès leur naissance et un bâton de même essence était planté au milieu des pâturages pour protéger les troupeaux.

Cela reste à vérifier.

D’après Pégorier on trouve des toponymes   Drulé, Drulhier  uniquement dans le domaine occitan:

Avec Google »maps » j’ai trouvé  Drulhes,  Labrousse (Cantal),  par exemple.

Pour l’étymologie  dalise suivez ce lien TLF.

______________________________________

  1. de nombreuses versions chantées sur YouTube Joanda

Duc, dugou

Duc, du « duc »; ducat « duché ». Quand les Francs ont envahi la Gaule et établi l’ordre, ils ont repris l’organisation de l’administration romaine et les noms des différentes fonctions. L’étymon est le latin dux, ducem « chef ».   Les ducs exercaient, au nom du souverain, des pouvoirs de nature militaire et judiciaire sur un ensemble de comtés. (voir Wikipedia). C’est le sens le plus ancien du mot.

La première attestation de duc pour désigner le « Rapace nocturne de la famille des Strigidés, aux yeux gros, ronds, tournés vers l’avant et entourés de disques de petites plumes effilées qui se dressent en aigrettes de chaque côté de la tête (ce qui les distingue des chouettes*) (TLF),date de 1165. L’explication de cette évolution sémantique serait le fait que le duc est souvent entouré d’un nuage d’autres oiseaux quand il apparaît en plein jour. Une autre explication est donnée dans R.Richter, p.114. D’après lui Aristote raconte qu’un duc accompagnait des cailles pendant leur voyage vers le Sud en automne. L’abbé de Sauvages pense que l’origine du nom du(c) « hibou » est une  onomatopée, mais les étymologistes n’y croient pas, sans pouvoir donner une explication 100% satisfaisante de cette évolution sémantique. Ecoutez le cri du grand duc et vous serez d’accord avec moi que cela ressemble plutôt à « hibouou » qu’à « duuuuc » . Peut-être quand on pense à  la prononciation des Romains « douououc ».

Le Thesoc donne la forme dugou pour des parlers des Alpes-Maritimes et la Lozère en les classifiant comme le type dugol (??) et comme étymon duculu* ou ducu* (??). Je pense que la terminaison en –ou est une transformation due à l’influence du français hibou, ou des parlers du nord de l’Italie : Gênes dugou, Valsesia dugu. Pour d’autres noms du grand duc voir Rolland, Faune 2, p.50 ss. Vous trouverez des toponymes du type Canta-duc en cliquant ici. Il s’agit d’un article cantare dans la toponymie galloromane; cf canta-perdris.

En occitan duc, dugon, du(g)a etc. a pris au figuré un sens péjoratif; « niais, imbécile ». Duganel, duganeou « petit duc; nigaud, innocent ». Je pense que cette évolution s’est produite à partir du verbe duca « regarder sans rien dire; bayer aux corneilles » ( Mistral et Sauvages). 

Nouveau. Cette interprétation est probablement erronée. Il s’agit peut-être d’une évolution sémantique de deganel, deganeu, duganau variante de uganau « huguenot »,  ou d’une fusion de ces deux mots.  On n’a pas d’attestations de deganel « imbécile »  dans les textes anciens.  Voir cet article.

………………
………………grand duc ………………………………………………Grand duc Henri (Luxembourg)

Voir aussi l’article  douts

Ebria, ebria

Ebri, ebria « ivre » du latin ebrius « ivre ». De nombreuse formes pour la voyelle initiale depuis l’ancien occitan: ibre, iure, ieure. Voir ebriago.

Le TLF en suivant le FEW remarque que : « Les parlers gallo-romans préfèrent, comme le fr. pop. des mots plus expressifs.. » Un coup d’oeil sur l’Atlas linguistique de l’occitan montre que cela vaut aussi pour l’occitan : acotrat, bandat, bombat, briat, choc, conflat, embriac, empegat, fin, fiolat, gris, ibronha, pete, pintat, plen, rede, sadol, tibat, tordos, torsut et je suis sûr que la liste est incomplète.

La preuve : un visiteur qui me signale que le chanteur languedocien Joanda dans la Gazette connaît le mot molan et qu’il explique dans la Gazette de Nîmes qu’on appelle le raisin un sac à mol, expression tiré du mot molan « ivrogne ». Molan se trouve dans l’Alibert avec le sens « pêche molle; personne molle: sorte de raisin » et est dérivé du latin mollis « mou ».

Ebriago

Ebriago

  • ivraie

ebriago « Ivraie »    

  • redoul (coriaria myrtifolia) » Voir Wikipedia pour redoul. Cette espèce contient de la coriamyrtine, alcaloïde qui frappe les moutons d’intoxication alcoolique lorsqu’ils  consomment les baies. Le nom vulgaire redoul désigne aussi le sumac. Utilisation: Tanins: les grandes quantités de tanins contenues dans cette plante l’ont fait utiliser pour le tannage des cuirs. Les feuilles ont été utilisées pour peindre en noir. Pigments: violet noir dans les fruits.

On cite leur utilisation au siècle dernier pour teinter le vin. Voir Wikipedia.

Étymologie : ebriago vient du latin ebriacus « ivre » un dérivé de ebrius « ivre ». Ancien occitan ebriac, embriac, ubriac. Occitan moderne embria « ivre », embriaï, – aigo (Alès), e(m)bray, b(e)ryac (Ariège), etc.(cf.Thesoc, ivraie). Pour le languedocien est attesté un embriaigo-cabro « lotier cornicule » (Wikipedia), autrefois utilisé comme calmant et somnifère. Je pense que la source du FEW a confondu cette plante avec le coriaria myrtifolia ou redoul qui sert aussi pour le tannage. Dérivés : ancien occitan abriaga « ivraie enivrante « ; occitan embriac, embriaga ; embriaigà « enivrer ».

L’insertion d’un –m- ainsi que la chute complète de la première syllabe et les variantes avec i- (français) s’expliquent par le fait qu’il s’agit d’un e- long dans une syllabe ouverte. Voir Ascoli, dans l’Archivio glottologico 3, p.442. Consultable grâce à l’université de Toronto (globalisation !) qui vous permet de consulter cette revue dans les bibliothèques canadiennes et américaines!

Italien ubriaco « ivre », catalan embriac, espagnol embriago, portugais embriagado, basque iraka, iralka, libraka. A ma demande un visiteur qui connaît bien le basque m’a répondu : Le basque ira(l)ka « ivraie » est semble-t-il en effet un emprunt au gascon irague « id. », lui-même du latin ebriaca. La variante roncalaise libraka avec b suppose un autre intermédiaire roman pyrénéen où le b de la forme latine a été conservé (biraca ou quelque chose comme çà, très probablement de l’aragonais).


ebriago?

             

                                                                           embriaco « doronicum »                          ubriago  « fumeterre »    
Le nom a été transféré à d’autres plantes: provençal embriaco « doronic« , « centranthus ruber », ubriagia « colchique » (Alpes-Mar.), ubriago « fumeterre » (BduR) embrieiguas « sorte d’orchis » (Montpellier). Je ne connais pas les raisons de ces transferts, mais je pense que la plupart est enivrant(???).