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Vim

Vim « osier » vient du latin vimen, viminis « osier ». Le mot latin est un dérivé du verbe viére « tresser » et vimen désigne d’abord les brins d’osier qui servent à faire de la vannerie et ensuite aussi l’arbre.

Vimen a dû occuper une grande partie du domaine galloroman, puisqu’on trouve des restes jusqu’à la frontière linguistique en Belgique et des emprunts dans le moyen néerlandais (wime « brin d’osier »). Mais au cours de siècles  vimen a reculé dans le domaine d’oïl jusqu’à une ligne qui va de la Loire aux Vosges. En occitan nous trouvons le type vim, bim, vin (< vimen) dans l’est et vime, bime, qui repose sur un accusatif refait *viminem dans l’ouest. Dans quelques localités (Corrèze, Cantal, Agenais) qui se trouvent à la limite de la zone vige < vitex, nous trouvons des mots « combinés » type vinzo, vyenze qui ont ajouté à vim la terminaison de vige. Voir Thesoc s.v.osier.

L’osier jouait un rôle très important dans la vie de tous les jours. Nous trouvons par conséquence de nombreux dérivés dans les dictionnaires : bimos « treillis d’osier » (Toulouse), binbignè < vimen viminarius « souche d’osier franc qu’on recèpe tous les ans » (Castres), bimade s.f. « récolte de brins d’osier ».

En dehors du galloroman, nous retrouvons le vim en catalan vim « osier; brins d’osier », espagnol mimbre, portugais vime « osier ».

Voir aussi les articles amarinier et vige

Vin de ruscle

Vin de ruscle voir ruscle et rusco. Une visiteuse m’écrit:

Bonsoir.  Je cherchais une explication à une recette qui soigne le pelage des animaux qui se grattent et que je connais sous le nom de « vin de ruscle ». Grâce à votre définition je comprends que ruscle n’est pas seulement une grosse averse mais aussi l’écorce. Le vin de ruscle est bien la recette que je connais : Faire bouillir de l’écorce fraiche de chêne dans du vin. Laisser refroidir et passer sur le pelage s’il n’y a pas de plaie. Merci beaucoup.

Vincla; vencilh, bencil

Vincla du latin vinculum « lien » a donné en gascon : bincle, bingle « lien » et le verbe dérivé binclá « plier, incliner ». La fête de St-Pierre aux Liens, qui a lieu le 1er août, (le 16 janvier pour les orthodoxes) s’appelle vincla ou bingle.  A Nice on en a profité pour faire cinq jours de   festivités pour la St-Pierre-es-Liens. A Rome dans Eglise Saint Pierre aux Liens – San   Pietro in Vincoli. vous pouvez voir les bingle.

Bincle s.f. signifie « lien », bengle « tige de bois fendue pour tenir la chandelle; pince en bois » en béarnais. Dans le Bigorre blincá signifie « courber,   ployer, pencher », dans l’Aude et le Val d’Aran blinká est « plier ». Italien vinchio « tige d’osier qui sert à lier », catalan vincle « lien », espagnol vinculo « lien « , et   brincar « sauter, bondir », portugais brincar« jouer, plaisanter, badiner »font partie de la même famille.

                         
                  Les vincla de St Pierre.                        Le bencill d’Hercule.               Un bencill moderne

Vencilh, bensilh « lien du fagot », attesté dans les Htes-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques et les Landes, vinquèla, vinzelo à Agonac en Dordogne. (Thesoc). La 1re  attestation date de 1315 (Bayonne). Le mot est surtout connu en gascon avec le sens « hart dont on lie les fagots ». A Bayonne le bencill‘était une « houlette de berger » (une houlette c’est un  » une petite plaque de fer fixée au bout du bâton de berger qui permet de jeter des mottes de terre aux moutons qui s’écartent ».

Etymologie : *vinciculum « lien ». Dans le FEW vincilh est rangé dans l’article à part *vinciculum « lien », un diminutif de vinculum « lien » qui a abouti à vincla. 

Je suis convaincu que les mots de la famille   Guinsal, guissal « hart, corde, lien; corde de pendu » ont au moins subi une influence de vinciculum.

Un visiteur qui se présente comme « Pep » m’a envoyé une attestation supplémentaires provenant d’une étude sur les patois des Landes dont vous trouverez la référence dans son commentaire sur cet article (cliquez sur le titre pour voir l’article avec les commentaires).  J’ai pu trouver la page et voulais vous la présente pour admirer cette trouvaille, mais la qualité de ma capture d’écran n’est pas suffisante.

 

 

Visetta

Visetta ou Vizette « escalier tournant extérieur ». Tiré du Compoix de Valleraugue(1625) :

«Maison de Sire Adam CARLE, maison à deux membres en partie crotte 23 cannes 1 pan compris vizette » (tome 1 page 150).(Crotte est une cave voûtée, sur laquelle on trouve à l’étage l’habitation).

L’origine est le latin vitis ‘vigne, sarment, pampre’, plus le suffixe diminutif -itta. Latin vitis est encore vivant dans presque toutes les langues romanes, italien vite, espagnol vid, portugais vide, mais a été remplacé par vinea ‘vigne’ dans une grande partie du galloroman. Vitis a survecu tel quel en rouergat abit ‘cep de vigne’; Millau obise ‘pampre’; au figuré dans l’Aveyron bit ‘cordon ombilical’.

Principalement dans le domaine occitan des dérivés désignent la ‘clématite’, dans le Gard c’est vissano, avissano et rabisano, parce que comme la vigne elle fait deux lianes qui montent en s’enroulant systématiquement à la recherche du moindre support.

sarment                               escalier à vis                          clématite

Partout la vis est la pièce de métal. Limité au galloroman est le sens ‘escalier tournant’, vis en ancien français comme en ancien occitan. Dans les dictionnaires de 1567 jusqu’à Trévoux 1771, la vis saint Gilles est un « escalier qui monte en rampe et dont les marches semblent porter en l’air » d’après le fameux escalier de St Gilles (Gard), appelé ensuite vis  saint Gilles, jusqu’au grand Larousse de 1867 qui écrit : « Escalier à vis dont les marches, soutenues par des voûtes d’une coupe particulière, semblent être suspendues dans les airs. Il en existe un modèle célèbre dans le prieuré de Saint-Gilles, en Languedoc. »


     

« C’est dans l’épaisseur du mur nord de l’ ancien choeur que se trouve la vis. Il s’agit d’un escalier hélicoïdal, datant du XIIème siècle.Il porte une voûte annulaire appareillée à 9 claveaux. Cet assemblage s’appuie sur le noyau central et les murs intérieurement cylindriques, et l’art du tailleur de pierre apparaît dans la double concavité et convexité de chaque voussoir. Elle a été très tôt une oeuvre célèbre, étape des Compagnons Tailleurs de pierre qui vinrent graver leur surnom ou leur devise lors de leur passage. »texte et les 2 photos  tirés du site http://perso.orange.fr/erwan.levourch/stereotomie.htm

Photo que j’ai prise en haut de la  vis  et qui montre bien la structure et le travail des tailleurs de pierre.

Le diminutif viseta, vizeta ‘escalier tournant’ attesté depuis le XVe siècle est limité au provençal et l’est-languedocien. L’attestation du Compoix est intéressante pour la précision de la définition « extérieur » :  la langue s’adapte à l’environnement!


vizette cévenole

Quand j’ai acheté un masà Valleraugue en 1979, il n’y avait pas d’escalier entre le rez-de-chaussée et l’étage et comme estranger ignorant j’ai installé la cuisine/ salle à manger  au rez-de-chaussée, dans la crotte , pour la déménager vers l’étage quelques années plus tard.

      
anglais vise                  neerlandais vijzel d’un moulin

Vòmi, bòmi

Vòmit, vòmi, bòmi « nausée, envie de vomir » dans avoir le bÒmi, expression répandue en provençal et languedocien et bien enracinée en français régional, cf. p.ex. Champsaur.

L’étymologie est vomitus « action de vomir ». L’occitan a gardé l’accent là où il était en latin, sur le –o-! La première attestation date du XIIIe siècle. Il s’agit donc d’un emprunt au latin par les médecins de l’époque

Voto; vot

Vota « fête patronale, fête du village »;Vot « voeu, souhait désir; ex-voto; pèlerinage; fête votive » et vote s.m. »vote, voix, suffrage » ( Alibert) . Vot, voto « fête locale ». Etymologie: latin votum « promesse solennelle faite aux Dieux ».

En ancien provençal existait le mot lo vot « promesse faite au ciel par laquelle on s’engage à quelque oeuvre non obligée », comme en provençal moderne : vot, vo, vou ou dans l’Aveyron bouot ou bot.  Il existe également  en français : voeu « promesse » (religieux), ancien français vut, anglo-norman vou , qui est devenu en  anglais vow « An earnest promise to perform a specified act or behave in a certain manner, especially a solemn promise to live and act in accordance with the rules of a religious order: take the vows of a nun ».

Dans une période plus récente,  au XVIe siècle nous trouvons en français le mot vote « voeu, prière » provenant du pluriel vota qui dans tout le midi de la France, de  la Drôme jusqu’à la Gironde désigne « la fête patronale »,  Vaucluse, Languedoc voto, Toulouse boto,  Aveyron et Rouergue bouoto, Gers boto.En français ou plutôt en  français régional l’expression fête votive est attestée depuis 1876, propre à certaines régions, avec toujours le sens de « fête patronale » où le patron n’est pas un chef d’entreprise, mais le saint à qui est dédiée l’église de la paroisse!

Changement d’époque! J’ai demandé à plusieurs personnes à Manduel (30) à quoi leur faisait penser le mot « votive » dans « fête votive » . La réponse a été unanime  : « à la mairie, aux élus, aux votes ». Pourtant les votants devraient savoir  qu’il y a une différence entre les vots  « promesses faites au ciel » et  les votes « résultats des  promesses faites aux électeurs ».

   

fête votive                                              ex-voto

Voyage

Voyage « Quantité de marchandise transportée en une seule fois » vient du latin viaticum.

L’exemple donné par le TLF : J’ai rapporté un voyage de pierres ( pour le domaine franco-provençal et tiré de Tuaillon Région. 1978; mentionné aussi pour le Champsaur), me rappelle le temps où je participais aux Bourses de Minéraux et Fossiles dans toute la France. Le mot voyage était fréquemment utilisé par tous les exposants avec ce sens, lors de l’installation et le démontage des stands. Maintenant mes fils s’en chargent. Atelier La Trouvaille. Vous y trouverez même une video sur mes débuts comme lapidaire « tailleur de pierres précieuses et semi-précieuses ».

Le sens régional donné ci-dessus est aussi courant dans le Midi, et je viens de lire un livre en anglais ou journey a le sens  » déplacement  de sable sur une courte distance ».

Vueg, void, vog

Vueg, vueja « vide », void, voida, vog, voja;  vuejar « vider ». Etymologie: *vocitus « vide ». Pourquoi cette étoile * ? Parce que vocitus n’est attesté qu’au IIIe ou IVe siècle dans l’Itala, une traduction de la Bible en latin, antérieure à la Vulgate. Vocitus se trouve aussi dans des graffiti de la même époque. Ces graffiti sont très intéressants pour les historiens de la langue. Jetez un coup d’oeil sur les Graffiti de Pompeï dans ce site.

admiror o paries te non cecidisse ruinis qui tot scriptorum taedia sustineas (CIL 4, 1904, 2461 et 2487)

(Mur, je suis surpris que tu ne te sois pas effondré sous le poids des bêtises de tous ceux qui ont écrit sur toi.)

Cela montre une fois de plus que les langues romanes viennent du latin parlé. Le latin littéraire avait les mots vacuus, vacare « vider », mais dans des dérivés avec l’accent sur l’avant-derrière syllabe comme vacivus, le -a- était déjà passé à -o- au temps de Plaute (254 avant J.-C.) : vociva. 

En ancien occitan vocitus était devenu vuech, vuechia (XIIe s.), et la majorité des parlers occitans ont gardé la diphtongue; tandis que l’ancien français vuit, vuide a été simplifié en vide et le verbe en vider, le v- ayant absorbé le -u- suivant. (Bourciez).

Yeys ‘chemin de sortie’

Un mot toulousain absent des dictionnaires, sauf le FEW.

Michel Prun  m’écrit le 4 mars 2022:

Yeys
Dans son livre La Grande Lande et Croix Daurade (partie du gardiage de Toulouse), l\’Abbé G. Lafforgue (imprimerie et libraire Edouard Privat, Toulouse, 1909, numérisé par la BNF  utilise plusieurs fois le mot yeys (par exemple dans la légende de la carte du gardiage du Capitoulat de Saint-Sernin de 1690, p. 150 et p. 149 dans l\’expression « yeys de service » ou chemin de servitude. Autres mentions : p. 157, p. 159, p. 161, p. 314, p. 371, p. 372, p. 411. On ne trouve ce terme ni dans les dictionnaires occitans en ligne accessibles par Lexilogos, ni dans les dictionnaires proposés par le même site. Paul Cayla, Dictionnaire des institutions, des coutumes et de la langue en usage dans quelques pays de Languedoc de 1535 à 1648, indique à l »entrée yeysses « voies par lesquelles on peut sortir d\’un terrain : confront de mydy les communals et yeyssel... (Mas Saintes Puelles, 1542) ».

Peut-on associer ce mot avec latin exire ? Le FEW III, p. 296 fournit les attestations Apr. ieisset “ issue, chemin ” (Albi 1355, AM 15, 509 ». et plus haut sur la page  I  eisi  et eisada  » sortie » ».  Il s’agit de dérivés du verbe exire  « sortir ».

Excellent travail. Consulter le FEW ça vaut la peine.  Merci.!

Un extrait du livre de l’Abbé Lafforgue, p.157:

 

 

Zeneto, genette

Zeneto « espèce de civette » fr. genette. »

Originaire d’Afrique du Nord, ce petit carnivore farouche au corps allongé – d’une longueur totale de 90 cm dont la moitié pour la queue – se distingue par un pelage gris tacheté de noir et une queue annelée gris noir. Il est difficile d’apercevoir la genette car elle a une activité nocturne ; pourtant elle est bien présente dans les Corbières depuis plus de 1000 ans. En effet elle fut introduite en Espagne et en France lors des invasions sarrasines. Les musulmans l’avaient apprivoisée pour chasser les souris dans les habitations. C’est pourquoi elle figure sur certains tableaux médiévaux du Languedoc avant que n’apparaisse le chat domestique.

De nos jours « la genette bénéficie d’une protection totale sur le territoire national qui favorise son expansion au nord de la Loire et vers l’est du Rhône. » m’écrit Patrick Valette, technicien forestier de l’Office National des Forêts. Un site intéressant sur la genette : http://www.carnivores-rapaces.org/Genette/population.htm

L’histoire de l’animal nous donne l’histoire de son nom qui est venu par le catalan geneta, l’espagol jineta ou le portugais. gineta qui proviennent de l’arabe ğarnait « civette ». Je cite le mot parce que dans les dictionnaires dialectaux on ne le trouve que pour le Gard et l’Hérault. Pourquoi ? Si vous pouvez me renseigner, n’hésitez pas ! Il est déjà attesté par l’abbé de Sauvages  châinè au debut du XVIIIe siècle.!

        

                                        La genette.                                         Répartition géographique

Dans le site http://sarah.vanden.free.fr/pages/historique.html  il y a une image provenant de « La Dame à la licorne : six tapisseries exécutées à la fin du XVe siècle par l’un des plus grands artistes, le Maître de Moulins, qui imagina cet ensemble à la demande de Jean IV Le Viste, président de la Cour des Aides à Paris. »

La plupart des animaux y vont par couple prédateur-chassé ; par exemple, la genette et le lapin. La genette symbolise l’inconstance et la rouerie. Le lapin, qui a l’époque s’appelait connil du latin cunniculus, est le symbole sexuel féminin par excellence au Moyen Age; il est associé à la lune et à la fécondation. (Le mot connil a été remplacé au XVIIe siècle par lapin parce que les gens en avait marre d’entendre les mêmes blagues depuis des siècles. Par contre ancien occitan conilh, conil a survecu jusqu’au XXe siècle.  Conilh, conilha « lapin, lapine », est considéré comme « vieux » même dans l’Aveyron . Alibert)

Dans un site consacré au tombes égyptiens  (site disparu) vous trouviez en grand format cette représentation de la genette.

Pour ceux qui sont près d’une bibliothèque universitaire et lisent l’allemand, il y a l’article de:Elke Grab-Kempf, Heidelberg : « Zur Etymologie iberoromanischer Bezeichnungen für die ‘Genette, Ginsterkatze (Genetta genetta L.)’: sp. jineta (asp. gineta, geneta), kat. geneta (akat. janeta), val. gineta, pg. gineta (mlat./apg. janeta), gal. xeneta, xineta « . Zeitschrift für romanische Philologie. Volume 122, Issue 4, Pages 679–687.