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Poutargo

Poutargo « sorte de caviar », boutargat  « mulet (=muge) ayant son frai ». (Palavas).Cf. poutargue  Wikipedia

        Gargantua

Un dérivé de l’occitan boutargo ou poutargo « sorte de caviar fait avec des œufs de mulet, pressés, salés, séchés et épicés ».

La première attestation en français vient de Rabelais, qui donne la forme languedocienne avec b- :

« Grandgousier estoit bon raillard en son temps, aymant à boyre net autant que homme qui pour lors fust au monde, et mangeoit voluntiers salé. A ceste fin, avoit ordinairement bonne munition de jambons de Magence et de Baionne, force langues de beuf fumées, abondance de andouilles en la saison et beuf sallé à la moustarde, renfort de boutargues, provision de saulcisses » (Gargantua, Chap.3).

Il a dû apprendre le mot et apprécier le plat à Montpellier où il a séjourné à partir de 1530.

« Pissant doncq plein urinal, se asseoyt à table, et, parcequ’il estoit naturellement phlegmaticque, commençoit son repas par quelques douzeines de jambons, de langues de beuf fumées, de boutargues, d’andouilles, et telz autres avant-coureurs de vin ». Gargantua, chap. 21 (éd. Pléiade 1942, p. 86)

La recette du  Menagier :

Mulet est dit mungon en Languedoc, et est eschardé comme une carpe, puis effondré au long du ventre, cuit en l’eaue et du percil dessus, puis reffroidié en son eaue, et puis mengié a la saulse vert, et meilleur, a l’orange. (Ménagier Paris B.F., c.1392-1394, 237). (Source DMF s.v. orange)

La recette et le mot nous sont probablement venus de l’Italie. Un texte de Venise de 1320 mentionne déjà le butarigus et en 1585  Ogier de Busbeq écrit :

« de salsamentis, quæ Constantinopolim à Mæotide advehuntur, quæ Itali moronellas, botargas, & caviarum vocant » = « des saucisses qui de Maeotide (Palus Mèotide se trouve au nord de la mer d’Azov) sont apportées à Constantinople  et que les Italiens appellent  moronellas, botargas  et caviar « 

La boutargo est connu dans tous les pays méditerranéens. L’origine du mot est l’arabe butţarih « genre de caviar ». C’est la forme marseillaise ( ?) avec p- qui a été prêté au français depuis l’Encyclopédie en 1751, mais elle est absente du TLF.  Esp. botarga, it. bottarga, pg. Butargas.
Il semble que dans notre région la poutargue est restée comme une spécialité de Martigues, la «  boutargo  ou caviar de Martigues ».

Pradet de Ganges, un reboussier

Ceci est un article d’Histoire Littéraire.

Un  dicton que j’ai appris il y a des années à Valleraugue où j’ai fait des enrigistrements disait: Reboussié coumo Prodet de Gangjé : « sa femme s’étant noyée, Pradet de Ganges remontait le cours de l’eau pour la chercher ».

Fenno negado

Fenno negado

En cherchant des attestations de rachalan « ouvrier agricole à Nîmes », j’ai trouvé dans  les Poésies en patois limousin: édition philologique complétement refondue pour … Par Emile M. Ruben. Paris, 1866. la fable de la Femme noyée, racontée en patois nîmois par un poète inconnu, que vous retrouvez ci-dessous:

Fenno negadoIl s’agit d’un extrait de ; Bourbouyado

 

L’origine de cette fable remonte très loin, mais la version  et l’interprétation de Valleraugue est à l’opposé de la version originale: un reboussier.   Si vous voulez en savoir plus de celle de La Fontaine., il y a par exemple :

La FontaineLa femme noyée (Explication de texte) –

www.litteratureetfrancais.com/article-la-fontaine-la-femmenoyee-explic…

19 mars 2012 – EXPLICATION DE TEXTE : LA FONTAINE, LA FEMME NOYEE INTRODUCTION Jean de La Fontaine a commencé à publier ses Fables en …

ou une dissertation !

Annalyse linéaire de la femme noyée – Etudier.com

www.etudier.com/dissertations/Annalyse…FemmeNoyée/325848.html

La femme noyée » de Jean De La Fontaine (1621-1695) 1. … Dans la fable « La femme noyée », on distingue 3 mouvements principaux : – Les vers 1 à 8 …

Prairo, preveire

Prairo s.m. « praire = Mollusque lamellibranche du genre Vénus, comestible, très répandu sur les côtes méditerranéennes et océanes. »(TLF). D’après Mistral c’est un « mollusque vénus » ou « un gros ventricule du cochon »; lou preire double est un mollusque d’un goût exquis le « venus verrucosa » qu’on trouve abondamment à Toulon. Cette remarque explique peut-être le dicton  lou praire fai lou laire « l’occasion fait le larron » ( Sauvages) . Dans l’article preire de Wilipedia, vous  trouverez le conseil suivant:

« Elle peut se manger crue en l’ouvrant avec un couteau. Pour ce faire, glisser une lame très fine par l’arrière, et faire glisser sur le côté. Cuite, elle est délicieuse au four avec un beurre d’ail. »

                                                                            

prairo Ø 4 cm minimum                                                 preire                       

Lou prèire rouge « cardita sulcata » est un mollusque à chair rouge » (M).  A Nice un baio-preire , littéralement un « baise-prêtre », est le nom de plusieurs plantes épineuses.

L’étymologie est une forme du latin populaire previter qui doit provenir d’une variante du bas latin *prébiter,*praebiter  du latin classique presbyter « prêtre » (TLF). Previter est attestée dans une inscription à Velletri, une ville au sud de Rome. Il reste le problème du genre: français preire est féminin, occitan praire masculin. Cette  forme populaire previter a été conservée en franco-provençal et dans une partie du provençal et du languedocien. Par exemple à Barcelonette preire « prêtre » et au figuré en Aussois (Savoie) prére « punaise des champs » (de couleur noire comme les soutanes ?), provençal preire « sorte de coquillage » (FEW IX, 358b).  Mais pour le FEW XXI, 268a le mot est d’origine inconnue.

Le latin classqiue presbyter qui  a abouti à  prestre en occitan. La première attestation vient de la Chanson de Ste Foy (1060). Anglais priest, Néerlandais priester, Allemand Priester. 

La même racine latine presbyter, non pas au nominatif  (avec l’accent sur pres-) mais à l’accusatif presbyterum (avec l’accent tonique sur –ter-) a abouti en occitan à preveire « prêtre », et au figuré en languedocien perbeire « gadus minutus » appelé aussi capelan. Il doit y avoir une explication de ce transfert dans l’aspect physique de ce poisson.

perbeire-capelan

Prat du Raïs, dans l’Aude, ou les pièges de ...

Prat du Raïs  à Coursan (Aude) et Prat du Rais à Cuxac. Déversoir du Prat del Raïs  et vers le nord-ouest  le Chemin de Prat de Rais, 11590, à Cuxac-d’Aude.

A première vue, j’avais l’impression que le Raïs,  Gamal Abdel Nasser, avait acheté  dans les années ’60 un petit refuge pour se retirer  à la campagne audoise, en cas de problème.

Heureusement j’ai pu consulter le Dictionnaire Topographique du département de l’Aude  par l’abbé Sabarthes, Paris 1912, qui me donne les noms anciens.  Ce n’est pas  le Raïs  mais un ou plusieurs Juifs qui étaient  propriétaires du pré, nommé en latin pratum judaicum. 

L’histoire des Juifs en Languedoc nous explique l’histoire du nom du pratum judaicum.

Le XIIe siècle est une période de prospérité pour le judaïsme provençal et languedocien qui profite de l’esprit de tolérance qui règne alors dans les cours de Toulouse et de Béziers. Armand Lunel peut écrire : « Sous le ciel des troubadours et par la douceur native des tempéraments, l’âpreté des rapports entre l’Église et la Synagogue put peu à peu se réduire et le poids de la réprobation théologique s’alléger jusqu’à rendre pacifique la cohabitation des chrétiens et des juifs. »

Benjamin de Tudèle, le rabbin voyageur du XIIe siècle, cite certaines communautés du midi, évoque leurs nombreuses écoles talmudiques et leurs maîtres de l’époque. Les Juifs peuvent s’adonner à l’agriculture comme au commerce. Une des plus importantes communautés juives est alors celle de Narbonne, forte de trois cents personnes et où les Juifs disposent d’un hôpital.

Après la mort de Raymond VII en 1249  ses terres passent  sous la possession d’Alphonse de Poitiers, frère de Saint Louis et mari de l’héritière de Ryimond VII. Dès lors, les Juifs sous sa domination souffrent d’un arbitraire semblable à celui qui règne à leur égard dans le royaume de Saint Louis. Alphonse de Poitiers ne manque pas de les pressurer : taxes pour dispense de rouelle ; fonds pour la croisade en 1248 puis nombreuses extorsions de fonds avec menaces d’expulsion et imposition forcée qui lui rapporte autant que celle sur les chrétiens pour la Huitième croisade. Les Juifs émigrent alors vers la Provence, sous la domination de la maison d’Anjou. (Wikipedia)

Deux siècles  plus tard on écrit en languedocien  Prat Jusayc, mais les Narbonnais ne connaissait plus le sens du nom  Jusayc.  Les Juifs étaient partis en Provence. Quelques années plus tard ils l’écrivent Jurayc,  ou avec un –t final Jurait.  Ensuite le -t  final de prat « pré »a fondu avec  le j-  initial (prononcé dzj-)  de  Juraic  pour devenir  PratDuraic.    Au XVe siècle déjà on hésitait sur la consonne finale:  -t  ou –c ?   La finale ne se prononçait plus, peut-être sous l’influence du français, obligatoire  dans les documents administratifs depuis l’ordonnance de Villers-Cotterets  (1539).  Ainsi le   Prat Juraic  devient  le Prat Durais.

Le nom  Durais  n’avait pas de sens non plus, alors pourquoi pas du Raix avec un -x  comme dans  Cuxcac. Au XVIIIe siècle on simplifie dans les archives communales et écrit du Ray, mais l’ancienne graphie Prat du Rais  reste dans le cadastre napoléonien, probablement copié du compoix.

Ce nom est resté à Cuxac d’Aude, mais à Coursan on a voulu continuer et donner un sens au nom Rais  en y mettant un tréma Raïs « le chef » en arabe,  peut-être en souvenir des l’invasion du Languedoc par les  Sarrasins.

Dans les Annales du Midi de 1896, p.195-199,  Alphonse Blanchet a écrit un article  intitulé « Les transformations du latin judaicus  à Narbonne. »

Prègadieu

Prègadieu « mante religieuse ». Littéralement prie-dieu. Cet insecte a été nommé ainsi à cause de son attitude sacerdotale. La prègadieu, appelée aussi prègo-Diu-Bernado (< Bernardus ), bernada , prègo-bernado (Aveyron) , bernadèto (Aude) pregotswono (= Jeanne), lou prego-Dièu d’estoublo ou de restouble (Manduel), ce qui se dit aussi d’une personne maigre et pâle, n’est indigène qu’autour de la Méditerranée, mais avec les changements climatiques elle monte vers le nord. On la trouve déjà en Belgique. Dans l’Ile de France et en Allemagne c’est un insecte protégé! Interdiction de l’attraper ou de la tenir en cage!

Sur le remplacement de l’élément  Dieu  par  Bernado, tswono,  voir mon article  Galinetta  « coccinelle ».

  


Priapolithe ou Bijoux de Castres

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Priapolithe « pierres algaires laminées de type stromatolitique* dues à l’activité d’une algue cyanophycée » de la région de Castres. Etymologie est lelatin Priapus « dieu des jardins et des vignes, qui symbolise la force génératrice ».  Une image du Recueil des monumens des catastrophes que le globe terrestre ..Par George Wolfgang Knorr,Jean Ernest Emanuel Walch Neuremberg, 1775 (Google livres) :

Priapolithe2C’était la  première pierre que j’ai coupée après l’achat d’une grande scie diamantée pour lapidaires m’était fournie par mon ami  le Petit géologue de Lacrouzette dans le Sidobre, et c’est lui qui  m’a appris qu’il s’agissait d’une priapolithe. Le mot ne se trouve plus dans le CNRTL, mais il apparaît dans plusieurs dictionnaires anciens1 et notamment dans le Supplément au dictionnaire de l’Académie par Fracçois Raymond (1835).  avec une définition différente:

PriapolitheAcadLa première attestation vient de Goudouli, Pierre Borel 1620?-1671), qui dans Les antiquitez, raretez, plantes, minéraux & autres choses considérables de la ville et comté de … écrit:

PriapoliteBorelCe qui m’a intéressé dans cet article de Pierre Borel est la mention de la théorie des signatures. J’ai l’impression qu’il s’en moque un peu, mais la citation de Crollius, Quercetan et Henri Carrichterius montrent qu’il était au courant et que cette théorie était très répandue à son époque. Je cherche à me renseigner à ce sujet parce que je crois qu’il est important de savoir que cette théorie et des théories analogues comme astrologie, jouaient un grand rôle dans la vie des gens.

Si vous êtes intéressé par la géologie  de la région de Castres, suivez ce lien: Priapolithes

  1.   du Trevoux de 1752 jusqu’au Larousse de 1875

pruzi ‘démanger’

Pruzi « démanger », pruzir en ancien occitan, vient du verbe latin prūrīre « démanger ». Coucon më pruzis « Quelque chose me démange »  et Kë së grâto ountë li prus fâi pa mâou à dëgus » ; pruzijhê « démangeaison ».(S1)

La Fare d’Alais utilise le mot au figuré:

La lengo qu’a lou mai de prusé pouétiquo

La lengo qu’es touto musiquo

Per qu’aou sèn la fan dé rima

Es la qué barboutis éfan, à la brassièro,

Es aquélo qué la prumièro

Nous appren à diré : Mama.

Avec 3 -r- (-r- roulés comme en italien moderne; essayez de le prononcer!) le verbe prūrīre gratte bien la langue  et est sujet à la dissimilation.  Déjà en latin on trouve des formes plurire (encore vivant dans le Nord et le Sud de l’Italie) et prudere > italien prudere, catalan pruhir, portugais pruir et occitan pruzir.

A Alais (La Fare?) et Puisserguier le dérivé prus a pris le sens « le fil d’une lame tranchante » et aussi « appétit » à Puisserguier.  Mais je pense que La Fare et Rouquier l’ont créé dans lou mai de prusé pouétiquo. Pourtant Alibert l’a repris tel quel. Il fournit aussi la conjugaison complète et d’autres dérivés.  Si cela vous prutzis..

Français prurit a la même étymologie mais c’est un emprunt ancien au latin, ce qui explique le maintien du –r- intervocalique.

 FEW IX, 498

Pudis 'térébinthe'

Pudis « térébinthe » est un dérivé du verbe pudre « puer » du latin pūtēscĕre « se gâter, se pourrir, puer ».  Plusieurs animaux   ont un nom qui exprime la mauvaise odeur comme  pudis, ou gatpudre « putois ».

En ce qui concerne les plantes, des dérivés de pudre  désignent  l’alisier  pudis  (Sauvages et RollandFlore 5,123),  l’anagyris   puditz, pudis, le troène pudis  dans le Périgord,  le cornouiller sanguin pudis avec de nombreuses attestation en occitan, la bourdaine pudis à Brive,  le nerprun pudis  dans l’Aveyron (RollandFlore 4,17),  prunus padus pudis  à Montpellier (RollandFlore 5,310) et d’après l’abbé de Sauvages (S1) la térébinthe   pudis en languedocien.

Il me faudra l’aide des botanistes pour savoir ce que toutes ces plantes ont en commun pour comprendre cette confusion. En Normandie un autre dérivé  puisne  est le nom vulgaire  de différents arbrisseaux  considérés comme bois-mort. Dans Télébotanica je vois que le nom secondaire de plusieurs arbrisseaux est « bois puant ».

Dans la page térébinthe de Télébotanica il y a la remarque : Pudis Peu usité et à éviter « Pudis » désigne habituellement Anagyris foetida L..

La description du pudis  par l’abbé de Sauvages (S1) m’a rendu curieux; il écrit:

Nos térébinthes portent de longs cornets rouges et pointus; ce sont des galles creuses ou des excressences occasionnées par la piqure des insectes; elle sont remplies de pucerons &  d’une liqueur gluante qu’on dit être vulnéraire.

(Télébotanica)

Si vous en voyez une pendant vos ballades, prenez-en une photo et envoyez-la au site de Telebotanica.

Puech

Puech, pueg, puog  « puy, colline, mont, montagne ». Le Mont Duplan à Nîmes, s’appelait encore au XIXe s. le puech des juifs. Pour l’histoire de cette colline voir le site de Georges Mathon :   podium judaïcum en 1030.

Et le mot latin podium est en effet l’étymon, qui au cours des siècles a subi des transformations phonétiques et sémantiques. Les Romains l’avaient emprunté au grec podion un diminutif de pous « pied ». Le latin podium désigne d’abord « un piédestal d’une statue » ou « l’avant scène de l’orchestre », ensuite « un support pour des tonneaux ou des ruches » et enfin chez Pline « un balcon ou une terrasse ou la loge impériale au cirque ». Ce dernier sens a abouti à « balcon, avant-corps sur une façade » > « hauteur » > « colline », sens qui a été conservé dans plusieurs régions de l’Italie, en corse pogliu, en catalan puig etc. Il a existé dans toute la Gallo-romania, mais il a disparu dans le domaine d’oïl probablement à cause de l’homophonie avec le mot puits < puteus. Puech est très répandu comme nom de lieu et également comme nom de personne dans le domaine de l’occitan. Voir le site de l’IGN, rubique toponymie : 1899 fois le nom puech , 3022 fois puy.

 

Le sens « balcon, avant-corps sur une façade » a abouti en néerlandais à « facade d’un batiment » , avec ou sans balcon : pui prononcez peuy

La réparation d’un pui à Amsterdam