cat-right

Bugne, bonha

Bonha « bigne, bosse, enflure; souche d’arbuste; maladie du maïs; écrouelles » (Alibert), en français régional : baigne, bugne; bugner « toucher, heurter »(Andolfi), bougne « griffe, coup »(Lhubac).

Ancien français bigne, bugne signifie « bosse à la tête provenant d’un coup »  et de là, en prenant la cause pour l’effet : « gifle », représente un celtique ( ?) *bunia « souche d’arbre ». Languedocien bougno  et bougnas, bonhas « vieux tronc d’arbre ; petite souche » ;  bougneto « petite souche ». (S.).  L’évolution des sens a dû être « nœud d’arbre » > « bosse » > « coup ».
Pour l’ informateur ardéchois de Gravières de lAtlas linguistique la bugno est carrément « la tête ». Est-ce que la violence y règne?

Probablement de la même famille sont français beigne, italien bugna « bosse » et le catalan bony.  Anglais bunion « Callosité qui se forme au niveau des articulations du pied, en particulier à la naissance du gros orteil ». Peut-être même le néerlandais bonje  « bagarre ».
Un rustre ne connaît que la force de ses poings, de là bougnat « paysan rustre, grossier ». (And.). Bougno « tache » et bougneto « petite tache » sont  peut-être  dérivés de l’aspect d’une  « bosse » après un certain délai…
Par contre quand un Lyonnais vous donne une bugne, c’est un geste d’amitié! D’après le grand nombre de visites le 24 février 09, une patisserie pour le Mardi Gras . Pour une recette cliquez ici !

Est-ce que l’argot lyonnais bigne « prison », et bignolle « agent de sûreté » argot français bignole « concierge » appartiennent à la même famille?? (FEW XXIII, 129b)

bugnes lyonnaises

 

 

Boudego

Boudégo, bodega s.f. « grande cornemuse de la Montagne noire languedocienne faite dans une peau de chèvre entière »  m’écrit une visiteuse. Cliquez sur le lien pour beaucoup plus d’informations! « cornemuse » (Aude); « personne ventrue » (Alibert). Mistral donne aussi le sens « vessie » et boudeo, boudegoú « petite cornemuse »: boudegaire « joueur de cornemuse ».

      !  

Ci-dessous, à gauche: Les peintures du plafond datant du XVe s. du château de Capestang. Crédit photo : Association de sauvegarde du patrimoine capestanais. A droite : Un tambourinaïre et un bodegaïre entament peut-être une « carole » sur un des chapiteaux polychrome de Villardonnel . Crédit photo : JL Matte.

        

Dans le FEW le mot est classé dans les Incognita, vol.23, p.147a., mais l’auteur ajoute qu’il fait probablement partie de la famille de mots qui sont sortis d’une racine onomatopéique *bod-, ce qu’il avait fait d’aiulleurs 50 ans plus tôt dans le vol. I, p.423a : « boudego « cornemuse » Toulouse, Aude id. M. » Il a dû l’oublier.

La racine *boda le sens de quelque chose de « gonflé, renflé, lippu ». A ce groupe appartiendraient des mots comme français boudin, languedocien boudeno « ventre », occitan boudenfla « enfler », français bouder, etc. L’article *boddu FEW a paru en 1926 et ne fait pas partie des articles revisés. 1

Je pense que les représentants de buttis « tonneau », principalement ancien occitan bot et bouto « outre » ont joué un rôle important dans l’histoire de ce mot. ( Voir bout « outre, tonneau » ci-dessous. Le FEW classe le verbe boudenfla « enfler » dans l’article *bod mais boutenfla dans l’article buttis. Il est évident que dans l’evolution les deux familles de mots se sont mutuellement influencées. Il est impossible de distinguer les représentants de *bod- des représentants de buttis « sorte de vase » voir bout.

En Catalogne il y en a d’autres: El sac de gemecs « le sac des gémissements « est un des noms de la cornemuse catalane. Suivant les lieux d’autres vocables seront utilisés, dont bot et cabreta (< capra « chèvre »). Cette cornemuse possède trois bourdons pendant vers le bas. On la trouve en Catalogne nord (Pyrénées Orientales), en Catalogne sud (Principat de Catalunya), et à Mallorca, avec de faibles variantes chaque fois. El bot aranès vient du Val d’Aran, cette partie de l’état espagnol qui est en réalité de langue occitane mais qui a coutume d’utiliser également le catalan. Le bot est une cornemuse rustique qui possède au moins deux particularités :

  • – le pied fonctionne avec une anche simple (comme sa proche voisine gasconne, la boha, et contrairement au sac de gemecs).
  • – il n’a pas de bourdon, ce qui est rare pour une cornemuse… Il se joue en doigté ouvert ou fermé, en fonction de la fabrication.

 

                                                                                    Bot aranes et                                                                                       el sac de gemecs

Dans Wikipedia catalan il y a une page sur les cornemuses en Europe!

Voir aussi l’article bout « tonneau, outre ».

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  1. Pour les très intéressés il y a l’article prelat.bot(t)-; bond-/bold-; but(t)-;pott- ‘gonfiore; cavità’ dans le LEI

Bloudo

Bloudo« boue, fange » est un mot de la région de Loriol et Die (confirmé par Han Schook : bloda s.f. « boue », qui me signale que bloudo est connu dans le Diois jusqu’à Loriol d’après l’abbé Moutier, mais aussi à Bourdeau « boue liquide ») et Dieulefit « boue, fange », dans le Dauphiné.

L’origine est un dérivé du latin abluere « laver »: abluta « lavée » attestée chez Pline. Voir le LEI , qui donne les nombreuses attestations italiennes de cette famille de mots. Italien biuta « 1 miscuglio di terra, rifiuti animali e materie grasse, usato per turare buchi sui tronchi degli alberi o come intonaco 2 ( antiq.) belletto 3 ( dial.) velo di zucchero e chiara d’uovo che si spalma sui dolci per ottenere una crosta lucida ». (Sapere, un des rares dictionnaires qui contient ce mot).

D’après le LEI, albanais blutü « fleur du vin » et grec moderne mplouto « taches rouges cutanées » font également partie de cette famille de mots.

Blavet

Blavet « bleuet » est un dérivé du ancien franc *blao « bleu », cf. allemand blau, néerlandais blauw, ancien anglais blaw.

Dans le Thesoc s.v. bleuet huit informateurs de l’Ariège ont donné comme mot local le type rossignol. Comment expliquer cela? La solution se trouve dans le FEW.  L’enquêteur a dû demander « Comment appeler vous le  bleuet ? » Ces informateurs ont compris qu’on leur demandait le nom d’un oiseau.  En effet, dans quelques dictionnaires du XIXe siècle est mentionné: bleuet « martin-pêcheur » (Bescherelle 1845; voir aussi TLF).

Cette dénomination est typique pour certains parlers occitans : Nice bluiet, Aveyron, Tarn bluet. D’après les dictionnaires cités dans le FEW le bluè est dans le Gard la « mésange bleue », appelée blauet dans l’Hérault (M); dans les Bouches du Rhône le blavet est le « tarier, saxicola rubretra ».

           

martin-pêcheur                                    mésange bleue                                       tarier                     rossignol

D’autres noms du bleuet fleur : flor pèrsa (Charente); tartarièja° (Ardèche; Hte-Loire) le nom de la « rhimanthe crête de coq » (Alibert); escanapols  (Saurat en Ariège; repris par Alibert). Il faudra demander à un paysan, s’il comprend le lien sémantique. Voir le verbe escanar.
Nous ne pouvons pas savoir si les types bluet, bleuet, blaveta dans le Thesoc correspondent à la fleur ou à l’oiseau.

Pour avoir une idée plus précise, j’ai consulté le RollandFaune. Pour le domaine occitan il nous donne les noms suivants: pêche-martin (Charente); bernard pescayre (Landes); aouzel de saint Martin; bluyet (Toulouse); martin pescaire (provençal); marti pescaire (languedocien); blabet (P.O); bluet (Tarn); blavié (Nice; languedocien); bluré (BduRh); bluret (provençal, languedocien); merle picheret (Limousin).

Le corps desséché de cet oiseau passe pour éloigner les mites et les teignes ; on s’en sert dans ce but dans un grand nombre d’endroits, de là les noms suivants qu’on lui donne : drapier s.m. (Isère); arnié s.m. (Languedoc ; Hérault, Provençal); arniè (Béziers); argné (Gard); Arné (PO); Darneire (Hte-Loire); Derna (Auvergne).

Remarque: Arnié, argné arné signifie proprement celui qui préserve des arnes = mites. Les mites s’appellent: Arna, arno prov.. Darno (Tarn ); Derna Auvergne, Arda (anc.occitan). Voir article Tinea dans le vol. III. de Rolland Faune.
Autre noms : Vable dé vilo (Gard); Alcyoun Languedocien.; Alussi Languedocien seulement dans la phrase cridà coumo un alussi  » crier à tue tête.

Le « bleuet » (la fleur ou l’oiseau ??) est appelé escanapols à Saurat en Ariège; confirmé sans localisation par Alibert.

ATTENTION! Dans beaucoup de régions et notamment au Québec le bleuet est le nom de la myrtille! Le québecois est né des parlers des régions atlantiques, de la Normandie jusqu’à la Saintonge (BDP; FEW) et non pas du  français parisien.

Bleuets quebecois

Biscar

Biscar, bisquer « bisquer; avoir du dépit, pester » semble être un mot occitan, emprunté par le français. au 18e siècle.  Le FEW (suivi par le TLF) propose comme origine le nom de la province espagnole Biscaye. Il cite un texte de François de Calvi daté de 1631 qui montre que les Biscayens étaient considérés comme des larrons ou des gueux.

J’ai voulu vérifier et une fois de plus  le résultat de ma recherche sur le web a été un badobec.  J’ai tapé entre parenthèses : « Histoire générale des larrons »,   et le livre de François de Calvi, numérisé par la BNF, apparaît en première ligne. En suivant les indications du FEW, je trouve à la page 22 du 3e volume le texte cité qui montre en plus que le vocabulaire pour désigner les larrons était très riche à l’époque.

Biscaïn est attesté en occitan avec le sens  » traître » et comme adj. « acariâtre, grognon, méchant ». Le verbe biscàr  « être vexé; se fâcher, ennuyer ». A Barcelonnette un biscquet est un « petit rageur », la bisca « la colère ».

Biscave ; Biscaye ; Biscaille est aussi le nom de la prison du Bicêtre en argot parisien du XVIIe au début du XIXe siècle. Un biscaïen est un « larron ».

Un biscain est aussi une « grosse bille en marbre ». L’évolution sémantique a été : « mousquet utilisé en Biscaya » > « balle pour ce mousquet » > » balle » > « bille ». Une  belle évolution sémantique par métonymie.

D’autres étymologistes ont proposé un mot occitan bisco « chèvre » comme origine, mais ce mot n’est nulle part attesté, ce qui rend cette hypothèse impossible.

Le mot  Bribantins  dans le livre de François de Calvi est peut-être un autre exemple d’un nom de région, ici le Brabant, devenu nom commun.  Le bribantin ou brigantin était l’un des plus gros navires utilisés par les pirates.

Jean Daumas, un blog 

était un vilain petit biscaire. Il racaonte:

Bisquer :
Râler à cause d‟un quelconque désagrément ou d‟une saute d‟humeur. Quand on
était enfant à l‟école un jeu cruel consistait à entourer le plus influençable du lot à la
récréation et de lui répéter à satiété en scandant, il bisque, il bisque il bisque tout en
braquant les doigts vers lui jusqu’à ce qu‟il fonde en larme. Méchanceté gratuite
complètement absurde et ridicule !

Beleta

Beleta « belette »  est un dérivé de bellus, bella comme fr. belette.  L’étymologie de beleta n’est pas captivante. Le pourquoi du remplacement de mustela  par beleta   d’autant plus. La superstition qui est à l’origine du nom beleta « la belle » est une très ancienne histoire.  J’y consacre un long article :  moustelo  avec tous les noms de la belette en occitan.

Dans le Puy-de-Dôme beleta, bœlto, bœlœto désigne aussi le « lézard gris ».  Le pourquoi  de ce nom ne m’est pas clair.

Brau "taureau"

En Camargue  le brau est le « taureau étalon d’origine domestique » 1, mot qui a remplacé tau dans beaucoup de parlers locaux. Le sens varie suivant les localités entre « taureau entier » et « jeune taureau ».

Brau vient du latin barbarus au sens « sauvage, non domestiqué ». En ancien occitan l’adjectif  brau, brava a pris le sens  « farouche, rude, mauvais », qui d’après Mistral s’est conservé en languedocien et gascon, mais il est considéré comme « vieux ».

Le brau  est le taureau entier qui vit en liberté, dans le pré avec les vaches.  Le biòu de la Camargue est une race bovine et désigne plus spécialement un taureau castré à l’âge de un an (suivez  le lien).

Lou Brau, Reï de l’Aubrac,
se repauso i mitan de sas vachos

La dormeuse a trouvé dans le compoix de Mirepoix de 1766, le toponyme planel de Brau un terrain plat qui d’après les vieux Mirapiciens  s’appelait encore le « planel des vaches” en 1950.  Elle signale aussi un autre sens du mot brau  « une terre de limon, fertile, mais de travail difficile », soit encore un “site boueux ».  Le FEW ne nous fournit que des attestations en gascon pour le sens « marais, bourbier » et l’étymologie de ce brau  est inconnue.

Barbarus devenu bravo en espagnol, y prend à partir du XVe siècle le sens « courageux, fier ».  Bravo!  a été introduit en occitan, comme ailleurs, à partir du XVIe siècle.

Plus récent est le développement du sens de brave qui est  devenu synonyme de  « honnête, probe, sage ». De nos jours le mot devient presque péjoratif: « gentil mais un peu bête ».

L’anglais brave  signifie »courageux », mais le néerlandais braaf et l’allemand brave « sage » surtout  en parlant des enfants; le  suédois et le norvégien bra « obéissant ».

      

braaf  et brau

Voir auss les articlesi tau(r)  et biou.

  1. Voir Thesoc s.v. taureau pour la répartition géographique des types lexicographiques

Biòu

Biòu « taureau ». Utilisé surtout en Camargue. Prononcez [biàou]. Il vient du latin bos, accusatif bovem « boeuf, vache ». Pour les Camarguais une vachette est aussi un « biou » et ils respectent donc la langue latine telle que des Romains la parlaient.

le biou et le raseteur

Pour tout savoir, visitez le site de R.Domergue. Un biòulas est un gros taureau et un bioulet un petit.

Un taou(r) sert à la réproduction. Quod licet Iovi, non licet bovi. (Ce qui est permis à Jupiter, n’est pas permis à un biòu.)


Tau, taur

Tau(r) « taureau entier ». L’occitan a conservé la diphtongue audu latin : causam > causa, pausam > pausa, et taurum > taur, tau.

En Camargue le tau est le « taureau non bistourné », les autres s’appellent biòu

Un toisième type est le brau « taureau étalon d’origine domestique » (Camargue), mot qui a remplacé tau dans beaucoup de patois. Brau vient du latin barbarus au sens « sauvage, non domestiqué ». En ancien occitan brau adjectif signifie « farouche, rude, mauvais » comme substantif  « taureau ».

brau d'Aubrac

Lou Brau, Reï de l’Aubrac,
se repauso i mitan de sas vachos

Bigour

Bigour, bigornau « murex » (Alibert), « littorine » (Panoccitan). Voir plusieurs sites Wikpedia à partir de Murex. Le sens exact ne m’est pas connu, il doit varier d’un endroit à l’autre.

                    Murex                                                          Bigorneau                                                                            Murex pourpier

C’est à partir d’une glande du murex (Bolinus brandaris) que les anciens ont obtenu la fameuse pourpre de couleur violacée. Utilisée pour teindre le parchemin et en teinture des tissus. C’était un pigment très très cher, connu   dès 1600 av. JC. La pourpre  a été utilisée jusqu’au haut moyen-âge. La recette aurait ensuite été perdue.  Il faut plus de 10 000 individus pour obtenir environ 1 gr. de pigment. Couleur citée par Pline l’Ancien, M. Pastoureau, F. Brunello..Tiré du site http://www.or-pigments.com/animaux.html. Dans la page Tyrian purple , d’un autre site, il y a une traduction en anglais de la recette de Pline l’Ancien. suivie d’un cours de chimie!

L’étymologie de bigour est latin bicornis « qui a deux cornes ou deux branches ». Le sens du mot s’adapte à son environnement. En français un bigorneau  est une espèce de petite enclume , et dans le milieu des corroyeurs une masse en bois qui sert à fouler les peaux mouillées; dans le Morvan on nomme bigour un trépied pour travailler le bois.   Le bigorne est aussi  un animal à deux cornes, par ex. en Suisse « un petit escargot » en Bretagne « un limaçon de mer, comestible », en Poitou c’est « un animal fantastique à deux cornes ». Enfin on s’en sert pour décrire des défauts corporels ou psychiques: dans le Queyras bigorno « personne stupide ».