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Besal, bezaou

Besal « canal, rigole, bief d’un moulin » est un dérivé en –ale d’une racine celtique *bedu « canal, fossé ». *Bedu est un des nombreux mots celtiques dans le domaine de l’agriculture que les Galloromains ont repris aux Gaulois. Gallois (pays de Galles) bedd « tombe », breton bez « tombe » appartiennent à la même famille. En plus on le retrouve en Piémont et en Ligurie des régions autrefois habitées par les Celtes.
Si vous voulez tout savoir sur les formes piémontaises et ligures il faudra aller à Toronto, Canada,

ce qui ne pose plus de problèmes grâce à internet, pour consulter l’Archivio glottologico italiano, vol 14(1898), page 358 où Nigra discute l’étymologie de béal.

D’après les données du Thesoc, le mot besal a pratiquement disparu de l’occitan actuel : 2 attestations dans l’Ariège (« fossé; rigole ») et une dans la Creuse (« rigole »).
Deux visiteurs me renseignent : 1) « Bésal = canal d’arrosage était (est ?) le mot utilisé pour désigner les canaux situés dans la partie haute des près servant à les arroser dans la région de Brassac (Tarn).   Le mot y a pris un sens spécifique. 2) besal: il y a à Siran-34 un tènement « le Béal » sur la rive gauche de l’Ognon le long d’un ancien « besal » qui alimentait un antique moulin à eau devenu tannerie au XIXe siècle. Ce moulin est porté sur la carte de Cassini sous le nom de « Mn Siran ». Voir aussi un site Le Béal concernant la commune d’Ollioules ( Var) : « 1825 : Le Béal n’est pas à la charge de la Commune , mais à celle des arrosants et des usiniers . »

Un troisième visiteur me renvoie vers Frank R. HAMLIN, Toponymie de l’Hérault Dictionnaire Topographique et Etymologique, éd. du Beffroi, Etudes Héraultaises, 2000, XLII + 449 pages, qui donne plusieurs toponymes héraultais. Lui-même a entendu le mot « béal » utilisé pour un petit canal parallèle à un ruisseau au domaine de Saint-Ferréol (commune de Nizas), ce canal alimente une « pansièira« , une réserve d’eau. Il devait y avoir là un moulin.

Pourtant d’après le FEW il y a de nombreuses attestations dans les dictionnaires dialectaux anciens, surtout pour les parlers franco-provençaux et occitans, et cela depuis le Moyen Age : ancien lyonnais: bessal « canal, endroit creux », ancien occitan bezal ‘bief d’un moulin; rigole ». Dans certains dialectes provençaux et surtout en franco-provençal, le -z- intervocalique est tombé (comme dans asinus> ase > ay ) et le résultat a été une triphtongue: Marseille byóu « fossé d’écoulement ». Presque partout et cela depuis les copains d’Astérix le sens est resté « rigole ou canal d’arrosage ».

L’abbé de Sauvages écrit : bezaou ou boutado, le bief d’un moulin et non pas béal qui est un barbarisme.

Une page poétique est consacrée au Béal du moulin de Mirepoix (Ariège), dans le blogue de la dormeuse: « Du Contirou au pont de Raillette » et avec beaucoup de photos prises pendant une promenade Du Pont de Raillette au moulin.
Dans une nouvelle promenade au chateau de Bonrepos à Bonrepos-Riquet, elle raconte que Pierre Pol Riquet, …Instruit par l’observation du Béal à Mirepoix, ….il conçoit le projet d’utiliser les eaux de ruissellement pour assurer par dérivation l’alimentation de son futur Canal [du Midi].

besal

Canal du Midi

Bes

Bes, beç « bouleau » est d’origine celtique *betw- « bouleau ». Il a été conseré sous différentes formes en galloroman. La forme occitane et franco-provençale repose sur la forme *bettiu. La première attestation vient des archives départementales de la Creuse: elle est tiré du cartulaire de Bonlieu.

bes

Plusieurs dérivés sont formés à partir de *bettiu : vesou (Gard), bessou (limousin, M), bessoillado « lieu planté de jeunes bouleaux ».

Une dérivation de la racine celtique *betw- > *betullu est à l’origine des formes bedout, bedouk attestés en gascon, espagnol abedul et un *bettullu ou bettulla des formes avec maintien du -t- comme Barcelonnette betoul (s.m.) et ancien occitan bethoule (s.f.), italien betulla. La forme feminine s’explique comme un pluriel à l’origine de *bettullu « bouleau » > bettulla « bouleaux, ou plantation de bouleaux » qui a été utilisé comme un singulier. Il y a une grande quantité de toponymes surtout dans l’ouest. Pour les formes occitanes modernes, voir Thesoc.

Bernado

Bernado, bernada « mante religieuse », vient du  nom propre germanique Bernhart latinisé en Bernardus. En ancien français nous trouvons dès le XIIIe siècle l’adjectif bernart avec le sens  » sot, niais, nigaud », sens conservé en occitan. (Mistral). L’origine de cette signification est peut-être le nom Bernard, l‘âne dans le Roman du Renard qui date du XIIe-XIIIe siècle, mais le contraire est aussi possible. Asinus signifiait déjà « stupide » en latin: voir ase.

En occitan Bernat (problement de Saint Bernard de Citeaux, cf.TLF), a été donné à plusieurs animaux: bernat-pudent « tout animal exhalant une mauvaise odeur »(M), rat-bernat « grimpereau » (Aveyron) et Languedocien bernat-l’hermite « pagurus bernhardus », qui est passé en français. Le qualificatif d‘ermite est dû au fait que ce crustacé vit toujours solitaire et s’installe dans un coquillage comme dans un ermitage (TLF).
Enfin dans la Drôme, la voie lactée s’appelle tsami sen Bernar. Si vous connaissez la raison de ce nom contactez-moi. Merci d’avance.!

 

Beluga, belugue

Beluga, belugue « étincelle » . Un dérivé de languedocien belé « éclair, éclat de lumière » et le verbe belejá « éclairer, briller comme l’éclair ».   Von Wartburg pense à un celtique *belos « clair, brillant ».  Le 1er mai, les païens irlandais faisaient un grand feu dans lequel ils  brûlaient du bétail, c’était le bel-tene. Le mot anglo-saxon bael signifie « feu ».

Une beluga  sur la page de titre de mon guide pratique pour ceux qui veulent apprendre à  tailler des pierres précieuses et fines (sauf le diamant !)

La taille des pierres précieuses et fines

Dans le Lessico Etimologico Italiano   s.v. belluc-vous trouverez  l’etat actuel des recherches étymologiquesBeluga  appartient à une famille préromane ballūc-/bellūc-;pallūc-; barlūc- qui signifie « brillant »

Si vous cherchez « bael + fire » sous Google vous trouverez plusieurs sites anglais. Bael est aussi le nom d’un démon, du diable.
Sur beltane j’ai trouvé sur internet :

Beltane was a day representing many things to the Celtic people. It was the second of the four fire festivals. To most it celebrated the sun God, Baal(British)/ Bel(Irish)/ Beli(Welsh)/ Belanos(Pan-Celtic), although the sun appears to have been originally revered as a goddess. Bel means bright or shining and there is no sexual distinction attached to it. The Gaelic nouns for the sun are still female. In Wales, Rhiannon, who is also a solar deity, would come back from the land of the dead/winter on this day. In Scotland, the Seelie Court arrives and takes control back from the Unseelie Court.

Dans le Tarn-et-Garonne vous trouverez La belugueta de TG’OC : un nouvel outil de promotion de la culture occitane . “Tarn e Garona occitan / Association Frédéric Cayrou” vient de créer, avec le soutien d’Autriche et Pays d’Oc cet outil simple et remarquable à la fois : la belugueta de TG’OC, la petite étincelle de Tarn et Garonne occitan.

Bailé

Bailé « agent domanial; métayer » voir bayle

Bedigas

Bedigas « esprit épais, niais, bon enfant; mouton d’un an » aussi bedigo, bedet, bedig. Le sens « mouton » est attesté en wallon et en occitan. D’après le premier volume du FEW, p.312 l’étymon pourrait être une onomatopée *bed-, (pronncé  bèèèèèd) mais il ajoute que peut-être il faut partir du verber béer < badare, ou de belare.  Les nouvelles versions de ces deux verbes n’ont pas inséré bedé, bedigas dans ces articles, pour des raisons d’ordre phonétique.

Dans le Thesoc vous trouverez encore 12 attestations de bedigo, beligo « brebis » dans les Bouches-du-Rhône, le Gard et l’Hérault. Mon témoin pour Nîmes me dit que bédigas « niais » y est très courant. Voir aussi l’article Buòus, bedigas e aventuras ! dans le site du FFCC. A Montélimar : Bédigas, (asse) n.m « bête, niais »; Bédigue n.f « vieille brebis ». (Source). D’après le Thesoc bedó (Gordes, 84) et bedan (Puy-de-Dôme) désignent le « bélier », qui sont probablement de la même famille que bedá « bêler, crier des chèvres et moutons » attesté à Laguiole (FEW Incognita, XXII/1, 283b) .

traduction

Dans le volume XX/1, 286a du FEW je retrouve une variante biliga « brebis »(Clermont) et beligo (Millau) et un renvoi vers le formes beligua, beliga(t) « niais » dans la région de Die, Romans, confirmé par Schook qui donne en plus beligassas « grand idiot ». Je crois que le sens de base est « brebis, mouton ou agneau », d’autant plus que du point de vue sémantique l’évolution « mouton, brebis » > « niais, imbécile » ne pose aucun problème, l’inverse doit être rare.

Dans l’Aveyron beligas s.m. ou beligasso s.f. est le nom de la « clématite ». Ce beligas avec bedigano « sarment de lambrusque dont on fait des cannes » (Alès) et ancien occitan vedigana « bâton de vigne, tige de lambrusque (Arles 1428) est rangé comme dérivé dans l’article vitex, -icis qui a donné veze, vedze « osier » en occitan, encore vivant dans quelques départements, voir Thesoc « osier » >vege.
Le seul lien éventuel que j’ai pu trouver entre les deux sens de bedigas, beligas 1. brebis et 2. clématite est le fait que le mot vitex ne désigne en latin pas quelconque osier mais spécialement le vitex agnus castus « le saule de l’agneau chaste » appelé aussi le « poivre des moines » ou « gattillier » en français. (Il est encore utilisé de nos jours dans la naturopathie, mais avant de vous en servir lisez  cet article de l’INRA.) La plante est indigène autour de la Méditerrannée.
L’agnus castus était certainement largement utilisé au Moyen Age aussi bien dans les abbayes comme « poivre » pour les moines (les moines mâchaient les baies pour calmer les tentations de la chair) qu’à la campagne comme « osier » par les paysans. Le TLF cite une source selon laquelle les fruits du gattilier ont été pendant longtemps employés pour remplacer le poivre ; voir le mot pebre
J’ai le sentiment que,  d’une façon ou d’une autre, le nom de l’ agnus castus bediga,beliga a été tranféré à l’ agnus l’animal > beliga.

Le TLF cite une explication étymologique du nom gattillier : ….et d’un dérivé de gato (chat*) à cause de l’aspect doux et velu des fleurs de cette plante (Corominas). Un agneau est aussi doux et velu !

          
agnus castus                              baies                          sculpture en clématite sauvage

          
bedigas
 de Camargue

Dans la Grèce antique l’agnus castus était associé aux Thesmophories, une fête organisée en l’honneur de Déméter, la déesse de l’agriculture, de la fertilité et du mariage. Les femmes (qui restaient « chastes » pendant la fête), utilisaient des fleurs de l’agnus castus comme parure, et des branches, des tiges et des feuilles étaient éparpillés autour du temple de Déméter . À Rome, les vestales portaient des tiges de l’agnus castus comme symbole de chasteté. Selon la mythologie grecque, Héra, sœur et épouse de Zeus, considérée comme la protectrice du mariage, est née sous un agnus castus. Les traditions anciennes associant l’arbuste à la chasteté ont été adoptées dans le rituel chrétien. Des novices qui entraient dans un couvent marchaient sur un chemin jonché de fleurs de cet ‘arbre, un rituel qui existe jusqu’à aujourd’hui dans certaines régions d’Italie

Babune

babuno « petite pluie, bruine » voir bavard

Bavard

Bavard, babard. Attention aux faux amis : bavard (pr. babart, féminin babardo) signifie aussi « orgueilleux, -se ». Pour Mistral bavard signifie 1. bavard 2.fanfaron. L’évolution sémantique de « bavarder » > « fanfaronner » ou « se moquer » ou « mentir » se trouve un peu partout dans le domaine galloroman. Le premier sens, « bavard » a même dû se perdre dans certains parlers. Voir le Thesoc, bavarder pour constater qu’il n’y a que trois ou quatre villages où l’on a donné le type bavarder.

L’étymon est une racine*baba « bave », qui a donné le dérivé babar « baver », et comme sens secondaire en occitan bavuno, babuno « petite pluie, bruine » et au figuré bava(r) « dire son secret », bavardà.

Batudo

Batuda, batudo « demi-journée de travail ».  En provençal « séance de travail entre deux repas », ce qui revient  au même.  D’après l‘abbé de Sauvages batudo est un terme de tireur ou fileur de soie « la quantité de cocons mise en une fois dans le bassin et remuée avec le balais à battre ». Une spécialisation sémantique.

Dérivé du part. passé battuta du verbe latin battuere, « battre ». L’idée de base doit être « le travail qui est fait d’un seul trait ».
Une évolution sémantique comparable a eu lieu dans le mot français coup dans des locutions comme être dans le coup, d’un seul coup, etc.

Basseler

Basseler « chauffer, surtout un lit » fr.rég.(And) est un dérivé du latin*baccinum« bassin », dont le sens s’est spécifié en « bassin pour chauffer le lit ».