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Galobet, galoubet

Le mot galobet, galoubet « flûte qu’on joue en s’accompagnant du tambourin », a une étymologie qui va plaire aux amateurs de cet instrument de musique régional.

tambourinaire
Un tambourinaïre et un boudegaïre , bodegaire,  sculptés sur un des chapiteaux polychrome de Villardonnel dans l’Aude, entament peut-être une « carole » . Crédit photo : JL Matte.  Ce chapiteau daterait  de 1528

                

Dans le site  Zictrad vous trouverez une description exhaustive de cet instrument, des différents noms en Europe, etc.  et même quelques propositions étymologiques,  qui sont  un peu fantaisistes à vrai dire.

Dans le plus grand dictionnaire étymologique de l’occitan, le FEW de Walther von Wartburg, le mot galoubet se trouve parmi les mots d’origine germanique, plus spécialement le mot gotique galaubei « objet précieux » qui est  l’étymon de l’ occitan galaubia ou galaubei « magnificence, largesse » et le verbe galaubiar « agir bien ». On les  trouve dans un des Cansos de Giraut de Bornelh, un trobador limousin de la fin du XIIe siècle  et  chez le trobador périgourdin Arnaut de Mareuil, , qui se sert de  l’adjectif galaubièr «  triomphant avec éclat; gracieux « . Von Wartburg pense que le nom de l’instrument est dérivé du verbe galoubar ou galaubar « jouer magnifiquement ».

Le mot galoubet est mentionné pour la première fois dans le Dictionnaire provençal et français de S.A.Pellas, 1723, qui  représente surtout le patois d’Aix-en-Provence.

D’après certains le mot gotique galaubei appartient à la même famille que l’allemand moderne Liebe « amour », ancien allemand liob, le néerlandais lief  « gentil », le russe liubiti, le latin libens et libido, etc., mais cela reste à vérifier.

Fa

Fa note de musique. Voir TLF pour une définition précise. L’étymologie est : lapremière syllabe du mot latin famuli, au second vers de l’hymne de St Jean Baptiste de Paul Diacre, choisie arbitrairement par Gui d’Arezzo [995-1050] pour désigner la note de musique. Pour plus d’info suivez ce lien.

Dans la majorité des sites qui expliquent les noms de notes on  donne le texte mais pas la musique. C’est la raison de l’insertion de cet article.   J’ai donc fait un scan de mon  Liber Usualis  et corrigé la place de la clé de do. (Il faudra la baisser un peu sur la deuxième portée)

Le si  a été ajouté plus tard. Le ut  par  do,  parce que plus facile à chanter.

 

Giga 1 et 2

Giga 1  « Air de danse; corde qui relie deux parties d’une antenne; instrument de musique ancien ». (Alibert) Giga 2  « jambe et cuisse; cimier de boeuf; gigot; longue jambe. . Si vous comparez les deux images ci-dessous et si vous noter en plus les dates des premières attestations des mots  giga 1   au XIIe siècle, giga 2  au XVe siècle

        

                                                                         XIIe siècle                                                                        XVe siècle

vous comprendrez que le  sens de giga 1 doit être à l’origine de giga 2  et qu’il s’agit du même mot. Les dates des premières attestations sont importantes pour comprendre l’histoire d’un mot aussi bien  du point de vue phonétique que sémantique. L »origine est l’ancien haut allemand giga « gigue » un instrument à trois cordes, Geige « violon » en allemand moderne , qui a été introduit en Gaule par les musiciens ambulants à une époque ancienne, probablement pendant les Carolingiens (750-1002).

Au XVIIe siècle on a formé en français  le couple gigot /gigue « cuisse » sur l’exemple du  couple  cuissot « gigot de chevreil » / cuisse.

Gigue « cuisse » > « longue jambe ». En occitan c’est gigo, digo en limousin, gingo en languedocien qui d’après Mistral signifie 1) gigue, cuisse; jambe et cuisse; gigot. 2) l’ancien instrument de musique; danse. Mistral donne l’adjectif giga(t) « qui a des gigues, haut sur jambes », gigado « enjambée » et gigasso « longue jambe », mais il n’y a pas beaucoup d’autres attestations en occitan.

Bien avant, aux XIVe-XVe s., ont été créés deux verbes: giguer « gambader, frolâtrer » et ginguer « ruer » en parlant d’une bête. Les deux verbes et leurs dérivés ont en général des sens péjoratifs. Provençal ginga « gambader, sauter, courir » (M.) « se débattre des 4 pieds, d’un animal renversé » (Aveyron). De là est dérivé le substantif ginga « jambe » en languedocien.

Voir encore le néologisme geek « fou »

Enco

Enco « cannelle, anche, bobine, cannette, canule, robinet)  » enco de bouto kë tiro « la canelle d’un muid qui est en perce ou en vuidange » (S). et son dérivé enkie « le trou de la canelle ou de la fontaine d’un muid » (S). Voir encore les expressions à la fin de l’article.
Les attestations  ne remontent  pas très loin dans l’histoire. Les premières datent du XIVe siècle dans le Vaud  (Suisse). L’étymologie  n’est pas tout à fait la même que celle du français anche: « Emprunté à l’ancien bas francique. *ankya «canal de l’os » (acien haut allemand ancha, ancho et encho « jambe », d’où, en français, les sens de « conduit, goulot, embouchure ». Pour l’ancien haut allemand , voir le dictionnaire de Koebler, s.v. anka. Néerlandais enkel « cheville » vient d’un dérivé de anka , ankala « articulation ». Plus de renseignements sur français anche dans le TLF.
L’image montre qu’un bon bricoleur peut en faire une enco sans poblèmes.

La forme occitane et franco-provençale, avec en- et non pas an-, ne peut pas avoir *ankja comme origine. Le FEW explique cette forme en supposant une origine burgonde pour le franco-provençal et une origine gotique pour l’occitan :*inka. Dans ce cas l’emprunt a dû se faire très tôt en franco-provençal et en nord occitan, avant l’évolution ca > tch-, ch- (VIIIe siècle).
Le mot a dû être employé régulièrement en languedocien du XVIIIe siècle, puisque l’Abbé de Sauvages donne plusieurs expressions comme ana coum’ un’ enco « aller souvent à la selle »; et au figuré lou fai ana coum un enco « il ne le ménage pas, il le fait charrier droit » (S2).

La forme encho ou inche « anche d’un hautbois » (S2) a été empruntée, peut-être au français. Pour le savoir il faudrait se lancer dans l’histoire des instruments de musique. Environ 3000 ans avant J.C. les Chinois ont inventé des instruments de musique à anche.

Canorgue, canonge

Canonge, canorgue « chanoine; désoeuvré, mendiant », canorga « chanoinie » (A), La Canourgue (Lozère) repésente l’adjectif latin canonicus qui a été substantivé à partir d’expressions comme dignitas canonica. Une premère attestation provient de Nîmes cannonegue (1175) , plus tard canorgue à Avignon, Toulouse, Albi etc. toujours avec le sens « chanoine ». Le chanoine avait droit à des revenus de certaines terres qu’on lui payait annuellement. J’y reviendrai.

Canonicus est un dérivé de canon « règle » que les Romains avaient emprunté au grec. Le sens règle s’appliquait surtout en musique, à savoir à la monochorde, un instrument constitué d’une caisse de résonance et d’une corde unique sous laquelle coulisse un chevalet.

Le monocorde en tant qu’instrument expérimental est resté célèbre depuis que Pythagore a fait la démonstration que la hauteur du son est inversement proportionnelle à la longueur de la corde. Pythagore remarque qu’en plaçant le chevalet au milieu de la corde tendue donc en divisant celle-ci en deux, la corde en question donne alors l’octave supérieure du son initial ; de la même façon, ‘en plaçant le chevalet au tiers de la corde donc, en divisant celle-ci en trois , la corde en question donne alors le redoublement de la quinte supérieure du son initial ; etc….  cela devient de la mathématique…. Nos notes, do, re, mi etc.proviennent de cette trouvaille de Pythagore et c’est pourquoi la musique chinoise par exemple qui ne connaît pas cette division des sons, est tellement étrange pour nous.

Revenons à nos moutons. Le mot canon a pris différents sens suivant le domaine auquel il s’applique. Pour les jurisconsultes le canon signifiait « relatif à l’impôt annuel ». Le canorgue est un ecclésiastique qui a droit à l’impôt annuel. Il n’avait donc pas beaucoup de travail, de là le sens « désoeuvré ». Il y a beaucoup de toponymes Canonge, Canourgue, etc. Voir par exemple sur la carte Cassini ( cf. s.v. Toponymie.), Voici un extrait de la région Manduel/Rodilhan avec  Canonge  au nord de Rodilhan.

Carte Cassini

Le peuple confond tous ces noms des ecclésiastiques : capelan, curé, pasteur, moine, abbé, chanoine etc. Je pense qu’un moine mendiant a partir d’une certaine époque a été confondu avec un chanoine. Voir aussi les 3 articles canon dans le TLF

         
un canorgue                                            La Canourgue