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Mazet, maset, mas

Maset « petite maison de campagne, petite ferme; maisonnette rustique où l’on va passer le dimanche » est un dérivé  en –ittu de  mas « ferme, maison, demeure ». D’après les dictionnaires de français, entre autres par Littré, ce dérivé est caractéristique pour la région de Nîmes – Avignon. Un visiteur me signale le sobriquet mazetié pour les Nîmois qui allaient chaque dimanche dans leur mazet‘. Cette photo vient du site de G. Mathon qui consacre une  page intéressante au maset nîmois.

Lou Maset du Jardin de la Fontaine

L’origine est le participe passé mansus du verbe latin manere « rester, habiter » qu’on trouve comme substantif dans des textes et des inscriptions depuis le Ve siècle avec le sens « maison  » et « domaine ».

Le mot a également existé dans le nord de la France, comme en témoignent de très nombreux noms de personnes (Dumas, Delmas) et de noms de lieu (Metz, Meix, Mas), mais il y a perdu beaucoup de terrain depuis la disparition du système féodal concernant la propriété (un sujet à approfondir!) Mas n’est vraiment indigène que dans le Midi, où il s’est maintenu jusqu’à nos jours avec le sens « ferme ».  Il faut dire que les agents immobiliers  en abusent depuis que les prix ont flambé.

En français il a été emprunté à l’occitan au XIVe siècle.

Le  mas du Valdeyron à Valleraugue où j’ai habité pendant 20 ans

Autres dérivés: masada, masaria « tour d’une ferme, hameau »; masatgier « campagnard »; masièr, masièra « qui habite un mas »; masuc « petite construction montagnarde où les bergers d’Auvergne s’abritent et font leurs fromages en été »;  masagé « campagnard  » forme rencontrée par un visiteur dans un état civil du XIXe siècle de la région d’Albi : masagé de Rafialou, d‘Ambialet.

Mauro

Mauro « truie » du latin maurus « habitant de l’ancienne Mauritanie, le royaume berbère, qui à l’époque romaine s’étendait de l’actuelle Tunisie jusqu’à la rivière le Moulaye au Maroc.

En  ancien provençal mor, moro  signifie « africain adj. et subst. ; musulman » et « basané, marron, noir ».  En occitan moderne moure , morou (Alès) c’est le deuxième sens qui s’est maintenu et développé:  A blanchi un moure se perd soun tems et soun saboun (Mistral). Aoc. maur « noir » est attesté en 1240 et la Roca Mauro près de Carcassonne  déjà  en 1034.  Il y a de nombreux dérivés comme lang.  neit maurello « nuit sombre » et Gard agneu mouret « qui a le poil noir »(M). A Valleraugue (30) La Jasse du Mouret , toponyme.

Le sens « brun, noir » a été transféré sur toutes sortes d’animaux et de plantes, comme « truie, vieille truie » (Hérault), provençal  mouret  « sagre, poisson de mer »,  des salamandres, têtards, canards, oiseaux, insectes et des noms de plantes  comme languedocien mouro « variété d’olea europea sativa » Nîmes 1793, et oulivié mourau (M). Ce dernier  est même entré dans l’ Encyclopédie de Diderot sous «  moureau  en Languedoc ». Il y a aussi les morilles et les cerises morelles

             

comme en  néerlandais  morellen  et moriaan « père fouettard, un serviteur noir qui accompagne St. Nicolas lors de sa fête le 6 décembre). Anglais morel « morille ».  Le maïs et le sarrasin est appelé blamauro à St André de Valborgne, et il s’appelle blasarrasin  en gascon.

Mièg, mièja, meg

Mièg, mièja, meg  « moitié, demi ; barrique »  vient du latin medius « qui est au milieu; demi » , comme français mi dans mi-août Voir TLF.   

Dans le Thesoc je trouve mièja avec le sens « barrique » dans quelques villages de la Corrèze.   Alibert donne  le substantif la mièja avec le sens  « la moitié de quelque chose », et les deux sens sont certainement liés, comme en français « un demi » attesté depuis 1895 est un « grand verre à bière qui à l’origine contenait un demi-litre » (de nos jours c’est la moitié d’un demi litre ! et le prix a doublé.).

un vrai  demi de 0,5 l

 

Le sens « moitié de quelque chose » est attesté en occitan et en franco-provençal depuis 1300. Dès 1350 l’ancien occitan mega est une « mesure pour le grain » et depuis 1570 une « mesure pour le vin ». Après l’introduction du système métrique la mièja est devenue une « ancienne mesure pour le vin » qu’on utilise encore mais dont le contenu varie d’une « chopine, demi-pot, demi-bouteille » (en Provence), 90 cc  à Alès,  à une barrique de 100 litres à Castelsarrasin, ou à une « tasse de café » à St-Sernin-sur-Rance (Aveyron).

Dans un traité de 1484 entre l’abbé supérieur Pierre de l‘abbaye Psalmodi et le village de St-Laurent-d’Aigouze (Gard), près d’Aigues-Mortes,  nous trouvons l’expression le droit de miège « le droit de la moitié ».  En Suisse existait la possibilité de travailler à la mie  ce qui voulait dire  qu’on   » recevait du propriétaire la moitié des produits et du bénéfice ». Cela ressemble à un programme politique. En ancien occitan le fermier qui partage avec le propriétaire de la ferme les produits de la récolte s’appelle mejers, mejer. Le mot a été emprunté par le français : mégier (Ac 1845), méger (TLF), synonyme metayer (<medietarius ). En occitan moderne megièr, miegièr. 

Dans la toponymie nous trouvons des mas Méjan, Méjannes, Mège que Pégorier traduit par « qui se trouve au milieu », mais c’est plutôt la métairie, comme le nom de famille Meyer est le « métayer ».

Voir aussi l’article Faire mietchoun  « faire la sieste » de la dormeuse.

Commentaires:

Olivier m’écrit: tres e mièja « trois heures et demi »; lou miech  « le milieu »;  miech-hora « midi ». Le  terme mitat est également employé pour exprimer la moitié dans des contextes différents

des mieja :      
à St-Sernin-sur-Rance               à Castelsarrasin                                                               la calanque de Mejean

Naut

Naut « auge » est attesté dans la Hte Garonne en 1535.

Dans l’article *nau-to « auge, trou creux dans le terrain », un mot gaulois, le FEW a rassemblé un petit nombre de dérivés, comme náwto « récipient pour les graines; petite vallée » (Lanne-Soubiran), nautolo s.f. « grande auge portative », dispersés en occitan et en franco-provençal.

Le féminin de la racine *nau- : nava existe encore en espagnol nava « cuvette dans un terrain » et dans de nombreux toponymes en Espagne, France et le Nord de l’Italie. Français : Nave « combe, vallée » (Pégorier).

Le cirque de Navacelles

Peut-être y a-t-il un lien avec nau  ou nauc.

Fau, fag ‘hêtre’

Fau « hêtre », fag en gascon. D’après le Thesoc on trouve en Occitan les types suivants: fag, fajàs, faja (Aveyron seulement), fau, fayard, fayau, feinard, hêtre pour désigner le hêtre. Les types fag et fau sont les plus répandus, fag en Gascogne, fau en languedocien. Il s’agit d’une différence d’évolution phonétique. L’étymologie pour les deux est  fagus « hêtre ».

Le type fagus > fau, fag  est concurrencé par l’adjectif dérivé fageus, -a qui donne faja, fajo « 1.faîne; 2. hêtre » en occitan,  fajo « forêt de hêtres » . Voir Thesoc.s.v. faine. Le masculin fageus est devenu hay « hêtre » en béarnais.

Les représentants de fagus sont très fréquents dans tout le domaine gallo-roman comme toponyme. Voir à ce propos Pégorier. et pour le Gard Germer-Durand. Un dérivé : Fageda « hêtraie », fagede dans le Compoix de Valleraugue1 .

Excursion dans le domaine d’oïl. L’évolution phonétique de fagus en français > fou a créé un problème, même si un fou < fagus ne peut pas être (un) fou < follis  » « soufflet pour le feu; outre gonflée; ballon; bourse de cuir ». Ce follis employé comme adjectif a pris à basse époque  le sens de « idiot, sot » (TLF). La forme  follis  est devenue fou, folle  en ancien français. Fayard dérivé de fou < fagus est considéré comme français par le Thesoc, mais régional, franco-provençal par le TLF fayard .

Je ne crois pas  que cette homonymie en soit la cause, mais  fou « hêtre »  a été remplacé dans le Nord par hêtre. Je cite le TLF avec quelques changements typographiques : 1301 hestre (doc. ds Gay). De l’ancien bas franque *haistr (cf. néerl. heester « arbuste »), dérivé , à l’aide du suffixe -tr, servant à former les noms d’arbres (cf. apholtra), du radical de *haisi « buisson, fourré » qui est entré en gallo-roman sous trois formes différentes (v. hazier). *Haistr est devenu roman plus tard que haisi et haisia (v. hazier), de sorte que ai y était devenu e. Il a éliminé l’ancien français fou (v. fayard, fouet) désignant les grands arbres, tandis que hêtre était le nom donné aux jeunes troncs qu’on coupait régulièrement et qui repoussaient généralement sur les souches. Cette distinction s’est perdue par la suite et hêtre, remplaçant fou, a fini par désigner l’arbre adulte (b).

 

       
fau
              et                      faja

Voir l’article Wikipedia pour en savoir plus.

  1. Supprimé du site généalogique et devenu introuvable.