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Abes, àbet

Abes, àbet s.m.pl. « balles de blé ou d’autres céréales » (St-Pons, Capestang), abets (Aude, Toulouse), a(w)ets (Hte-Garonne). L’accent est sur le a-.Plus deeee formes dans l’article apex FEW XXV,6 L’origine est un mot latin apex, apicem  « sommet, pointe, tout objet de forme conique ». Les attestations sont relativement rares, une vingtaine, et étendues sur une région qui va de l’Hérault au Gers, auxquelles s’ajoutent probablement les mots basques abotz « criblures » et agotz « balle de blé ».1

Grâce au commentaire d’un visiteur,  une attestation  de l’Ariège  et une correction importante du sens. Ci-dessous une image d’ abets sur l’andain, et d’autres de balles d’épeautre et de blé :

 abets sur andain              balle d'épeautre     balle de blé Les balles  volent!

Je me demande toujours comment il a été possible qu’un tel mot latin avec un sens très spécifique a été transmis de génération en génération pendant 20 siècles, dans des villages qui sont tellement éloignés les uns des autres. Mais il est possible que des attestations nous manquent. Si vous connaissez le mot, contactez moi.

Claude Achard2  a eu la gentillesse de me contacter :

Abets : « Les faibles seront aux abets, c’est-à-dire la balle et les barbes qu’on emporte par gros ballots fort peu pesants » Raymond Escholier, Gascogne.p. 68.
“Àbets, abë, balles de céréales, vannures ; balle de grains, menue paille ; ballot de fourrage ; l’abe dou blad, la balle du blé, celle de l’avoine, voy. poussës ”. (DOUJAT, 18 ; LAGARDE, 21 ; CANTALAUSA, 30 ; de SAUVAGES, I.3 ; MISTRAL, I.6. GARY, 2 ; VESTREPAIN, 303 ; ACADEMIA, 3). Aver la clau dels abets, avoir la clé des menues pailles, ne pas être l’homme de confiance à qui on confie la clé du grenier à blé. (ALIBERT, 65).

Le mot apex a été réintroduit dans le milieu des paléontologues pour désigner le sommet des coquilles de certains fossiles, comme les ammonites. Je vois dans le TLF que cette remarque est la conséquence d’une déformation professionnelle et que apex a beaucoup d’autres significations.

                              

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  1. Le spécialiste du basque, M.Morvan, m’écrit :  « Que abotz et agotz soient apparentés en basque cela ne fait aucun doute (alternance b/g classique). En revanche il est plus difficile de les faire venir du latin apex « sommité », sans que ce soit impossible. Le passage du e latin à o basque n’est pas évident, mais ne me choquerait pas trop.  »
  2. Auteur de Les uns et les autres. Dictionnaire satirique pour le département de l’Hérault er quelques contrées d’Occitanie. Ed.Dolmens, 2003. 742 p.

Abalhar ‘gauler, abattre les noix’

Abalhar « gauler, abattre les noix ». D’après le Thesoc abalhar est courant dans les dép.19, 24, 46, 47, 82; abalhaire « celui qui gaule », seulement en Dordogne. L’étymon est le latin baculum FEW I,201 baculum « bâton », qui s’est conservé uniquement chez les Ch’ti (mi), baille « barrière » (Flandres, Rouchi, Picard). En occitan existe aussi  le verbe  dérivé abalha « gauler » dans les départements indiqués du sud-ouest.

A Colognac (Gard) a été relevé bacular « suisse, bedeau » nommé ainsi parce qu’il portait la crosse, le bâton de l’évèque. C’est un emprunt au latin d’Eglise bacularius « bedeau », ailleurs en occitan « homme inepte, jocrisse »  d’après Mistral. Voir ci-dessous:

Français baguette   emprunté à l’italien , a la même étymologie.

abalhaire bacular bedeau      

FEW I,201 baculum

Abajon

Abajon s.m. »airelle myrtille » abajou, ajou (Béarn), anažoun (Aran1 ). Dans les lexiques locaux l’ abajou est toujours défini comme « airelle ». Il est conservé principalement dans les parlers gascons 2 et  de l’autre côté des Pyrénées en aragonais anayón, Rioja enavia, et en catalan abajo, nabiu, nabis. L’étymologie serait le mot basque anabi devenu abi suite à la chute du -n- intervocalique. Le type *anabione devenu ababione par assimilation est à l’origine des formes comme abajou. Abajèro (Mistra,l voir l’extrait) est un dérivé. FEW XXIV, 32a

On peut dire qu’il s’agit d’un mot fossile. Comme toponyme anabi apparaît depuis 835 : pagus Anabiensis aujourd’hui Vall d’Àneu. En basque on trouve les mots correspondants : abi, anabi, arabi, ahabia, afi « airelle myrtille ».

              Mistral    airelle myrtille                                                                                                  Mistral

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  1. Le type avec un -n final n’apparaît que dans le Val d’Aran.
  2. voir le Thesoc s.v. airelle type avajon. Vous constaterez une grande variété des formes locales

Langrola ‘lézard’

Langrola s.f. « lézard gris ». Ll’étymon de langrola  est le latin  languria, attestée chez Pline1Langrola ne se trouve en occitan qu’à l’ouest du Rhône, pourtant le mot  langrola se retrouve dans le Nord de l’Italie où il désigne  le lézard vert. Un résumé des différentes étymologies proposées se trouve dans une étude de Giovanni Soleri que vous pouvez consulter sur le Web. Notre langrola y est mentionné  sous la forme angö (n° 8a) et angureta (n° 8c).

Entre ces deux zones domine le mot provençal lagramuso, larmuso, et  au Nord le type français lézard.

Dans les formes languedociennes la suite lang- a souvent été remplacée par leng-, ling, par exemple à St.Jean-du Gard aringolo, sous influence de lenga (< lingua) « langue », parce que le lézard attrape les insectes avec sa langue rapide. On trouve aussi la forme avec métathèse rengloro (S); à Nîmes et ailleurs le l- a été pris pour l’article défini ce qui a donné : angloro, Millau engrouólo.

langrola

Le Thesoc donne pour le Gard et beaucoup d’autres départements comme type engrisòla. Avec chute de en- , considéré comme un préfixe, cela a donné  p.ex. à Mende grizolo. Mais engrisola est une forme provenant d’un sous-jacent (en)grousolo où le –grou- a été remplacé par –gris- par étymologie populaire, l’engrousolo étant gris. (En)grousolo vient d’ engrolo, angrola 2,  par changement de suffixe d’ engrolo qui avait perdu le l- initial pris pour l’article défini.

Etymologiquement parlant  grousolo fait partie de la famille languria.  La suite des formes pourrait être :  languria > langr + ola > l’ engrola > engrola > engro + sola > engrousolo > engrisolo > grisolo. Voir le Thesoc pour les nombreuses variantes et les autres mots.

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  1. alios id dicere langurium et esse in Italia bestias languros. Zenothemis langas vocat easdem et circa Padum iis vitam adsignat » Nat. Hist. 37,34
  2. Une visiteuse italienne m’écrit qu’elle est étonnée de trouver  son nom de famille Angrola  dans mon site.  Des recherches généalogiques permettront peut-être de retrouver ses ancêtres en Languedoc, la seule région où cette forme existe

Lagramuso, larmuse

Lagramuso est le nom du « lézard gris » dans une zone compacte à l’est du Rhône jusque dans les Alpes, en franco-provençal (à l’exception de la Suisse et du département de l’Ain) et dans la région de Mâcon. En Italie du Nord, nous le retrouvons en Vallée d’Aoste et dans le Piemont.

La forme franco-provençale est entrée dans le TLF s.v. larmuse grâce Marcel Pagnol qui utilise larmeuse dans La gloire de mon père (1957). Cotgrave mentionne larmuse en 1611 comme dauphinois:


Lacrimusa se trouve pour la première fois  chez l’auteur gaulois Polemius Silvius, Ve siècle.  Polemius a vécu à Lyon et il  a dédié son œuvre à l’évêque Eucher de Lyon [± 450].  Les formes franco-provençales reposent sur une variante *lacrimusia.
Il s’agit probablement d’un mot pré-latin, peut-être ligure, qui par étymologie populaire a été interprété comme un dérivé de lacrima « larme » (FEW). En Italie du Nord lagramusa est mis en relation avec la légende des « larmes de crocodile. Voir aussi langrola ci-dessous.!

Il faut noter qu’on trouve le même mot dans le sud de l’Italie par exemple à Potenza laramusa. G.Rohlfs a démontré que cela est lié à l’immigration de colons galloromans, probablement des Vaudois, qui voulaient fuir la persécution. (Romanische Forschungen 60, p.103).  Au XIIe siècle l’Église vaudoise est issue de la prédication du lyonnais Pierre Valdo (Wikipedia).

Luchet, luquet

Luchet, lutsè, litsè, likè « bêche » (départements . 07, 11, 30, 34, et 84  d’après le Thesoc). Première attestation dans Du Cange : Luquet, in Inventar, ann. 1449. ex Tabul. D. Venciæ : Unum Luquet de metallis. Lucet. vero ligonem, vulgo Pioche, sonat in Lit. remiss. ann. 1394. ex [] Reg. 146. Chartoph. reg. ch. 353 : Un oustil à pionnier, nommé Lucet... Icellui varlet hauça ledit Lucet et voult férir le suppliant. (Lien vers Gallica).

Le FEW XVI, 484 rattache la forme occitane à l’étymon *lotja, qui a donné français louche, louchet(cf. TLF louchet), mais il n’y a pas d’explication pour le -ü- occitan.

Il semble que français louche est emprunté au néerlandais loet « outil pour puiser; racler », moyen néerlandais lote « rateau ». Le problème est que les attestations anciennes du type louche ne se trouvent que dans le Nord de la langue d’oïl : picard, normand, wallon. A la même famille appartient à mon avis :
Luquet « loquet » Dans les langues germaniques il y a souvent des alternances vocaliques appelées « Ablaut », par ex. en allemand moderne ou<>ü dans Buch « livre » Bücher « livres ». Il semble que la racine *lotja a donné une forme loc, loch « trou » d’un coté et avec alternance vocalique lüka « ouverture dans un mur ». Par la suite lüka a pris le sens de « panel mobile devant l’ouverture dans un mur » > « volet ». En néerlandais nous trouvons les deux formes : loket « guichet » et luik « volet » et luiken « fermer » participe passé geloken « fermé ».
Mais en languedocien le verbe gotique *-lukan a gardé le sens de  » faire des trous (dans la terre) » > » bêcher » et que lou luquet « bêche » est l’outil. Ailleurs dans une zone beaucoup plus étendue occitane et franco-provençale, luquet avait pris le sens « loquet », (attestée depuis la moitié du 14e siècle à Agen Carcassonne, Arles), à partir du sens « volet ».  Un « volet » sert à fermer le trou dans un mur.
Un emprunt au néerlandais par l’occitan me semble peu probable. Le problème qui reste est le fait que les premières attestations de ces mots sont relativement récentes.
Remarque : Le Thesoc rattache Lafitte-sur-Lot (dep.47), Puynormand et Velines (33) au type français loquet, mais les formes présentent bien un -ü-.

Loupe triplet 20x

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Lot, loudo, loudro

Lot et les dérvés loudo, loudro (S) « boue, fange » représentent le latin lǔtum « fange ». Les attestations viennent surtout de l’est- languedocien. est très fréquent comme toponyme, mais ne concerne pas la rivière, ni le département du Lot, qui s’appelle Olt, Out en occitan. 675. Lutosa, c’est-à-dire « la boueuse » est à l’origine de  Louze (Haute-Marne), Louzes (Sarthe), Leuze (Aisne et, en Belgique, Hainaut et province de Namur).( Longnon)

Lonja, lonza et sirloin

Lonja, lonza « longe » au sens de » filet de porc, de veau ou de mouton ». Un voyage aux USA m’a permis de goûter leur délicieux sirloin et tenderloin. Comme ces mots ont une orthographe française, j’ai recherché leurs étymologies. L’origine est le français longe, ou plutôt l’ancien français loigne « moitié (en long) de l’échine de veau, depuis le bas des épaules jusqu’à la queue », d’une forme *lumbea féminin du *lumbeus « qui fait partie des lombes », dérivé de lumbus « région lombaire; reins » (> occitan lomb, provençal loumb « reins », béarnais loum « longe »). *Lumbeus est devenu féminin par confusion avec la forme longue, ce qui a eu comme résultat que le –j- est souvent remplacé par –g-. Les gourmets du XIVe siècle ont créé le mot surlonge « partie de l’échine du boeuf située entre le paleron et le talon du collier ».

La légende voudrait que le roi Henri VIII était tellement friand du surlonge qu’il l’a annobli et l’a appelé Sir Loin.
Les Américains font une distinction encore plus fine : le tenderloin, le morceau le plus juteux entre le sirloin et le top sirloin.
En argot américain, le slang, tenderloin a pris le sens de « quartier de New York où se trouvent les grands théâtres, restaurants, etc. qui est/était le « quartier plus juteux » (corruption; chantage). Pour plus de renseignements voir le Big Apple.

 

USA: F:

La découpe des bouchers américains (à gauche) n’est pas tout à fait la même que celle des bouchers français, mais je peux vous dire qu’un tenderloin (tener + lumbea) de 20 oz. fond dans la bouche et il vaut le voyage avec un dollar à 0.75 €.

Le mot est aussi passé en allemand : Lungenbraten. Je ne sais si les Allemands le confondent avec Lungen « poumons ». ?