Buc » chicot d’une branche d’arbre ; pointe ; écharde ; cime de montagne ; ruche d’abeilles ; tronc d’arbre creusé où l’on plaçait les bébés ; dans l’Aude : conque ou bassin fabriqué avec un morceau d’écorce ; …. » (Alibert). L’abbé de Sauvages donne en plus le sens » chicot d’une dent cariée « . Le mot a existé en ancien français avec les sens » tronc du corps » et » tronc d’arbre « , comme en ancien occitan. Dans les parlers modernes, buc n’est attesté qu’en wallon, en franco-provençal et en languedocien.
D’après le FEW l’origine est l’ancien franc buk » ventre « , que l’on retrouve en allemand Bauch,, néerlandais buik et ancien néerlandais buuk avec le sens » ruche » comme le mot buc occitan ! Le sens primaire de buk semble être » cavité » et de là » tronc » ou » ventre » et ruche, » chicot » etc.. Le mot existe également en catalan, espagnol et italien.
Bugar, bugat ou bugalh « rucher ». Le visiteur/apiculteur Jean Courrènt m’envoie la contribution suivante:
« Comme vous le savez, la ruche est appelé buc, de Toulouse à la mer1. Dans votre présentation, je ne trouve pas le bugar (le rucher). Buc est apparu après l’installation des Wisigoths. L’orthographe de « buga » (rucher) est bugar, bugat ou bugalh (avec des nuances de sens), en Terre d’Aude. Le mot bugar, qui désignait « un gros rucher » (probablement du seigneur civil ou religieux, à l’origine, à l’époque de la féodalité et des droits d’abeillage et d’épaves) n’est plus utilisé depuis que la production de sucre à bon marché a réduit l’importance de l’élevage des abeilles (probablement deuxième moitié du XIXe siècle). Actuellement, les vieux apiculteurs ne disent plus que « ai bucs » (« Vau ai bucs » ou « Vau a las abelhas« ) ce qui rejoint le apiaria [pluriel de apiarium], les lieux où l’on met les ruches des abeilles, constaté dans le langage commun, par Aulu Gelle, au IIe s. (Nuits Attiques, II, 20). Le rusca des Gaulois devait également se maintenir jusqu’alors, pour la ruche familiale (ce qu’il faudrait quand même prouver).
Bien cordialement. J.COURRENT.
PS : En 1704, le compoix de Montredon-des-Corbières signale deux bugars (un gros et un petit). A la même date, il y avait trois bugars à Tuchan, dans les Corbières. Le bugar ne désignait donc plus le rucher du seigneur. »
Brousto « pousse, ramée » (M). Alibert donne deux formes: brost et brot. Brousto est dérivé du germanique *brust– « pousse ». Ancien occitan brost et brosta « feuillage, ramée » fin XIIe s. Cf. fr. brouter, broutille. Le sens « jeune pousse » se trouve surtout dans le Midi et en catalan brosta.
Voilà une famille de mots qui relie le moyen âge à internet. Pour trouver ce site sur internet vous avez utilisé un browser , comme Mozilla ou IE, littéralement un « brouteur ».
Le verbe anglais to browse: « paître »; to browse through a book « feuilleter un livre « . Emprunté au moyen français brouster dans lequel on a pris le -t final pour la forme du participe passé : *browsed.
Le substantif occitan brousto « pousse » se traduit en anglais par the browse « tender shoots, twigs, and leaves of trees and shrubs used by animals for food « . Suivez ce lien vers le Metaglossary
Brodo s.f. « paresse, fainéantise » (S2) est encore très vivant dans le français régional : avoir la brode, avé la broda (Camps) , la brode le prend (Lhubac). D’après Camps il y a de nombreuses attestations dans le Gard et les Cévennes (où?). Dans le FEW il n’y a que les attestations de l’abbé de Sauvages (S2), reprises par Mistral et deux attestations dans le Puy-de-Dôme où brodo signifie « envie de dormir ». S2 donne aussi le verbe broudà « lambiner ».
Je viens de trouver une attestation cévenole, dans le Vocabulaire de mots occitaniques de Fabre d’Olivet:
Mistral ajoute les composés abroudi et abroudimen:
Tout ce groupe de mots est limité au languedocien, à part les deux attestations du Puy-de-Dôme. L’étymologie en est inconnue.
En cherchant dans les Incognita du FEW, j’ai encore trouvé d’autres attestations, qui du point de vue sémantique et phonétique peuvent appartenir à la même famille: limousin brodo s.f. « homme lâche qui manque de vigueur et de courage; mauvais cheval »; « personne capable de rien, nulle »; dans le Puy-de-Dôme brodo « envie de dormir »; dans le Dauphiné brodo « sobriquet des montagnards alpins; mal élevé, grossier ».
Broa « bord, orée, talus ». Mot trouvé dans la revue La Clau, Bulletin de l’Oubrador Jonquierenc de Provencau, n° 78, Nîmes, Printèms 2005. A Jonquières existe depuis quelques années la Z.A. de la Broue, en occitan la broa ou la brova. L’auteur mentionne les dénominations La Broue, La Brouve pour 1758 et La Broue pour 1589. Dans le dictionnaire d’Alibert nous trouvons en plus les formes: bro, abro et l’expression : a broa d’uelh « à vue d’oeil’, et les dérivés broal « bord d’un champ, partie inférieured’une vigne, berge de rivière » et broàs, broassa « grand talus gazonné, tertre, hallier ».
Pour le toponyme Labro , contraction de La Broa voir le commentaire de Christian en dessous de l’article
avant travaux
après
Les parlers occitans ont donc conservé le sens d’origine « bord, bordure », mais le paysage a changé.
Ce mot fait partie d’une petite famille basée sur un étymon gaulois broga « frontière, limite, bord » . On lit dans le vieux Scholiaste de Juvénal, IVe siècle : brogae Galli agrum dicunt « de la terre que les Gaulois appellent brogae » et ce sens correspond au mot breton bro « pays, contrée », Gallois, brô, ancien celtique *mrogi-« pays, région », ancien irlandais, mruig, persan, marz « frontière, limite ».
La broue relie notre région à une grande zone dans les vallées alpines du Nord de l’Italie: par exemple en piemontais broa signifie entre autres « bord d’un précipice ». Mistral donne aussi un mot catalan brua mais je ne l’ai pas retrouvé dans les dictionnaires catalans. Dans le site de l’IGN vous trouverez de très nombreux toponymes composés avec broue, brova, broga, et broa. Si quelqu’un a envie d’en faire une carte et de ma la passer, n’hésitez surtout pas. Dommage que l’agencement du site ne permet plus de regrouper des toponymes.
Dans le Thesoc vous trouverez que dans la Hte-Vienne 3 informateurs ont donné broal comme nom d’un « talus ». Un talus est souvent la limite d’un champ. Durand fournit pour l’Aveyron les expressions a la broa de l’aiga, a la broa d’un cami, le verbe abroar « approcher du bord » et le dérivé broal « une haie à la limite d’une terre ».
A Barcelonette, vallée de l’Ubaye: abrouàr v.a « Faire approcher les brebis du bord des champs, où se trouvent des touffes d’herbes dites abrouas ». Debroua » débarasser le bord d’un champ de ses brousailles », ce qui était fait à l’aide d’un debrouaire « une serpe pour couper les broussailles ». Suivant la configuration du terrain le type broga peut désigner une « haie », une « bordure de rivière », un « bord gazonné au pied d’une terre » etc., mais la notion de « limite » est toujours présente.
Il semble que l’évolution sémantique a dû être « limite »> « terrain en bordure » > « terrain ». On trouve une évolution analogue dans le mot germanique marka et un évolution dans le sens contraire serait difficile à comprendre.
Voir aussi l’article breilh qui vient d’un dérivé de broga
Bresegon, bresegoun, presegoun « fragon, petit houx ( ruscus aculeatus) ». Wikipedia . Il est utilisé localement lors de la fête des Rameaux comme substitut aux branches de buis. (De là le nom buis troncut , et buis salvatge donné dans le dép. du Lot, d’après Thesoc et non pas bois -).
Les jeunes pousses sont comestibles, crues ou cuites, comme les asperges sauvages, par contre, les baies sont toxiques.
Le FEW suppose pour des raisons d’ordre phonétique, que les formes du Nord de la France avec fr- comme fragon, ancien français fregon, reposent sur un gaulois frisgo « petit houx ».
En occitan nous trouvons une forme bregou(n), brigon , dont l’initiale br- au lieu de fr- s’explique par l’influence de brusc « bruyère, broussaille » en occitan. (Cf. l’article brusc « ruche » et le DMF s.v. bruscum.) Principalement en languedocien existe le forme bresegoun avec insertion d’une voyelle svarabhaktique (j’adore ce mot, il fait très savant!) dans le groupe -sg- > -seg- qui par la suite devient -zeg- e.a. dans le Tarn et à Toulouse. Voir aussi l’article grefuelh
Breilh. La dormeuse de Mirepoix me demande d’éclairer le mystère des « breilhs, breils ». C’est devenu une longue promenade à travers l’Europe.
Breilh. La dormeuse de Mirepoix me demande d’éclairer le mystère des « breilhs, breils ?, la zone de mares, bras vivants ou morts, eaux dormantes, sables mouvants, petites résurgences, bref la zone humide, intermédiaire entre le cours principal de la rivière et la terre ferme. »
Le lendemain elle me donne une précision : « Une habitante du village Arvigna, cultivatrice, me donne une définition plus précise du breilh : »c’est l’espace planté d’arbres amis de l’eau, qui se situe entre les terres labourables et la rivière. On ne parle pas de breilh s’il n’y a pas d’arbres ».Il semble qu’à Mirepoix, on insiste davantage sur la qualité de terre humide. »
Ci-dessous les images qu’elle m’a fait parvenir. Avec le commentaire suivant: photo à gauche : prise depuis le lit du Douctouyre (Arvigna), le breilh, c’est la zone de taillis, bordée d’arbres, que l’on voit au fond, au centre; photo de doite : A Mirepoix, le breilh, c’est plutôt comme sur la photo, au fond, sous la cathédrale, la zone mi-terre, mi-eau :
Arvigna Mirepoix
En cherchant l’étymologie de ce mot, je tombe sur le mot brül qui dans la région Oberhessen (Darmstadt, Allemagne) signifie « pré bas, humide, à l’origine genre plus ou moins marais, de nos jours asséché ou endigué ». (W. Crecelius, Oberhessisches Wörterbuch. Darmstadt, 1897-1899).
Vous allez me dire, c’est loin de Mirepoix.ça, et je vous réponds : et Puschlav (Graubünden, Suisse) brölu « jardin avec des arbres », et Catalogne brolla « formacio vegetal més o menys densa on predominen arbusts o mates de fulla persistent » et en Normandie broil « bois ». Le mot a surtout survécu dans la toponymie.
Le Pégorier ‘est de nouveau gratuit. Il donne : breil, breille « petit bois; forte haie » (Languedoc); breil, breuil « petit bois » (ancien français) Variantes : breille, breuille. Breil, broil « buisson » (Champagne).
Il s’agit du mot d’origine gauloise *brogilos un dérivé de broga « frontière, limite; champ » qui nous avons rencontré à propos de broa « bord, orée, talus ». Suivant la configuration du terrain le type broga peut désigner une « haie », une « bordure de rivière », un « bord gazonné au pied d’une terre » etc., mais la notion de « limite » est toujours présente. C’est exactement cette notion de limite, bordure qui est présente dans le mot breilh de Mirepoix et à Arvigna. Voir aussi le mot français breuil « Petit bois clos, servant de retraite au gibier; ,,pré établi sur un ancien bois marécageux« (Zél.) »dans le DMF.
Le mot se trouve dans toutes les régions où les Celtes ont vécu.
Von Wartburg écrit dans le FEW I, 555 b, que breuil a pris pendant la féodalité le sens secondaire de « terre défriché dont le seigneur restait quand même le propiétaire ». Ce sens a été conservé en ancien lorrain bruel « pré seigneurial que les habitants d’un village étaient obligés de faucher ». Et dans une note il ajoute que ce sens secondaire se retrouve dans le domaine allemand voisin: ancien alsacien brügel « un pré destiné à l’utilisation privé du seigneur ». En France il serait limité à la zone qui a fait partie du Royaume Allemand.
En ancien occitan brolh signifie « jeune bois, bosquet, breuil », en occitan moderne un bruiet est un « petit bouquet de bois ». le mot prend par métonymie le sens de buissons, jeunes pousses : par exemple bruei « rejeton , jet d’une plante qui sort de terre », ancien occitan brolha s.f. (à partir du pluriel) « feuillage, multitude », bruioun » bourgeon, rejeton de chou; bouton sur la peau » et le composé debruià « arracher les mauvaises herbes »
J’ai signalé mon article à un collègue allemand , qui m’a répondu que le nom de famille Brel a la même origine. Ceci est confirmé par le site Généanet : « Le nom est une variante de Breuil (= bois clôturé, gaulois brogilo). On le rencontre surtout dans le Sud-Ouest (46, 82), mais aussi bien sûr en Belgique. »
Et il m’a aussi incité à consulter le dictionnaire de Grimm, s.v.Brül, qui donne : « BRÜL, m. campus aquis irriguus, pratum palustre, aue, buschigte wiese, mlat. brogilus, brüel, breuel, bruwel, bruhel, brühl. BEN. 1, 267b. franz. breuil, it. broglio. freier brüel. weisth. 1, 458. 2, 257; die saw in briel jagen. FRANK spr. 2, 47a. hirschbrül, statio cervorum circa loca aquosa et virgultis amoena. STIELER 251. STALDER 1, 233. In den städten heiszen straszen oder andere plätze oft noch brül « . Je traduis cette dernère phrase : Dans les villes, certaines rues ou d’autres endroits s’appellent souvent brül. Et un BRÜLING, m. est un porcus anniculus, un proc d’un an qu’on lâche dans le brül. Si quelqu’un veut approfondir cette histoire, il y a de la matière!
Aux Pays Bas il y a la villeDen Briel. Etant néerlandais vivant en France, je ne peux m’empêcher de vous rappeler l’histoire de Den Briel. La Prise de Den Briel, le 1er avril 1572, par des rebelles protestants est à la base de la République des Provinces Unies. Les Pays Bas sont restés une République de 1581 jusqu’à la création par les Français du Royaume de Hollande en 1810. Curieux!
Le1 avril 1572 Den Briel est conquis par les Gueux de la mer.
Brassejá « gesticuler », brassetcher en fr.rég.(Lhubac), est un dérivé du latin brachium « bras » qui semble bien languedocien. On le retrouve en cat. bracejar et espagnol bracear. En ancien occitan brassejá signifiait également « mesurer avec les bras ».
La forme brassegá a probablement été créée sous l’influence du mot boulegá. En français brasseyer se dit uniquement en parlant des voiles d’un bateau.
Aujourd’hui le 25 mars 2004, un politicien de Montpellier ayant une tête très catholique, disait à propos d’un autre politicien connu de la Lozère, que celui-ci ne faisait que brasseger.
Brassejaire « journalier ». L’ancien occitan brasier « ouvrier, manœuvre ; celui qui travaille la terre avec les bras », dérivé du latin brachium « bras » a été conservé dans ce mot languedocien. Voir TLF brassier
Brasselieiros « bretelles fixées à un tablier ou un jupon » (languedocien d’après Mistral), dérivé de latin brachium « bras ». On trouve aussi la forme brasiêros avec le sens « lisière pour soutenir les enfants ».
Brassier « ouvrier agricole » voir brassejaire