Mèlsa
Mèlsa s.f. « rate » organe lymphoïde situé dans l’hypocondre gauche. Les Romains appellaient la rate splen, mot qu’ils avaient emprunté aux Grecs et qui a donné en français spleen « État affectif, plus ou moins durable, de mélancolie sans cause apparente et pouvant aller de l’ennui, la tristesse vague au dégoût de l’existence ». Spleen a éte emprunté au milieu du 18e siècle à l’anglais, qui l’avait emprunté à l’ancien français esplen « rate ». Au moyen âge la rate était considérée comme le siège de la mélancholie. (TLF). Voir aussi hypocondriaque dérivé de hypocondre « Chacune des parties latérales de l’abdomen, situées sous le bord inférieur des côtes, de part et d’autre de l’épigastre » (TLF)
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits
.suite….
Charles BAUDELAIRE
Le nom latin splen a abouti à esplen en ancien français (voir Godefroy) et ‘a été conservé en sarde et en rétoroman. Ailleurs dans la Romania il a été remplacé par un représentant du germanique miltia, néerlandais milt, allemand milz, en moyen anglais mylthe. Italien milza, catalan et occitan melsa.
Pour l’occitan les données du Thesoc sont loin d’être complètes, mais elles montrent que dans les départements de ouest de l’occitan nous trouvons les deux mots rata et melsa pour « rate du porc ». Le type mèlsa domine dans un grande partie de l’occitan, à l’exception de l’auvergnat et du périgourdin, en fancoprovençal, en franc-comtois, en lorrain et en wallon. Là où le mot plus ancien rata ou son dérivé ratella s’est maintenu, le type melsa désigne la rate des animaux de boucherie. Il n’est pas improbable que le prestige de la langue nationale à contribué à cette évolution, comparable à celle du metge qui de « médecin » est devenu « vétérinaire ». Voir metge.
L’étymologie de rata ou ratella est inconnue. Le rattachement au néerlandais raat « rayon » dans honingraat « rayon de miel » (FEW XVI, 673) semble très douteux. Un type germanique (h)rata avec le sens « rayon de miel » est déjà attesté dans les Gloses de Reichenau comme explication du latin favum : « favum frata mellis » (Source). Ce type germanique a abouti régulièrement à rée « rayon » en ancien français (Gdf). Rate serait donc un emprunt récent, mais le germanique rata ne signifie nulle part « rate ».
Troublant est la définition de Uno mèusso de porc « une raie de cochon » par Mistral. Quelle est sa source? Ou s’agit d’une faute de frappe?? rate > raie.
Il reste d’autres mystères à élucider. Pourquoi et comment le mot germanique a-t-il pu se substituer au mot latin, non pas dans le domaine d’oïl, mais dans le domaine d’oc? La première attestation en ancien occitan date du XIVe siècle, une période où les Gothes avaient disparu depuis longtemps. Comment expliquer la forme meufo qu’on trouve en francoprovençal mais aussi à Marseille?
Melsat » espèce de gros saucisson fait avec de la viande de porc, de la mie de pain, des oeufs, des assaisonnements nécessaires »(Sauvages S2) est dérivé de melsa.