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Tatino "blanche putain" ?

Tatino « blanche putain ». Non je ne me lance pas dans la pornographie. Il s’agit du « pourpier de mer » ou « atriplex halimus » (FEW).    En  contribuant  occasionnellement au site Plantuse pour le projet  Rolland,  j’y ai découvert les botanistes provençaux du XVIe siècle, dont Hugo Solerius, qui était originaire du Lubéron. Dans  sa Scholiaeparu  en 1549 il donne les noms français, provençaux et dauphinois des plantes1.  Dans l’article Halimum  il écrit que les savants ne savent pas exactement de quelle plante il s’agit. Certains pensent que c’est la plante  que les Gaulois (= les Français de langue d’oïl) appellent « blanche putain« ,  qui s’appelle chez nous  la tatine   et chez les Dauphinois le  tatoulier.  Il faut le ranger dans les plantes inconnues dit il, parce qu’il faut avoir d’abord une bonne description :

l’atriplex halimus (Wikipedia)

Le nom blanche putain ou blanche pute  est assez rare. Il n’y a que quelques attestations chez des botanistes au XVIe siècle2 La première vient du  Livre d’heures d’Anne de Bretagne 1503-1508 :

Blanche futaine. — Catoleri. — Viburnum lantana L. Mancienne (la plante est mal dessinée). Jussieu voit le « lilas blanc » (Lilac vulgaris Lam.). La Mancienne était appelée au XVIe siècle, blanche pute et blanche putain (Dalechamp). — Catoleri est probablement un dérivé de catus, comme Catolleria (voy. Pullan). ( Source Plantnet identification).

Geofroy Linocler, Histoire des plantes.  Paris 1584, écrit que le Halimus ou Atriplex marina s’appelle en François Franche pute, ou Blanche pute. Ci-dessous sa description et son dessin:

Jean Bauhin (1541-1612)  écrit  dans   l’  Historia plantarum universalis3  que le halimum n’est pas la même plante que la blanche putain:

Ruell. Rob Const.  inter nomina ponunt  Blanche putain quod nomen Halimo non convenit.

Ensuite ce nom disparaît des dictionnaires et des textes.  A ma grande surprise  il réapparaît dans le Dictionnaire franco normand ou Recueil des mots particuliers de Guernesey par M George Métivier (1870),  dans la forme blanche pute, avec une étymologie savante :

  

L’image est le Teucrium4.  Il me faudra de l’aide de botanistes pour en  tirer une conclusion. S’agit-il de l’atriplex halimus ou du viburnum lantana?

L’étymologie est le latin putidus « puant, pourri, fétide »; FEW IX, 635.

Les noms occitans fournis par  Hugo Solerius   tatine  en provençal et  tatoulier   en dauphinois posent moins de problèmes.  Ces noms  sont très bien attestés dans les parlers occitans et franco-provençaux5 avec le sens viorne, baies de la viorne, viburnum lantana  en latin des botanistes.   On les retrouve d’ailleurs dans l’Atlas linguistique de la France (ALF) et chez Mistral :

    

tatoulietatoulié

L’étymologie de cette famille de mots est inconnue. Le FEW suppose une racine tatt- d’origine pré-romane.  Les attestations se trouvent dans les parlers franco-provençaux et en provençaux à l’est du Rhône, parfois avec agglutination de l’article comme à Barcelonnette atàta sg. « fruit de la viorne »  ou latatyé « viorne » dans le dép. des Hautes-Alpes. Il y a également des attestations dans le Piemont.

Edmond (ALF) a noté quelques formes avec un changement de la consonne finale dans l’Aveyron : tap  ou tak. L’abbé de Sauvages (S2) appelle la viorne tassigné  et dit que les baies sont astringentes et bonnes pour les gargarismes;  on fait rouir les branches pour en faire de la glu.
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  1. Voir à son propos mon article  Barigoulo
  2. Littré s.v. putain la mentionne pour le XVIe s.
  3. Publié après sa mort en 1650
  4. Photo prise à Villeneuve lès Avignon – Gard (30)le Avril 2009 par Jean-Luc TASSET
  5. Voir p.ex. RollandFlore6, p.258 et 259

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