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Missounaire, missounenco

Missounaire « espèce d’escargot d’été » , dérivé de missoun, meissoun « moisson » du latin messio, messionem « moisson »  est synonyme de mounjeto. En provençal une oumeletto a la meissounièro est une  « omelette aux oignons», appelé ainsi   parce que  c’est le mets le plus en usage dans les métairies pendant la moisson, appelé aussi meissounénco. L’escargot missounaire  est également un plat d’été.

Missounenco « escargot d’été » a la même étymologie avec changement de syffixe :inca. C’est un synonyme de  missounaire  de  mounjeto  et de  estivenques. Dans ce dernier il y a une recette.

Misto, mistoun

Misto, mistoun « enfant au maillot, mioche, marmot à Nîmes », miston en français régional à Nîmes. D’après plusieurs informateurs, mistoun est limité à Nîmes, confirmé par Mistral.

Vous connaissez peut-être  le film de François Truffaut Les Mistons (1958) portant sur cinq jeunes chenapans au début de l’adolescence, tourné à Nîmes et au Pont du Gard. Bernadette Lafont, née le 26 octobre 1938 à Nîmes, participa à ce premier court-métrage de Truffaut.

                                 

                         

Peut-être grâce à Truffaut, miston se trouve dans le TLF, qui le qualifie de « pop. vieilli, ou région.(Provence) ». La première attestation en français date de 1790. D’après L. Sainéan c’est un mot d’argot.

Le poète nîmois  Antoine Bigot est cité par Mistral:

                         

L’étymologie de mistoun  n’a  pas encoré éclairée. Dans la nouvelle rédaction de l’article  *amicitas du FEW l’auteur écrit:

 Il n’est pas possible de faire le partage, dans ce qui suit, entre ce qui relève de *amicitas et ce qui provient de mica, de mit- ou même de amictus.

L’autre mystère reste le passage de ce mot nîmois par excellence dans l’argot parisien. Vous avez une idée?

     

Mistral

Mistral « vent froid du nord ».  Le sens précis dépend de l’endroit où l’utilisateur se trouve. De là les petites différences qu’on trouve dans les dictionnaires : « nord, nord-ouest, nord-est ».

Etymologie :  latin magistralis « du maître ». Ancien occitan maestral « du nord-est » attesté depuis le XIVe siècle. Catalan mestral. Voir CNRTL s.v. mistral. Français mistral est emprunté à l’occitan au XVIe siècle.

Nom de famille

Mocar

Mocar signifie  « moucher; frapper sur le nez, pincer un bourgeon ou un lumignon ». L’étymologie est bien sûr la même que celle du verbe français moucher , latin tardif muccare  « moucher ».  Voir à ce propos le TLF.

En occitan et en français régonal mocar, moucher, moquer  signifie  aussi « boire, chopiner ».

Plus loin dans cet article, Mistral donne trois exemples : Mouca ‘n veire de vin « sabler un verre de vin » (= boire d’un trait)  et moucho pas mau « il boit bien ». Se mouca v.r. « chopiner,boire ». Comment expliquer cette évolution sémantique? Alibert suit Mistral, mais ni l’un ni l’autre s’est posé la question.

On pourrait  s’imaginer l’évolution sémantique suivante : « (se)moucher » (pour se moucher on lève le coude!) > « lever le coude » > « boire » ; ou bien « pincer un lumignon » > « émousser » > « émousser la soif » > « chopiner, boire ».

Un article de Jacques Bruyère  dans le Midi Libre du dimanche 22 février09, intitulé « Moque Cabanel, quelle histoire » m’a mis une puce à l’oreille.  Jacques Bruyère a relevé qu’il y a un mot moque s.f. avec le sens « chope » en français régional. Le TLF dit : « Région. (littoral de la Manche et de l’Atlantique). Petit pot de terre en forme de tasse avec anse, servant à boire, ou gobelet en fer-blanc servant à mesurer des denrées. »  J’ai vérifié dans le FEW. Le mot moque , mouco se trouve en effet en galloroman dans une bande étroite le long de la côte atlantique, qui va de Boulogne-sur-Mer (Nord) jusqu’à Teste (Gironde).

En effet moque est attesté à Boulogne-sur-Mer, mock « pot pour la boisson à bord du bateau », en normand moque « tasse sans anse, servant à boire » dans le Dictionnaire du patois normand de E.et A. Duméril; Caen, 1849 ! dans le Calvados « godet pour le cidre », dans le Bocage, dans l’île de Guernesey mogue « vase à boire », à St-Malo, dans l’Ile-et-Vilaine moque « tasse, mesure pour les boissons (1/2 l) », dans le Poitou, à La Rochelle en 1780, dans le Saintonge, dans la Charente Maritime, et enfin à Teste dans la Gironde   mouco  » gobelet en fer blanc des matelots ». Cette répartition géographique montre clairement qu’il s’agit d’un mot de marins.  (FEW)

Moque a traversé l’Atlantique pour arriver au Canada (TLF) et en Louisiana (J.Bruyère).

Je ne suis pas Néerlandais pour rien, et il n’y a aucune raison pour s’arrêter dans le département du Nord!  En passant la frontière, en Flandres et aux Pays Bas mok est le mot courant pour une grosse  de tasse avec anse, ainsi qu’en bas-allemand mukke « chope », Suédois. mugg « mug,, » norvégien et danois  mugge « tasse pour boisson chaude », anglais mug. Nous avons donc affaire à un mot européen! Il y pas de collectionneurs de mugs. 

 un mok avec ta photobas-allemand: mukke

Le seul problème qui nous reste à résoudre est de savoir comment moca, mouca, mouco est arrivé à Palavas. Par la mer ou par la terre?  A la suite de l’article du 22 février, Jacques Bruyère a eu beaucoup de réactions qu’il a publiées dans le Midi Libre du 15 mars. (La consultation est hélas payante). L’expression Moque Cabanel est bien vivante en Languedoc, mais les sens donnés par Mistral également. Il y a certainement eu des contacts entre les marins de l’Atlantique et ceux de la Méditerranée.
Je ne crois pas que dans Moque Cabanel!, moque soit un verbe . A Laval dans la Mayenne,on appelle une « tasse de cidre » mok-mok. Je les vois bien lever le coude et dire mok-mok, comme on dit chin chin.

Etymologie :  moque, mouca « chope » vient d’un germanique mokke « chope ». Si moque est un verbe dans l’expression donnée, il s’agit d’un verbe  moquer créé à partir du substantif, comme chopiner de chope.

Le nouveau dictionnaire étymologique du néerlandais (EWN), suit le FEW en supposant un lien entre mok « sorte de tasse » et l’ancien néerlandais mokka* « motte (de terre), morceau ». On aurait comparé la chope à une motte à cause de sa forme grossière. Les représentants de cet étymon germanique *mokka sont absents de l’occitan, mais assez fréquents dans le Nord. Voir à propos de *mokka le TLF s.v. moche et moque et le DMF s.v. l’étymon ou le mot moquet « motte ».

Molan

Molan « pêche, personne molle; sorte de raisin; ivrogne », cf. ebri

Mondin ‘Toulousain’

Mondin, Moundin « Toulousain, de Toulouse ».  Etymologie : Raimond « Raimond, comte de Toulouse ».

Un article à l’occasion de la commémorations des  LIBERTATS COMUNALAS 2014 : double page dans le Journal Toulousain : Centrale_JT595

Au XIIe siècle il y avait aussi le raimondene « denier à l’effigie d’un comte de Toulouse ».

sagel ou sceau de Raymond VI

Certains prénoms, dont  Raimond, étaient tellement fréquents qu’ils sont devenus des substantifs.  Dans l’Hérault le ramounet  a pris le « maître-valet, régisseur d’une ferme », sa femme est la ramouneto et sa maison le   ramounetage.  Raymond  Jourdan de Montagnac (1976) donne une définition très précise: « Ouvrier habitant la ferme, nourissant les mésadiers et dirigeant les laboureurs ». Sa femme est la ramounette.

Dans le Bas-Quercy  ce n’est pas pareil, le  ramounet  est « le démon », ce qui s’explique peut-être par l’histoire :

 En 1188, Richard, fils d’Henri II, organise une cruelle expédition dans le Quercy, rafle dix-sept châteaux acquis à la cause toulousaine.

Le roi, Philippe-Auguste riposte en occupant le Bercy et le Bourbonnais. Jusqu’en 1189, les terres quercynoises resteront anglaises.    Le soulèvement de la population toulousaine soutenue par les consuls et par Richard conduit Raymond V à accorder plus d’autonomie en signant l’acte du 6 janvier 1189 dans l’église Saint-Pierre-des-Cuisines sous l’autorité arbitrale de l’évêque Fulcran : le comte reconnaît son échec, désavoue ses initiatives pour diviser la population, accepte les conditions de la paix sociale proposées par les consuls à qui il concède la juridiction criminelle.    Le 26 janvier 1190, Raymond V et Alphonse d’Aragon concluent une nouvelle paix. Un an après, le vicomte Roger II échange avec le comte de Toulouse des serments de sécurité et d’entraide mutuelles.

Raymond V meurt à Nîmes en décembre 1194 et est inhumé à Notre-Dame de Nîmes..( plus dans ce site)

En suivant le lien vous pouvez lire l’acte du 6 janvier 1189 en occitan + traduction. jurament0k .

Ci dessous l’article moundin  de Mistral.

Lien direct vers l’article du FEW. Juste au-dessus il y a l’article Robert, un autre nom très fréquent.

Mor, mourre

Mor, morre 1) « museau, groin »  fait partie d’une grande famille de mots qui vit dans les langues romanes autour de la Méditerranée, par exemple en catalan morro « museau; le devant d’une voiture, d’un avion etc. », fer morros « faire la moue », faire de mourres en occitan,  inflar els morros a algu = « casser la gueule à quelqu’un ». D’après Raymond Covès il est très vivant en français régional.

La répartition géographique de cette famille de mots jusqu’en sarde suggère une origine préromane *murr- d’après le FEW.
A partir du sens « museau » on arrive facilement à « nez, visage, figure » que nous retrouvons dans les dérivés comme ancien occitan morada « coup sur le museau ». La conséquence d’une morada  est qu’on  devient morut « qui a de grosses lèvres » (aoc.). Quelqu’un qui fait de mourres  est un  mouru « bouru, incivil, maussade, d’une humeur sombre et farouche » comme l’écrit l’abbé de Sauvages. En parlant d’un couteau ou d’une aiguille mouru est « émoussé ». Lou bé dë las âoucos ës mouru « le bec des oiseaux est mousse » dit-il.
A Alès le « rouget grondin » est appelé mourudo , à cause du grondement qu’il fait entendre quand il est pris ».

mourudo

Et d’après la forme du museau  nous avons dans le Gard le  moure pounchu « musaraigne », mais à Puisserguier le moure pounchu‘ est un  » rychnite de la vigne ». Pour les nombreux dérivés voir Alibert, qui donne entre autres le composé morre ponchut « sparaillon ».

    

En provençal et est languedocien le moure-pourcin est une plante, le « taraxacum officinalis » appelé ainsi parce que le soir quand la fleur s’est fermée elle ressemble à un groin de porc. L’image contenue dans cette dénomination  n’étant plus comprise, le mot a subi les pires traitements phonétiques dans les différents patois, au point d’ aboutir à repounchou à St Afrique par exemple.

Les habitants d’Aigues-Mortes sont appelés les morres pelats « museaux pelés » par les Pérolais.  (Achard, p.412)

Voir aussi l’article mourre « colline ».

Dans le Nord de la France et même en moyen néerlandais (morre « museau »), on trouve quelques attestations du type  *murr-. Le FEW suppose qu’il s’agit  d’emprunts à l’occitan. Il faut admettre qu’en galloroman *murr- est pratiquement limité à l’occitan et au franco-provençal., mais pas ses dérivés et les composés.  Je ne suis pas convaincu qu’il s’agit d’emprunts, parce qu’on trouve un mot comme mornifle composé de la même racine *murr- + nifler dans les patois du nord et pas dans le Midi. Un lien avec le germanique murren  » grommeler, bouder », néerlandais morren ou au moins une influence sémantique ne me semble pas exclu non plus . En catalan le morro «  groin, le museau, la gueule d’ une personne qui fait la gueule » ; et fer morros « bouder » c’est plus que faire la moue, 

Moulon

Moulon « paté de maisons ». Dans le Compoix de Miirepoix de 1766, les pâtés de maisons sont appelés moulons. Il y a le moulon Saint Sacrement, le moulon Caraman. Voir le blog de la dormeuse.

Compoix_Mirepoix
Extrait du Compoix de Mirepoix 1766

D’après mes recherches dans les dictionnaires il s’agit d’un mot local. Ailleurs un moulon est un – « tas en forme de meule de foin. » et son étymologie est la même que celle de meule : latin mola «meule de moulin».

Mola prend en galloroman deux autres sens: « pierre , meule à aguiser » et « tas de foin ». Moulon est attesté dans de nombreux parlers occitans avec ce sens « tas; tas de foin, de chaume, de fagots, etc. ». L’image que m’inspire le moulon « bloc de maisons » correspond à celle de pâté de maisons « ensemble de maisons formant bloc », ou l’anglais block.

Le mot le plus courant en occitan pour « meule de foin »  est modolon  du latin mutulus  «Ornement de la corniche». en forme de col.

Mounine ‘guenon’

Mounine  s.f.  « Sexe de la femme » est un dérivé de mona « guenon ». L’étymologie de mona  est l’arabe maimun  « singe », mot introduit dans presque toutes les langues romanes par le commerce des singes.:  italien maimone, catalan  gat maimó, móna,   espagnol et portugais  mono, mona,  italien et espagnol monina.  Les deux mots monne  et monine  ont aussi existé  en français. Cotgrave (1611)  écrit:L’évolution de la forme  maimon  attestée en ancien occitan (1339)  vers mona  s’explique par la chute de la première syllabe sentie comme une réduplication.

La première attestation de monina  (1470) vient  du provençal (Avignon) et ce dérivé est surtout répandu dans le domaine occitan.

Plusieurs sites  marseillais donnent uniquement  le  sens « sexe de la femme1« . Couillon de la mounine « Simple d’esprit »: « Vé le, ce couillon de la mounine qui fait pas la différence entre un 51 et un Casa ». Variante : moumoune.

Ci-dessous l’article mounino  de Mistral, vous voyez que le sens du mot a évolué depuis le 19e siècle :

 

Dans son article enserta « greffer »  il cite en plus l’expression enserta ‘no mounino « reboire avant d’être dégrisé ».

la calanque Mounine

Mona, monine  et les autres dérivés de maimun  « singe » se trouvent dans tout le domaine galloroman. Pour le moyen français voir 6 articles dans le DMF.  D’après la classification du FEW XIX, 115  il y a dans les parlers galloromans  une douzaine de significations:

  1. figure ou femme laide, par ex. béarnais moune
  2. grimace, boudeur, maussade, par ex. dans le Tarn mouná « bouder », Pézenas mouniná
  3. fantôme  dans le Périgord mounardo « mort »
  4. enfant, jeune  par ex. Paris  mounin  « petit garçon, apprenti »
  5. sexe de la femme  par ex. dans le Rouchi et en argot moniche
  6. vieille vache, par ex. dans le Cantal mona  « vieille vache qu’on engraisse »
  7. ivresse, par ex. Alès mounino,  Montpellier carga la mouninà  ‘s’enivrer »
  8. sourd
  9. nigaud, par ex. à Lyon mounin  « sot, nigaud »
  10. poupée , par ex. à Lescun mounáko
  11. chatte , par ex. à Toulouse mouna, à Barcelonnette mounet, en Limousin  mounasso
  12. autres animaux , par ex. en provençal  mouno  « gadus merlangus », mouna  à Nice et à Palavas.

Toponymie. Devinez quel sens est à l’origine du toponyme.  Un indice →   Calanque Mounine (très belle photo par Amodalie).

Un visiteur me fait parvenir un jolie légende sur l’origine du même toponyme situé cette fois dans l’Aveyron, le Saut de la mounine  :

Vue sur le château de Montbrun au Saut de la Mounine.JPG
« Vue sur le château de Montbrun au Saut de la Mounine » by Daniel CULSANOwn work. Licensed under CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons.

Une jolie histoire à insérer, si cela vous semble opportun, après l’article « mounine » (j’y suis allé en vacances, à Saujac; c’est à côté de Cajarc, là où on trouve le célèbre « Moulinot » de Coluche… c’est pour ça que « mounine », que je n’avais jamais entendu avant, me parle) :

En suivant la D 24 vers Saujac, on débouche en haut d’abruptes falaises (enface, le château de Montbrun et un large méandre du Lot). Le saut de la Mounine tire son nom d’une vieille légende. Un ermite, au retour d’un pèlerinage à Compostelle s’était retiré dans une grotte en compagnie d’une mounine (une guenon). Le sire de Montbrun ne pouvant accepter l’amour de sa fille Ghislaine pour le fils de son pire ennemi jure qu’il aimerait mieux la voir se précipiter dans   le vide. La fille vint confier ses malheurs à l’ermite. Celui-ci sacrifia la guenon vêtue des habits de Ghislaine, en la  précipitant du haut de la falaise, pour simuler sa mort. Le châtelain est bouleversé à la vue de la dépouille qu’il croit être de sa fille. Le stratagème dévoilé, il accorde le pardon et sa main au  jeune galant.

 

 

  1. Voir par exemple  Les Cahiers du Sud, dico de Marseille;  Mounine  dans le site La Joie des mots

Mounjeto

Mounjeto

  • 1) escargot d’été,  (eobania vermiculata) appelé aussi  estivenques, missounaire , missounenco en provençal.
  • 2) variété de haricot blanc.(Seguier1 :« faviau esp. de fave n’i a de blancs – de negres, de rouge, de blancs et de negres tout ensem de mongetes d’escalaivez et d’aquelles qu’escalont pas »
  • 3) libellule (laquelle ?)

Dérivé de monacha > mounjo « religieuse ». Dans toutes les langues romanes les significations «  moine » et « nonne »  ont donné lieu à de nombreux emplois au figuré  à cause de la forme de leurs silhouettes, la couleur de leurs habits, le crâne rasé du moine ou la couleur du voile de la nonne : des toupies, des fromages, toutes sortes de plantes, et d’oiseaux.

Spécialement dans  le Midi : des haricots blancs, haricots verts, haricots secs. Fr. mongette est un emprunt à l’occitan. Voir aussi mounjo.