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Barbèze

Barbèze « dartre ». Ci-dessous un extrait du livre   Mots de Gap,  p.45.  Un excellent travail.

Pour d’autres mots , vous  devez acheter le livre de Mme Claudette Germi, et Vincent Lucci

Mots de Gap:les régionalismes du français parlé dans le Gapençais
Couverture

Mme Germi  a  aussi publié  les Mots de Champsaur Hautes-Alpes Grenoble,  en 1996. qui a les mêmes qualités.



Guit, guita 'canard, canne'

Guit s.m. »canard, canard gras », guita s. f. »cane » ; guiteta « petite cane » , guiton « caneton ».  Pour la répartition géographique voir le   Thesoc : guit    HAUTE-GARONNE  GERS, GIRONDE, LANDES, LOT-ET-GARONNE, PYRENEES-ATLANTIQUES, HAUTES-PYRENEES, TARN, TARN-ET-GARONNE. En cliquant sur ces liens vous verrez immédiatement les formes locales de chaque département.

D’après le FEW (IV,138b) il s’agit d’une onomatopée utilisée en Gascogne pour appeler les canards, les chèvres (geta dans le Val di Ledro, et giding en Ligurie Italie), ou les poules ( quite quite à Provins (Seine-et-Marne). Pour les attestations cliquez ici.. La zone gasconne guit continue dans le Nord de la péninsule ibérique, aragones gita, gito (Hecho, Aragues) (source Z). En dehors des langues romanes, par exemple en Souabe (Allemagne) gitz est aussi  utilisé pour appeler les canards.

Un visiteur me signale les mots celtiques suivants ; Bret. gwaz, oie; corn. goth (vx guit), gall. gwydd (moyen gall. guit); irl. géadh (vx géd); < celt. *gegda. (Dict. étym. du bret.). La répartition géographique, notamment la zone aragonaise que les Celtes n’ont jamais habitée exclut une étymologie celtique, mais les formes celtes données par mon visiteur montrent que le même procédé peut se produire partout.

D’après le DEAF G 1672  les mots béarnais guitoù  « fainéant »,   guit  « cheval qui rue », enguitouní-s  « devenir fainéant, tomber dans le vice (d’une femme) » et guitèro « paresse » (Foix), comme le catalan guit,  guitó  et l’espagnol  guitón appartiennent à la même famille et sont à séparer de l’ancien français guiton « jeune garçon, valet » qui appartient à une famille de mots d’origine germanique *wiht « fainéant ». (FEW 17, 582b).

Dans le site de La vieille chouette » vous trouverez toutes les informations et bien plus sur la cuisine locale et régionale de Montauban. Pour elle le Guit n’est pas une marchandise:

guit : la canard gras … le vrai, celui qui a couru tout seul rejoindre la fermière assise sur sa caisse de bois . C’est qu’il aimait se faire câliner le « col » ( le cou) cet animal lorsqu’elle lui « entonnait » la « gavette » ! Et comme il était déçu , si n’ayant pas assez bien digéré aux yeux de sa gaveuse, elle le renvoyait jusqu’au lendemain

 

Guinsal, guissal

Guinsal, guissal « hart, corde, lien; corde de pendu »  a un lien étymologique avec guindre. Dans le site Panoccitan, sont mentionnés : guinsa nom f. » mèche de cheveux » loc ; guinsal nom m. « hart » nom f. et guinsalh nom m. guinsal. Il s’agit d’un groupe de mots dont les attestations sont très rares. La première vient de Giraut de Bornelh (c. 1138 – 1215) ginsaill « laisse pour conduire les animaux ». Louis Rouquier de Puisserguier (début XXe s.) utilise le mot guissal avec le sens « hart ou corde de pendu »; à Toulouse c’est le guinsal. D’autres attestations viennent du Béarn guissalh « hart, corde, guenille; petit serpent ».

D’après le FEW c’est un représentant du gotique *windseil « laisse ». Le verbe winden « se tortiller, serpenter; envelopper en tournant une corde, une bande de tissu  » est très répandu dans les langues germaniques. Je ne crois pas qu’il est nécessaire de supposer le composé windan « tortiller » + seil « corde », puisqu’un un dérivé windsel « bande de tissu pour envelopper ou lier » est un dérivé courant en néerlandais en tout cas. En moyen français existaient des emprunts au néerlandais comme windelingue avec une significations très proche. (Voir DMF). Néerlandais windeling a le même sens et est attesté depuis le Moyen Age.

Je suis étonné d’autre part que personne n’a suggéré à ce que je sache, qu’il y a peut-être un lien avec les mots issus de vinculum et *vinciculum qui existent dans la même région avec la même signification « lien ». Voir vencilh.

Je ne sais si guinsa « mèche de cheveux » appartient à la même famille de mots.

Vincla; vencilh, bencil

Vincla du latin vinculum « lien » a donné en gascon : bincle, bingle « lien » et le verbe dérivé binclá « plier, incliner ». La fête de St-Pierre aux Liens, qui a lieu le 1er août, (le 16 janvier pour les orthodoxes) s’appelle vincla ou bingle.  A Nice on en a profité pour faire cinq jours de   festivités pour la St-Pierre-es-Liens. A Rome dans Eglise Saint Pierre aux Liens – San   Pietro in Vincoli. vous pouvez voir les bingle.

Bincle s.f. signifie « lien », bengle « tige de bois fendue pour tenir la chandelle; pince en bois » en béarnais. Dans le Bigorre blincá signifie « courber,   ployer, pencher », dans l’Aude et le Val d’Aran blinká est « plier ». Italien vinchio « tige d’osier qui sert à lier », catalan vincle « lien », espagnol vinculo « lien « , et   brincar « sauter, bondir », portugais brincar« jouer, plaisanter, badiner »font partie de la même famille.

                         
                  Les vincla de St Pierre.                        Le bencill d’Hercule.               Un bencill moderne

Vencilh, bensilh « lien du fagot », attesté dans les Htes-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques et les Landes, vinquèla, vinzelo à Agonac en Dordogne. (Thesoc). La 1re  attestation date de 1315 (Bayonne). Le mot est surtout connu en gascon avec le sens « hart dont on lie les fagots ». A Bayonne le bencill‘était une « houlette de berger » (une houlette c’est un  » une petite plaque de fer fixée au bout du bâton de berger qui permet de jeter des mottes de terre aux moutons qui s’écartent ».

Etymologie : *vinciculum « lien ». Dans le FEW vincilh est rangé dans l’article à part *vinciculum « lien », un diminutif de vinculum « lien » qui a abouti à vincla. 

Je suis convaincu que les mots de la famille   Guinsal, guissal « hart, corde, lien; corde de pendu » ont au moins subi une influence de vinciculum.

Un visiteur qui se présente comme « Pep » m’a envoyé une attestation supplémentaires provenant d’une étude sur les patois des Landes dont vous trouverez la référence dans son commentaire sur cet article (cliquez sur le titre pour voir l’article avec les commentaires).  J’ai pu trouver la page et voulais vous la présente pour admirer cette trouvaille, mais la qualité de ma capture d’écran n’est pas suffisante.

 

 

pairado

pairado « pâtée de son, raves, etc. pour les bestiaux ». voir pairol

Pairol, pairola

Pairol « chaudron, bas-fond, concavité,; cercle que fait une pierre en tombant dans l’eau » (Alibert). Etymologie: une base gauloise *parium «chaudron » a survécu en ancien occitan par et en ancien franco-provençal pair « chaudière ». Il y a aussi quelques attestations dans les parlers modernes, ainsi que des dérivés comme à Alès pairado « pâtée de son, raves, etc. pour les bestiaux ».

Le dérivé le plus répandu et très ancien, probablement déjà latin *pariolum  a abouti à ancien occitan pairol s.m. « chaudron ». On le trouve dans tout le domaine occitan, en toscan, en corse badjolu, catalan perol, et portugais parol « cuve ».

Dans le nord du domaine galloroman le type pariolum a été remplacé par caldaria qui désignait à l’époque un nouveau modèle de grand chaudron pour la fabrication du fromage, la lessive, etc. Il y a aussi la forme féminine pairola qui désigne en général un chaudron spécial ou une grande  chaudière  (voir Thesoc s.v. chaudière)

Guindre

Guindre « dévidoir pour les cocons » (Cévennes, Alibert), guinde « dévidoir très léger sur lequel on opère le dévidage des cocons » (Mistral, qui donne en plus les formes vindo, vindoul (Nice), vindour). Les formes avec un v- initial, qui se trouvent dans les parlers provençaux en Italie, mais aussi dans le Queyras et à Barcelonnette vindou(r), continuent la zone géolinguistique du Nord de l’Italie, par exemple piémontais vindou.

Le TLF fait la remarque suivante: « Mot du Sud de la France prob. empr. à l’ital. guindola « dévidoir », attesté dep. le XIVe s. (doc. lucquois ds BATT.), prob. dér., à l’aide du suff. -ola, du m. h. all. winde « id. » (cf. piémontais víndu, véndu, vindo; v. FEW t. 17, p. 588b); la finale du mot fr. fait cependant difficulté. »

Pourtant je ne vois pas de problème  accentué comme gondola [gón-do-la] : gùindola >*guindla > guindre. Cette dernière forme est bien attestée à Alès, La Salle et Marseille et renforce l’hypothèse d’un emprunt à l’Italien. L’italien l’a emprunté à l’allemand winde « trueil » du verbe winden « se tortiller, serpenter ».

Voir mon article sarga sur le développement de la sériciculture, et les dessins ci-dessous tiré du site de Georges Mathonpour savoir de quoi nous parlons.

            

Guinchar

Guinchar « gauchir, pencher », ancien occitan far ganchia  » recourir à des subterfuges, refuser » (environ 1190). Voir l’article espinchar

Gronh

Gronh « groin, trogne »,  en ancien ocitan « museau du porc »;  on le trouve aussi au féminin gronha. Ce mot m’intrigue pour trois raisons:

  • 1) le type groin du latin grunium a deux significations « groin » et « sommité, partie supérieure d’une colline » comme dans les Hautes Alpes(04) groun « sommet d’un rocher » attesté en 1606 et dans la toponymie à Val de Chavagne avec le sens « mont, colline, mamelon, sommet ».
  • 2) Ces deux sens se trouvent également dans le type mor.
  • 3) Le mot anglais groin désigne le « mons pubis » de la femme et de nos jours aussi de l’homme. Les étymologistes anglais le font venir d’un moyen anglais grynde « dépression dans la terre » lié au mot ground « terre, sol » d’un ancien anglais « abîme ». Mais il y aussi un  groyne  « digue pour retenir le sable; a rigid structure built out from a shore to protect the shore from erosion, to trap sand, or to direct a current for scouring a channel« .

Nous trouvons le mot groin en ancien anglo-normand,  le français parlé en Angleterre entre le 12e et le 15e siècle,  avec le sens « sommité, partie supérieure d’une colline » aux XIIe et XIIIe siècles, et il s’est maintenu en normand avec le sens « petit cap marécageux de la côte du Bessin et d’Avranches » . Le mot a été conservé dans de nombreux noms de lieu dans les dép.  des Hautes Alpes, de l’Ile et Vilaine, les Côtes d’Armor et la Charente en général avec le sens « cap, pointe, promontoire ». (IGN).

Une évolution sémantique identique « groin » > « colline » se trouve dans d’autres langues romanes, comme en roumain gruiu « colline », catalan gruny  » groin; tas » mais aussi  dans la famille de la racine préromane *murr-.

Douglas Harper et d’autres font bien venir groyne « une forte digue dans un port de mer » de l’anglo-normand  groin avec le sens « museau du porc », sans comprendre le lien sémantique,  parce qu’ils ne savent pas que groin signifie également « colline, cap, promontoire ». Plusieurs attestations ici s.v. groin. Une dans le DMF : le groin des rochers
D’après plusieurs dictionnaires l’anglais groin désigne « l’aine » , mais en réalité  groin signifie « mons pubis » ou « mons veneris ». Le pubis est une « saillie triangulaire » (TLF). Il me semble logique que l’étymologie du mot anglais groin avec le sens « aine »  ou plutôt  » pubis » est le même que celui de groyne « digue » à savoir  le  latin grunium et qu’il a emprunté au galloroman, probablement au normand.

    des groins  groin-attaque 

groin-protecteur

Une voûte « groin » Un champ de groins pour protéger la plage. Une « groin-attaque » et un « groin-protecteur ».

Il faut admettre que ces images sont plus proches de l’idée « colline arrondie, cap, promontoire » que de l’idée « dépression, abîme ». sauf peut-être pour le type qui subit une « groin-attaque »…

Grifol, grifou

Grifol, grifou, ifou dans le Gard et l’ Hérault  (Thesoc) « fontaine (publique) » le plus souvent « grande fontaine monumentale sur la place du village ». Il n’est pas clair ce qui est arrivé au gr- initial ( > ifou) dans le Gard et l’Hérault. Cette forme n’est pas mentionnée dans les vieux dictionnaires.  On trouve aussi la forme griffon attestée à Marseille avec le sens « robinet » comme à St-André-de-Valborgne. A Montmorin près de Gap griffou a pris le sens « auberge » et l’aubergiste est devenu un grifounier, le seul à avoir un robinet?

Etymologie :  gryphus « griffon » + -ulus. Ce sont les croisés qui ont ramené du proche Orient le goût de des animaux imaginaires, qui dans le monde islamique date de l’époque des Fatimides. De l’Egypte ils ramènent au début du XIIe siècle le fameux Grifone qui est exposé au Camposanto à Pise:

« L’imponente statua in bronzo del Grifone (o Grifo) è opera di artigiani islamici, risalente al periodo Taifa (1031-1086) e proveniente quasi per certo dalla Spagna come preda di guerra di una delle tante battaglie vinte dai Pisani contro i Musulmani, probabilmente quella delle Baleari (1113-1115). » Wikipedia.


Sa renommée se répand rapidement dans toute l’Europe. Les artistes et les artisans rivalisent dans l’art de faire des Griffons devenu une source intarissable d’inspiration; c’était beaucoup mieux qu’un Lion et le Griffon était dans l’air du temps. Toute commune qui se repectait voulait avoir son Griffon sur la place centrale.

Le sens  « fontaine »  apparaît en occitan à la même époque.  Les mécènes ont remplacé la fontaine ordinaire sur la place centrale des villes et des villages par un grifol.  Un visiteur me signale que le mot se trouve  dans le DuCange . Cela  m’a incité à approfondir cette histoire. Du Cange écrit : « Grifoulus, Vasconibus Grifoul, Fons saliens, in Hist. Eccl. D. Fleury lib.. 97. num. 3.  » ( Traduction: Pour les Gascons le grifoul est une grande fontaine). La source de Du Cange est l’ Historia Ecclesiasitca de Hugues de Fleury. qui date du début du XIIe siècle.

Le griffon fait partie de toutes les mythologies du Moyen Orient.

Littérature. Les bestiaires du Moyen-Age dérivent tous, plus ou moins directement, d’un ouvrage grec du IIème siècle  « le Physiologus ». L’auteur inconnu cherche en premier lieu à associer à chaque animal (qu’il soit réel ou légendaire), une signification chrétienne.  Il a été traduit en latin dès le IVème siècle. Le « Physiologus » a exercé une influence déterminante sur toute la chrétienté. Par le biais des nombreux manuscrits, souvent illustrés, les monstres de l’Orient et de l’Antiquité gréco-romaine ont ainsi pénétré l’imaginaire des hommes du Moyen Age. A partir du XIIème siècle, apparaissent des traductions en langue vulgaire. On note ainsi plusieurs bestiaires dont ceux de : Philippe de Thaon, qui rédige vers 1121 son « Bestiaire », dédié à la femme de Henri Ier Beauclerc, roi d’Angleterre et duc de Normandie (Source).

Sculpture et architecture.

                                              

Grifol de Toulouse

Un de mes visiteurs m’a écrit: « Je trouve, sur un site internet consacré à Montagnac, une note sur l’approvisionnement en eau : « A partir de ce bassin va partir ce qu’on appelle un aqueduc, d’abord une suite de tuyaux de terre mis bout à bout et à l’air libre traversant des propriétés privées et qui conduit à la Fontaine du Griffe. Tout semble terminé le 23 juin 1667 puisque les consuls annoncent « l’eau a commencé à couler au Griffe« . La fontaine ne coule plus mais elle existe toujours avec ce même nom.

Le dictionnaire de toponymie de l’Hérault, de Franck Hamlin, complète : « Ruisseau de Griffout (Pardailhan). Ruisseau de Griffouls (Ferrières-Poussarou). La Plassel del Griffoul (Azillanet) en 1657 (Compoix FD IV. 11). Lou Griffoul, 17e s. (Sahuc, Ville de Saint-Pons, Inventaire des archives communales antérieures à 1790, p. 111), loc. non ident. aux environs de Saint-Pons. Occ. « Grifol« , source, fontaine. La Font du Griffe, bergerie (Montpeyroux) variante du même terme ». Le nom de famille Lagriffoul est porté à Pézénas et dans les environs.

Pour moi, c’est ce genre de Promenades Etymologiques que j’aime. Relier le nom de la « fontaine (publique) » dans un village à une sculpture volée aux Egyptiens pendant une Croisade du 12e siècle, c’est exactement ce qui me plaît. Cela fait rêver.

Hamlin donne aussi Griffoulas un dérivé de l’occitan « grifolàs »  massif de houx, car il ne s’agit pas d’une fontaine qui coulerait avec abondance mais d’un lieu dit concernant un col de la commune de Saint-Julien. Il note  que le mot « grifol » désigne un grand houx (ilex aquifolium). (Voir à ce propos mon article  agreu  « houx »)