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Semal, semàou

Semal, semàou est un autre dérivé  de sagma > sauma avec un affaiblissement de la voyelle avant l’accent de –a- en –e-.

Le sens passe du contenu « charge » au contenant « panier, cuve, baquet, cuveau », sens  bien attesté dans le Gard. L’abbé de Sauvages écrit qu’on se sert du semâou pour charier la vendange sur le bât d’un mulet, ou pour porter à bras le vin, au moyen de deux bâtons appelés sëmaliés.

Semàou et semailiés sont encore utlisés en français régonal d’après Lhubac, s.v. cambarot. Un sëmalou est un petit cuvier de bas bord.

Un dicton : Davant la porta un semal: « Devant la porte une comporte. » Un autre dans le recueil de Rulman de 1627 (voir cadereau):

deglesit « crevassé, déjoint »

Saumada

Saumada « charge d’une bête de somme », un des nombreux dérivés de sauma, est attestée en ancien languedocien depuis 1179.

Saumada prend des sens spécifique suivant les régions et l’emploi des ânesses : à Lyon une saumée est une « charge de sel ou de vin », à Bosses (Val d’Aoste) des somaye sont des petits tas de fumier qu’on fait en l’éparpillant, avant de le défaire complètement avec la pioche ». Caractéristique pour l’est de l’Occitanie est saumada « mesure pour les grains et les vins ».

En combinant ces deux significations « charge » et « mesure de grains » saumada devient aussi une mesure agraire, à savoir « superficie de terre qu’on pouvait ensemencer avec une saumée de blé ». A Alès cela correspondait à 4 setiers et dans les Bouches-du-Rhône à 5 ares.

Roumpre, roumpudo

Roumpre « défricher ». rompudo « terre défrichée ».  En ancien français comme en occitan rompre, roumpre avait aussi le sens « labourer une terre pour la première fois après un long chômage ». L’origine est le latin  rumpere « briser, casser avec force ».

L’abbé de Sauvages le traduit avec « défricher » et il fait la remarque qu’en français rompre en ce sens est tout-à-fait impropre.  Raymond Jourdan (Montagnac)  écrit:

Création d’un vignoble. Le défoncement : appelé aussi le charruage, en occitan  roumpre.  Avant 1914, avec une pioche,  trinqua forta ou un trident harpa de rompuda  (a=o). Travail pénible et très long fait en colas, groupe de plusieurs salariés agricoles : brassiers ou  journaliers.  L’agenciment ou roumpuda   consiste à labourer profondément, 40 à 60 cm, pour planter une vigne nouvelle (mayol). Après 1914 la roumpudo  se fait avec des chevaux , 2, 4 ou 6, et une grosse charrue à versoir à mancherons.

trenca -harpa

La raison de cet article m’a été donnée par un visiteur qui m’a demandé de lui donner des renseignements sur quelques toponymes de Barre-des-Cévennes, dans un hameau abandonné en 1950 et repeuplé dans les années ’80. Il avait trouvé des noms comme La Falguiere, et La Roumpude dans le cadastre.

La Roumpude est dans le dictionnaire de l’abbé Sauvages et signifie « novale, une terre nouvellement défrichée et mise en labour; défrichement de terre » synonyme de issar. Les attestations données par le FEW de roumpude se trouvent dans le Gard et l’Hérault. Pourtant le mot est très ancien.  Dans le  Du Cange est écrit:

RUMPUDA, idem quod Ruptura, Ager nuper vel jam olim proscissus et ad culturam redactus. Vide in Rumpere. Charta ann. 1171. ex Tabul. Casæ Dei (Du Cange) et dans l’article PESZATA. Ut Pezada. Charta n. 2, J. 330, A. N., an. 1151, Bernardus Ato V, comes Nemausensis, tradit omnes cartos et taschas quos… in termino de Cavairaco… in futurum sibi ex novis rumpudis vel Peszatis accrescere poterunt. Concedo monachis S. Vincentii de Juncheriis duas pecias terrarum laboratarum et unum camerarium horti in riperia de Cauroncello, suptus Rumpudam, quæ fuit magistri Vitalis ().

Arrapar, arapar

Ar(r)apar est composé de ad + rapôn  et  présent dans tout le domaine occitan et en  franco-provençal. Pour l’étymon voir l’article  rapar .  Arraper en français régional.

Les significations sont toujours liées à la notion de « arracher, enlever, saisir », comme par exemple le grenoblois arrapan « grippe-sou; malheureux », ou le nom du « gallium arapine » l’arrapoman, qui colle à la main;  ailleurs c’est le fruit de la bardane, la garance sauvage ou le pariétaire (Valleraugue). Mistral donne d’autres combinaisons, dans son Trésor, vol.I,p.137. (C’est un lien direct vers la page du Trésor. Consultez aussi la page 138!

      

arrapo-man           garance sauvage                 pariétaire        

A partir du sens de rapar « saisir » s’est développé le sens « grimper, ramper » aussi bien en franco-provençal qu’en occitan. A Lyon un ropîou est un grimpeur, à Marseille un rapaïon « un sentier à pic dans les pierres ». Cf. aussi rapieta « lézard gris » et rapinayre ou  rapinau » grimpereau » en Bigorre dans le même article.  Le grimpereau est un oiseau du genre passereau, de couleur rose et gris perle, qui grimpe le long des arbres et vit des insectes qu’il chasse sur les troncs.

Un groupe spécial est formé par rapa, rappa « rafle du raisin; grappe  » et rapuga v.a. « grappiller », rapugo « la rape, rafle ou marc du raisin » en franco-provençal et en occitan. A Barcelonnette rapugas a pris au figuré le sens : « des restes ». Il s’agit très probablement d’une dérivation à partir du verbe rapar, qui rattache cette région au catalan rapa « grapillon », à l’espagnol rapa « fleur de l’olivier » et aux parlers italiens.

Il semble qu’il n’y ait pas de lien direct avec le mot rapes « marc de raisin » qui est attesté en ancien picard ou champenois, pour lequel on peut supposer un lien avec le mot allemand Rappe « grappe sans les raisins » utilisé dans la région de la Moselle, du Nahe et du Rhin et en Suisse. Emprunté (?) par l’anglais rape « rafle ».

allemand Rappen // anglais rape

Commentaires des visiteurs

Un visiteur de Manduel me signale: un rapugaire est un « grapilleur ». Dans le temps, vendanges terminées, on voyait dans les villages venir les rapugaires de Nîmes.

Olivier me signale qu’en Aveyron un arapadou désigne une « montée escarpée »

Podar

Podar, pouda  « tailler, tailler la vigne; trancher, élaguer ». Etymologie : latin putare « tailler »  devenu potar déjà en latin vulgaire. En latin classique putare signifie « nettoyer, éplucher, peigner (la laine) » et dans le milieu viticole cela devient « tailler la vigne ». Il est conservé tel quel autour de la méditerrannée: catalan, espagnol, portugais podar, italien potare.

En galloroman  podar  vit en occitan et en franco-provençal. Dans la langue d’oïl il a été remplacé par le type taliare.
Podar
est la base d’une série de dérivés comme poda « serpette pour tailler la vigne »,  poudé (Alès)ou poudetto « serpette », podador, poudaire « vigneron qui taille la vigne », poudar « grande serpe ». D’après l’abbé de Sauvages, elle est emmanchée d’un long bâton et sert à tailler les haies, les charmilles du jardins ».  Les  poudïos  sont  les « scions qu’on retranche d’un arbre; sarments ». Dans le Périgord on a créé le verbe poudassá « mal tailler ».

poda   le  poudar

Qué poudo lon, béou un an, que poudo court, béou toudjour «  « Celui qui taille long, boit un an, celui qui taille court, boit toujours » en patois de Valleraugue (Gard).