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mentastre

Mentastrë « baume sauvage ». (Mentha arvensis L.)

On comprend sous le nom de mëntâstrë le pouliot ou la mente aquatique, dont l’infusion est un fébrifuge; le pouliot est aussi très bon pour tuer les vers des enfants. (Sauvages S1).

Etymologie: latin mentastrum « menthe sauvage », attesté chez Pline. les attestations dans le domaine galloroman sont très anciennes, de sorte qu’on peut supposer qu’il s’agit  d’un mot indigène et non pas d’un emprunt. FEW VI/1, p.731

Mentha_arvensis_2005.08.28_09.49.00 Mentha arvensis L.

Mento « baume des jardins ou simplement baume, et non mente qui se dit des autres espèces de ce genre qui croissent dans les champs ». Il y a deux sortes de baumes, celui qui est à feuilles rougeâtres qui a une odeur de basilique et qu’on met dans les salades; l’autre espèce est le baume ordinaire qui a une odeur très suave. (Sauvages S1), et Solerius en 1549:

menta_Solerius

menthapulegiummentha pulegium L. pouliot

Etymologie : latin menta « menthe ».  La graphie avec –h- date du XVIe siècle, pour rapprocher la langue française de la langue grecque : μινθη  et compliquer l’orthographe.  Le latin et le grec ont repris ce nom  à une population non-indoeuropéenne qui vivait autour de la Méditerranée.FEW VI/1,p.730  Le même  mot se retrouve dans toutes les langues romanes et dans beaucoup de langues germaniques.

Les moteurs de recherche sont tellement pollués par la publicité pour toutes sortes de médicaments à base de menthe, que j’ai dû avoir recours à RollandFlore vol IX p.41 pour savoir quelle espèce de menthe est le « baume des jardins ». Il s’agit de la mentha sativa L. qui s’appelle maintenant mentha verticillata:

mentha verticillata

mentha verticillata

Pour terminer une tradition gardoise, tirée du Rolland Flore:

MentoGardRlFl9

paoumoulo, poumélo

Pamoûlo « escourgeon ou paumelle, espèce d’orge à deux rangs de barbes dont le grain sert pour les tisannes d’orge et pour faire de la bière » « (S 1756).  Etymologie : latin palmŭla « petit palmier », mais le mot n’a survécu dans les langues romanes qu’avec le sens « paumelle ». Le nom botanique est Hordeum distichum (L.).

pamoulo

pamoulo

La première attestation vient de la région nîmoise  palmola, XIIe siècle.  Dans les parlers occitans modernes nous trouvons plusieurs variantes comme paoumoulo, paoumouro (Marseille), palmoulo, etc. en provençal et en languedocien. En gascon et en limousin c’est le type balearicus > bailharc, balhart et balharga qui domine1 (FEW I, 214). Cette répartition géographique qui existait déjà au moyen âge s’explique par le fait que l’orge espagnol avait depuis l’Antiquité une excellente renommée. Pline parle de l’orge de Cartagena2

Les recherches archéologiques ont montré que l’Hordeum distichum  était inconnu dans le Nord de l’Europe. Il n’y a été introduit que beaucoup plus tard. Le nom français paumelle ne date que du XVIe siècle et a été emprunté au provençal ou le languedocien, avec une adaptation:  la finale –oulo étant pris pour un diminutif a été transformée en –elle.

Cette forme française paumelle a d’ailleurs influencé dans certains endroits le nom local, comme par exemple à Valleraugue (Gard) poumélo.
FEW VII, 517

  1. Ce mot a été emprunté par l’anglais barley, d’après le FEW, mais le Online Etymology Dictionary  cite un ancien anglais baerlic  adjectif  « d’orge » , dérivé de bare « orge ».
  2. La ville catalane dont le nom a été donné à la cartagène.

bourdoulaigo ‘pourpier’

Bourdoulaigo ‘pourpier’ vient du latin pŏrtŭlāca « pourpier ». L’abbé de Sauvages le nomme pourtoulaigo  et il y a quelques autres attestations de cette forme en languedocien depuis 1549,chez Solerius1 :

portulacaSolerius

mais ailleurs en occitan ce sont des formes avec sonorisation de l’initiale bourtoulaigo, bourdoulaigo qui dominent2. Cette forme se retrouve en catalan berdolaga, espagnol verdolaga et portugais beldroega.
Des formes italiennes et allemandes se trouvent dans le commentaire du FEW IX,226-227

Dans le Nord du domaine galloroman  c’est porcelaine et pourpier qui dominent.

bourdoulaigo

bourdoulaigo comestible

Voir RollandFlore vol.VI,p.55-56 pour plus de noms.  J’en prélève le pes pulli littéralement « pied de poule » qu’on trouve dans des textes en latin médiéval et qui est conservé en ancien français poulpied, poullepied devenu pourpier en français moderne. Dans des cas pareils on ne peut savoir si le texte latin est une simple traduction du français ou l’inverse.

  1. Cf. mon article barigoulo à propose de cet auteur provençal
  2. L’abbé ajoute que le pourpier sauvage est astringeant & raffraichissant; on le met infuser dans les bouillons pour les pertes & pour les inflammations d’entrailles

cabudeou, candel ‘peloton’

Cabudeou en provençal,  candel en languedocien  ‘peloton’ ont la même étymologie que le mot capitelle, le latin capitellum avec cette différence que ce dernier est un emprunt au latin du XIIe siècle, tandis que les formes cabudeou  et candel viennent directement du latin parlé en Gaule. Dans les Landes un cabedét est la « luzule des champs ».  Pourquoi? Peut-être parce que les feuilles ont, lorsqu’elles sont jeunes, de longs poils blancs sur les bords. (Source).  Peloton signifie ici « petite boule de laine » et non pas « petit groupe de soldats ou de personnes ».

luzula_campestrisCabedelá, candelá « mettre en peloton », deskadelá « dévider ».

FEW II, 259

grola, groule ‘savate’

Grola groula, groulo « savate, pantoufle, souillon » . L’étymologie est une racine *grolla non attestée. (Alibert donne comme étymologie latin grullus « bateau » que je n’ai pas retrouvé).

Des Groules détournées:

groules_Tcheques

Le type grola se trouve dans les départements ARDECHE, AVEYRON, GARD, HERAULT, LOZERE. d’après le Thesoc, et le type grolha, groulha  dans les départements AUDE, HERAULT, PYRENEES ORIENTALES. Mais ces données sont très incomplètes. Le type grolla se trouve dans tous les parlers occitans et franco-provençaux, ainsi que dans les régions voisines, dans les parlers de l’Ouest, en normand et en piémontais groula « ciabatta ».  Il est  vivant dans le français régional du Gard groule, attesté ce matin chez une amie. Lhubac mentionne  groulle  pour Gignac avec le double –ll- bien prononcé.

Le verbe dérivé grolassier signifie « trainer des pieds, marcher lentement », ou à St-Etienne « s’arrêter dans les cabarets, se débaucher ». Une groulassou  est  une « traineuse de savates » à Castres. Le groulié le « savetier » en Aveyron et ailleurs.

D’après Alibert grola est aussi le nom d’une plante le « caucalide à feuilles menues », mais je n’ai rien trouvé1

Orlaya-grandiflora-Bridesmaid-agratéou, grapoun, grampoun, goussés, cagnots, laputs

Voici l’article de Mistral, avec les différentes formes et sens:

groulo MistralL’abbé de Sauvages connaît aussi le jeu de savates: jhouga a passo groûlo « jouer à la savate ». Pour en savoir plus j’ai demandé à Google qui me renvoie vers les Oeuvres complètes de Sterne:

jeu_de_savateSi vous voulez lire ce qui arriva à sa fille ainée, cliquez sur le lien ci dessus.

En 2009 il y avait encore quelqu’un qui connaissait cette expression et qui l’utilisait à propos d’un match:

pêche dit :

  • merki….la seule sertitude c’est que j’irai pas niquer des 51 sur leurs terres!!!!!
    on va finir par se facher avec tout le monde!!!! mais pas grave!!!!!!!
    patoche pour jouer à la savate , il faut être souple des adducteurs…

 

Depuis le XIXe siècle existe la Savate (sport de combat); Voir Wikipedia.

FEW IV, 272

  1. Michel Chauvet me signale: « Il existe un Caucalis tenuifolia, qui est un synonyme de Orlaya grandiflora (voir Tela Botanica). Rolland a une page sur cette espèce, mais pas le nom que tu indiques.  »  Dans cette page Rolland donne les noms occitans suivants: gratéou en provençal, grapoun à Aix-en-Provence, grampoun dans la Vaucluse, goussés (= »petits chiens ») à St-Pons (Hérault) et dans l’Aude, cagnots (= »petits chiens ») dans la Hte-Garonne et laputs dans le Tarn-et-Garonne.  Il y a encore du boulot pour les étymologistes