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Redable "tire-braise"

Redable « tire-braise » vient du latin rutabulum « fourgon 1 , râble de boulanger, spatule » surtout avec le sens « tire-braise ».

Dans un site marchand, je trouve la description suivante:

Les outils du boulanger : Râcle, écouvillon, pelles. Vous les connaissez peut-être déjà sous des noms différents de ceux que je donne ici. Pas d’affollement !! Ils ont un nom par village… ou peu s’en faut. Le râcle (râble, etc.). Une plaque de 25 x 6 cm taillée dans les chutes de la tôle qui a servi à fabriquer la porte, 40cm de fer à béton de 8, quelques points de soudure et 2m de bambou. Le râcle sert à étaler les braises pendant la chauffe et à les retirer dur four après la chauffe.

 

La voyelle de la première syllabe varie dans les parlers locaux : ridable, radable, roudable et le -b- devient souvent -p-.

Le FEW suivi par le TLF rattachent le mots râble (surtout en parlant du lièvre et du lapin) à rutabulum.  Le Bloch-Wartburg suivi par A.Rey,  écrit que

le mot  râble (du lièvre) est probablement une extension de rable « fourgon spatule » par analogie d’aspect; certains instruments appelés râbles étant munis de fourchons fixés dans la barre comme l’échine est munie de ses côtes « .

Dans le FEW von Wartburg est beaucoup plus nuancé. Il y suggère la même comparaison, mais les formes occitanes avec -e- au lieu de -a- posent un problème d’ordre phonétique. La forme rièble se trouve déjà dans le Miroir de Phébus (1390) de Gaston comte de Foix.

Von Wartburg pense que râble  en parlant du lièvre est un mot de chasseurs, qui est passé  dans la langue générale au cours du XVIe  siècle. La première attestation en français de râble (1532) vient de l’auteur de Pantagruel et Gargantua! Le mot s’est répandu ensuite dans les dialectes. Il y a donc deux histoires.   Rutabulum > redable en occitan, ou  rouable, roable en ancien français avec le sens « tire-braise » qui a eu une évolution à partir du latin.  D’autre part  râble (de lièvre) qui s’est répandu à partir du XVIe siècle dans tout le domaine galloroman.  Les formes occitanes avec –e- s’expliquent peut-être par une influence du mot rèble(s) « de la blocaille: petites pierres pour remplir entre les parements d’un mur »(S1), du verbe reblar « remplir, garnir de blocaille » (S1) du latin replēre « remplir ». Cette explication ne me convainc pas à 100%. Une autre explication de C. Nigra dans l’Archivio Glottologico 14, p.374.

Pour le moment aucune étymologie est vraiment satisfaisante. Si vous avez une idée…

A Die et à Trièves les formes sont identiques: riable s.m. « dos » et « rivet du boulanger ». (Schook)

  1. Fourgon « Longue barre métallique ou longue perche garnie de métal utilisée pour remuer la braise ou la charge d’un four, d’une forge, d’un fourneau, ou pour attiser un feu. » (TLF). Le fourgon « automobile » doit probablement son nom à cette barre;  même mot que fourgon 1, ce mot ayant dû désigner successivement le « bâton de la ridelle » puis la « ridelle » et enfin la « voiture à ridelle » (ces deux derniers sens étant attestés en prov. mod. : MISTRAL, s.v. fourgoun) TLF

Mats, mait, meit "pétrin"

Mats, mait, meit « pétrin » nous vient du grec  μαγις , μαγίδος «pâte, sorte de pain; plateau rond de balance; pétrin», qui était le nom usuel dans le sud de l’Italie, la  Magna Graecia. Ensuite ce nom a gagné Rome et les Romains l’ont latinisé  sous deux formes : magis, magidis et plus simple en  magida.

Grande Grèce         

maït provençal

Dans la région de l’Ile de France et par conséquent en français c’est le type pétrin (< petrinus) qui domine mais en province c’est le type maie de magidem.  Dans les parlers du Nord de la France  le type maie  est concurrencé par  huche (< hutica ) et par  arche (< arca), dans le Midi par les dérivés de pasta  et par mastra en provençal et est-languedocienun autre mot d’origine  grecque : μακτρα « pétrin ».  Cf. le Thesoc s.v. pétrin 1 Vous y verrez e.a. que le type  arche  est aussi présent dans le Sud-ouest (Creuse, Hte-Vienne) et que le type pétrin  a gagné du terrain.

2. Le pétrin, ou « maits à paîtrir », était une pièce essentielle du mobilier paysan, comme en témoignent les inventaires successoraux et les estimations des apports dotaux dans les contrats de mariage. p.1454 note ² dans   L’alimentation paysanne au Gévaudan

A Castres est attesté le composé  raymatch « coupe-pâte dont se sert le boulanger pour détacher la pâte du pétrin ».

Dans le sud-ouest mèi, mèit  s.f. désigne aussi le « support pour tuer le porc, consistant en règle générale, en un pétrin, mais retourné » d’après les dictionnaires locaux.  Dans les Hautes-Pyrénées le dérivé mèitéto sert à la même action, mais il est creusé dans un tronc d’arbre. Si vous avez une photo faites me la parvenir s.v.p.

A ma demande La vieille chouettespécialiste de la cuisine locale et régionale, m’a donné tous les renseignements sur la mèi telle qu’elle est utilisée dans la région de Montauban quand on va « far lou tessou ». Je joins sa description savoureuse en format pdf.  la maie du tessou.  D’après elle la maie  sert à « faire la toilette du tessou« . Pour le saigner on le suspend! Ci-dessous son dessin.

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  1. La distinction faite par le Thesoc entre le type mag  et le type maid  ne m’est pas claire. Pour les deux formes l’étymon est le même.

Avaus "chêne kermès"

Avaus, abaus  « chêne kermès; chêne à kermès, quercus coccifera ». L’étymologie est inconnue1. Lisez l’article de Josiane Ubaud sur l’avaus, nom plutôt rare. Aucun attestation dans le Thesoc. s.v. chêne, variété de -. Le but de Mme Ubaud étant de « normaliser »  les noms des végétaux dans tout le domaine de la langue d’oc, elle choisit un nom que personne ne connaît.  J’ai parlé à plusieurs bons connaisseurs des plantesil m’ont répondu « Ah, tu veux dire le  garric ».  Je fais donc la promotion du garric.

La plus ancienne attestation date de 1019  du nom mons Avalsarius dans le Cartulaire de  St. Victor (Marseille)  qui s’appelle maintenant  le Vaussier  près de Beausset dans le Var d’après la source du FEW, mais  que  Google ne le connaît pas et me suggère le mont Gaussier  dans les Alpilles.

Cliquez sur cette belle image de Wikipedia!

chêne plein de kermès

avaus

Le nom du  Mont Gaussier  de St-Rémy de Provence  a peut-être la même origine.     L’abbé de Sauvages écrit en 1756 :

Agôoussës ou avôoussës, le petit chêne vert épineux qu’on trouve dans les landes du Languedoc & sur lequel se nourrit,  un insecte connu depuis longtemps sous le nom de Kermés  ou  Graine d’Ecarlate  & depuis peu sous celui de  Galle-insecte que Mr de Reaumur lui a donné, en apprenant au monde savant que ce qu’on regardait comme une excressence de l’arbre étoit un véritable animal.

La même forme  agaousses  est attestée à Carcassonne. L’alternance  -g-  et  -v-  se trouve dans d’autres mots.

Dans la deuxième éd. de son Dictionnaire l’abbé de Sauvages donne en plus le sens « arrête-bœuf » pour avôoussës, mais il est le seul. D’après l’ ALF  abàou  signifie « houx » à Les Matelles dans l’Hérault, une confusion qui s’explique parce que les feuilles du houx sont également piquants.

Le nom Kermès a une origine arabe qirmizī « de la couleur de la cochenille »; il était utilisé pour désigner un ver, une larve, ou un insecte.  ; pour l’étymologie le TLF .

Le parasite était récolté dans le sud de la France (Languedoc et Provence) sur le chêne-kermès; on recueillait la cochenille qui était immobile, de forme sphérique et de taille minuscule (6 à 8 mm). L’espèce était ramassée, desséchée et broyée pour tirer une teinture rouge écarlate. La récolte, par matinée, était d’environ 1 kg de “graines”, de quoi produire 10 à 15 g de pigment pur. Cette couleur, magnifique, resta inchangée pendant des siècles. C’est l’écarlate qui servi à teindre les étoffes des tissus royaux, la laine et la soie. Sa présence a été décelée dans des peintures néolithiques, en France et sur les momies égyptiennes.Voir Wikipedia

Dans la 2e édition de son Dictionnaire l’abbé de Sauvages site également le mot  grâoubio  avec le sens avaousses, également d »origine inconnue.

Michel Wienin  complète cet article avec la note suivante:

Je connais ce mot abau(s) autour d’Alès, avau(s) vers Uzès et en Provence au sens de chêne kermès, arbuste épineux qui héberge la cochenille à teinture (insecte devenu assez rare actuellement).
Sec et enflammé, il brule comme les résineux avec de grandes flammes claires mais plus chaudes que celle des pins et faisant peu de noir de suie. Dans la zone des garrigues, il servait aux fourniers à donner un « coup de feu » pour dorer un tian ou un dessert. Le passage du nom de l’arbuste à celui du fagot me semble facile à admettre ; même chose que pour le hêtre et le fagot.

S’abaussir / s’abaussejar, c’est s’égratigner les mollet en bartassant.

Amistosament

 

  1.   FEW XXI, 64a

Afachados

Afachados « châtaignes rôties » est le participe passé du verbe afachar  « préparer, accommoder », transformé en substantif. Du point de vue sémantique il s’agit d’une spécialisation limitée aux  parlers cévenols.

Le verbe *affactare « préparer »1  a abouti à afachar  ou afaitar  en ancien occitan (vers 1200)  avec les sens  » tanner » et « apprivoiser, dresser, en parlant des animaux, surtout des faucons », un terme de chasse donc. (DOM s.v. afachar) Suivant les localités afachar  a le sens général « préparer » ou spécifique comme « égorger un animal »,  « éplucher les châtaignes rôties » (languedocien, S),   « orner, parer » (béarnais) « tanner »,  « vanner » (franco-provençal). Cf. le verbe français  affaiter « préparer » qui a pris les différentes significations suivant le milieu où il est utilisé.

padelo de las afachados (S) voir l’article sartan

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  1. *affactare n’est pas attesté  mais les formes actuelles nous permettent de  supposer que affactare  a été créé à partir du verbe affectare  sous l’influence de factum « fait ».

Vim

Vim « osier » vient du latin vimen, viminis « osier ». Le mot latin est un dérivé du verbe viére « tresser » et vimen désigne d’abord les brins d’osier qui servent à faire de la vannerie et ensuite aussi l’arbre.

Vimen a dû occuper une grande partie du domaine galloroman, puisqu’on trouve des restes jusqu’à la frontière linguistique en Belgique et des emprunts dans le moyen néerlandais (wime « brin d’osier »). Mais au cours de siècles  vimen a reculé dans le domaine d’oïl jusqu’à une ligne qui va de la Loire aux Vosges. En occitan nous trouvons le type vim, bim, vin (< vimen) dans l’est et vime, bime, qui repose sur un accusatif refait *viminem dans l’ouest. Dans quelques localités (Corrèze, Cantal, Agenais) qui se trouvent à la limite de la zone vige < vitex, nous trouvons des mots « combinés » type vinzo, vyenze qui ont ajouté à vim la terminaison de vige. Voir Thesoc s.v.osier.

L’osier jouait un rôle très important dans la vie de tous les jours. Nous trouvons par conséquence de nombreux dérivés dans les dictionnaires : bimos « treillis d’osier » (Toulouse), binbignè < vimen viminarius « souche d’osier franc qu’on recèpe tous les ans » (Castres), bimade s.f. « récolte de brins d’osier ».

En dehors du galloroman, nous retrouvons le vim en catalan vim « osier; brins d’osier », espagnol mimbre, portugais vime « osier ».

Voir aussi les articles amarinier et vige