cat-right

Bau,baou

Bau(s) « rocher escarpé dont le sommet est plat; précipice ». Le Pégorier donne exactement cette définition avec la remarque graphie préférable Baou et il répète la même définition sous bau, baus, bauso, balso. Etymologie: latin balteus, -i, m. qui a les sens suivants:

  • 1.  baudrier, ceinturon, ceinture.
  • 2. sangle (de cheval), martingale.
  • 3. bande de la sphère, zodiaque.
  • 4. bande d’écorce (des osiers).
  • 5. gradin circulaire (dans un théâtre, il marquait une ligne de démarcation entre les différentes classes des spectateurs. Gaffiot).

C’est cette dernière signification, attestée au Ier siècle, qui est à l’origine des mots occitans, principalement en provençal et en est-languedocien. Ce transfert « gradin circulaire » > « bande de rochers » s’est produit en Italie, Occitanie et en Catalogne.

Un transfert analogue s’est produit pour cingula « ceinture » > cengle « enceinte d’une ville » en Normandie, Flandres ( > néerlandais singel, Valais suisse sangla « chaîne de rochers »; cingulum > Barcelonette séngle s.m. « petites bandes recouvertes de gazon, entre des escarpements », Nice cengle « corniche d’une falaise » etc.

Un visiteur me fournit des exemples de bau dans la toponymie : près de Marseille, le Baou de Vespre dans Sainte Victoire ou le Baou de Bartagne à la Sainte Baume. Il est à noter que les géographes français ont copieusement massacré nos « noms géographiques », mais ont conservé le mot baou. Ainsi près de Toulon on trouve bien un baou de l’ Heure où ce dernier mot provient d’une confusion avec le vent du nord ( l’Aure)

Baux de Provence

A partir du sens « bande, ceinture » s’est développé le sens de obals « bûcher de fagots entassés en carré » (Aveyron), báa « tas de foin sur le pré »(Vaucluse), « gerbier, meule, tas de foin » ailleurs. Panoccitan donne dans la même catégorie sémantique abauç « bucher de fagots » et abauçar « faire un abauç« .

Bausan « balzane, tacheté, avec une bande de couleur blanche » en parlant des chevaux, baucent en ancien français, serait dérivé de balteus + anus. Dans le site le Saboteur  vous trouverez plusieurs types de balzanes.

   

Balteus (arènes Nîmes)                                                           obaous (Aveyron)

  bausan 

                                                      

ien un baou de l’ Heure où ce dernier mot provient d’une confusion avec le vent du nord ( l’Aure).Evolution sémantique: A partir du sens « bande, ceinture » s’est développé le sens de obals « bûcher de fagots entassés en carré » (Aveyron), báa « tas de foin sur le pré »(Vaucluse), « gerbier, meule, tas de foin » ailleurs. Panoccitan donne dans la même catégorie sémantique abauç « bucher de fagots » et abauçar « faire un abauç« . Baltei dans les arènes Nîmes.                                               obaous (Aveyron)                          bausanBausan « balzane, tacheté, avec une bande de couleur blanche » en parlant des chevaux, baucent en ancien français, serait dérivé de balteus + anus.

Abrivado, abrivar

Abrivada, abrivado s.f. « fête traditionnelle camarguaise pendant laquelle les taureaux sont amenés aux arènes » ; autrefois « poisson d’avril ».

abrivado

L’abbé de Sauvages donne comme sens d’abrivado : « élan, ou mouvement subit avec effort de celui qui saute ou qui court », mais le prieur Seguier connaît à la même époque le sens  « attraper quelqu’un le 1er avril »   (SeguierI f.90r qui conjugue: l’ant abbriva; s’est laissa abbriva; l’abbriveront; vous abbrivara) et pour lui l’abrivado est un « poisson d’avril » .

En 2011 une visiteuse me confirme : « J’ai entendu cette expression  s’es fach abrivar  « il s’est fait attraper » dans le Tarn, Monts de Lacaune et il me semble que mes cousins de l’ Aveyron (limitrophe) le disaient aussi.
Pour Louis Rouquier (2e moitié 19e siècle) l’ abrivado est une « farce »(Rouquier1).

Abrivado est un dérivé du gaulois *brivos « force, courage, vivacité » , attesté dans les langues celtiques et en ancien occitan briu « impétuosité, empressement ; valeur, force ; court espace de temps ; attaque ».  En languedocien moderne briou signifie  « espace de temps », dans l’Aveyron brieu « espace de temps assez long »  ou briu « étendue, espace ». A Manduel em briou signifie » longtemps » et on en fait un bravo briou.

Le verbe ancien occitan abrivar, ou s’abriva signifie  « (se) hâter, (s’) élancer ».  Ce sens s’est spécialisé  en provençal de Barcelonnette : abriva « goulu » et le verbe s’abrivar « se jeter brusquement sur quelque chose, sur des aliments en particulier. »

La tradition camarguaise veut que  des jeunes font tout ce qu’ils peuvent pour écarter les chevaux afin de voir s’échapper les taureaux ; tout ou presque est permis : jet de farine, feu, pétards, banderoles qui sortent de nulle part pour essayer d’effrayer les chevaux. Ce sens se rattache bien au sens « mouvement subit  » et  » poisson d’avril « .
Dans la Notice des Travaux de l’Académie du Gard pendant l’année 1807 (!!) numérisée par Google, j’ai trouvé une description en vers par Madame Verdier de la Course camargaise 1807. C’est très amusant à lire.

La famille de mots *brivos est bien implantée dans le Midi, (cf. Alibert, s.v. abrivar et briu pour les sens et les nombreux dérivés). Français, espagnol, portugais et italien brio ont été empruntés à l’occitan. Les patois d’oïl ont surtout repris le verbe abriver, embruer « lancer, mettre en train » .

Par hasard je suis tombé sur le site www.herodote.net qui explique le pourquoi des  » poissons d’avril  » :

Depuis près d’un demi millénaire, le 1er avril donne lieu en France et dans quelques autres pays à d’aimables farces surtout pratiquées par les enfants et leurs parents. Cette tradition semble remonter au roi Charles IX. Avant lui, en France, l’année calendaire commençait le 25 mars et, de ce jour jusqu’au 1er avril, les Français avaient coutume de se faire des cadeaux pour célébrer le passage à l’année nouvelle. Par l’Edit de Roussillon du 9 août 1564, le roi de France décida de reporter le début de l’année au 1er janvier, sans doute pour s’aligner sur les pays voisins. Cette décision fut généralisée à l’ensemble des pays catholiques en 1582 par la papauté.
En souvenir des temps anciens, les Français n’en continuèrent pas moins à se faire des cadeaux « pour rire » à l’occasion du 1er avril. Comme le 1er avril coïncidait aussi avec la fermeture de la pêche, la période étant réservée au frai, des plaisantins auraient eu la bonne idée de lancer dans les rivières des harengs pour tromper l’impatience des pêcheurs d’eau douce ! De là, croit-on, l’origine des « poissons d’avril ».

Mais il y a d’autres explications : « On appelle Poisson d’Avril, un poisson de figure longue & menuë dont on fait une pesche fort abondante en cette saison, qu’on nomme autrement Maquereau : & parce qu’on appelle du même nom les entremetteurs des amours illicites, cela est cause qu’on nomme aussi ces gens-là Poissons d’Avril.  » (Dictionnaire d’Antoine Furetière (1690.)

Basano

Une basana à Manduel. (amadou en français).

Basana, basano  signifiait à l’origine « peau de mouton retourné »  et vient  de l’arabe bat.ana « doublure d’un vêtement », (encore de nos jours dans le Maghreb) prononcé  badana en espagnol, où badana a pris le sens de « peau de mouton tanné » qui servait souvent de doublure, comme au Portugal : badana. A.Rey explique la forme occitane avec -z- comme un emprunt par l’intermédiaire de l’espagnol mais  le -t- noté avec un point en dessous  en écriture arabe est une consonne complexe et il est bien plus probable que dans notre région elle était identifiée comme un –z-. badana  FEW XIX, 29b
Le sens de l’ancien occitan besana (Narbonne XIIIe s.) et du languedocien basano « peau de mouton tannée » a abouti par métonymie à « couleur de la peau tannée ». C’est aussi la couleur qui domine dans le sens « amadou » (Alibert) et dans s’abasani v.r. « se flétrir, se rider, devenir usé »(Alès),« se plisser, s’user, pourrir »
(Puisserguier), composé du préfixe a– et basano. »donner ou prendre la couleur basanée »; substantivé abasaniment.

Coupe transversale d’un amadouvier – 1 : croûte dure, 2 : chair ou trame (amadou), 3 : tubes (cliché : B. Roussel).

Le sens « peau » se retrouve dans le mot basanat « ventru » à partir d’une « peau du ventre bien tendue ».

 

Wikipedia:  fr.wikipedia.org/wiki/Amadou_(matière)

L’amadou est un matériau spongieux constituant la partie supérieure de la chair de certains champignons, sorte de feutre naturel utilisé séché depuis la Préhistoire, principalement pour allumer le feu, mais aussi…..é

argues, -agues, -ange, toponymes

-argues. Beaucoup de toponymes dans le Midi se terminent par le suffixe -argues. Comme un visiteur me pose la question, j’en ai cherché l’origine. La source incontournable pour tous ceux qui s’intéressent à la toponymie française est le livre d’Auguste Longnon. D’après lui -argues vient d’un suffixe -anicus ajouté aux gentilices « Nom du groupe de familles (lat. gens), intercalé, dans le nom d’une personne, entre le prénom (praenomen) et le surnom (cognomen) » (TLF). Un exemple probant tiré du   Dictionnaire Topographique du Gard:


Le suffixe -argues se trouve dans le dép. 13, 30, 34, 81, 12 et 15; il devient -agues dans l’Aude et la Haute-Garonne, ange dans le Puy-de-Dome et la Corrèze. Dans l’Hérault il y a en plus Portiragnes.

 

En format PDF, vous trouverez ici les pages du livre d’A. Longnon. Longnonp.93 argues en bas de la p. sous le n° 372;  Longnonp.94 argues contient les noms de villages, la suite à la p.95.  Longnon p.95

Quelques exemples: Acutianicus > Guzargues (Hérault), Albucianicus > Aubussargues (Gard), Bullianicus > Bouillargues (Gard), Granianicus > Gragnague (Hte-Garonne), Julianicus > Julianges (Lozère),  Marcianicus > Massargues (Gard), Marsange (Hte-Loire), Massanges (Puy-de-Dôme).

La p.95  du livre d’Auguste Longnon interessera aussi les Domergue < Dominicus et les Rouergats < Ruthenicus.

Agast, agas

Agast, ou agas s.m. « érable; érable à feuilles d’aubier ». Étymologie : grec akastos « érable » . D’après les dictionnaires agast n’est connu qu’en provençal et en est-languedocien.  L’abbé de Sauvages ajoute que le bois d’agas sert pour le charronage. Pour Mistral l’agast est « l’érable de Montpellier ». (Acer monspessulanum L.)

Ce nom est limité au parlers à l’est du Rhone et une zone du est-languedocien. Pour le moment on n’a pas d’explication de cette limite géographique.  Le FEW signale le mot basque gaztigar « érable » qui pourrait être un emprunt à l’occitan avec un suffixe basque. FEW XXIV,276

 

Érable de Montpellier