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Plan

Plan s.m. « surface plate », adj. « bon, bien; lisse, plat « . Etymologie :  latin planus « plat, uni ».

En langue d’oïl il y a eu confusion entre les représentants de planus  devenu [plain] et  plenus [plein] avec une prononciation identique. (Cf. le mot  néerlandais plein  « place ».)  Cela ne  s’est pas produit en occitan plan<mais > plen.

Les expressions citées par Alibert planponh « une poignée de main pleine » et plan-cant « plein chant » sont donc des emprunts au français. D’autre part l’adjectif plan n’est attesté en français que depuis 1520 et pourrait être un emprunt à l’occitan et non pas au  latin comme prétend le TLF. qui écrit  que l’expression plan-plan « doucement » vient du provençal, où plan « doucement » est attesté depuis la 2e moitié du XIIIe siècle, dans le roman Flamenca.

Dans le  Compoix de Valleraugue est mentionné un  plan cayriel. Je pense que cela veut dire : « un plan  « surface plate » où peut passer une charrette » un  cayriel,   dérivé de carrus « voiture » emprunté par le latin au gaulois. J’ai l’impression que le scribe a voulu franciser le mot (déjà ancien) occitan (camin ou pon) carral « praticable aux voitures ».  Comparez aussi ancien occitan Planil, planayo, planoulet « petit terrain plat ».

Une autre possibilité : cayriel = cairel  « un plat pavé » d’après Alibert. Dans ce cas l’étymon est latin vulgaire *quadrellus « carreau ». Voir Carrel.

Plantolièr, plantolièra

Plantolièr, plantolièra « pépinière de châtaigners, de mûriers, de choux, d’oignons, de poireaux »(Alibert).

Une première et unique attestation dans le Compoix de Valleraugue (1625) : « et plantholier de castagniers » (tome 2 page 22). Quelques attestations en occitan moderne (voir Google), et plantolou à Agen.

Plantolièr, plantolièra est un dérivé du verbe plantare « mettre une plante en terre ». Le suffixe -ol- avait autrefois la valeur d’un diminutif  d’après Alibert, p.35,  et le suffixe -ariu > -ier, -iera sert à créer des substantifs abstraits.

Planta « plantation », qui vient du verbe latin plantare ,  est un bon exemple de l’intérêt de l’étymologie  » histoire des mots ».     Les Romains n’avaient pas la notion plante au sens « Être vivant appartenant au règne végétal ». La notion « règne végétal » n’apparaît qu’au XIIIe siècle en latin médiéval, et au XVIe siècle en français et en occitan. En latin classique planta, -ae, déverbal de plantare « planter » ne désignait qu’une bouture à planter, puis un jeune plant, à côté de herba qui ne recouvrait que partiellement la notion actuelle de plante puisqu’il excluait les végétaux désignés par arbor « arbre ».

La question qui se pose est de savoir si cela implique une certaine vision du monde que la langue nous impose. Un autre exemple : un avunculus « frère de la mère » n’a pas le même statut qu’un patruus « frère du père ». Est-ce que pour nous la protection des animaux inclut les pucerons  « non », les abeilles  « oui », les papillons  « eh.. »?

Une jolie image d’un plantolier moderne à Genolhac (30) :

          

et une plante de pied de Marilia Fayh (goldebicicleta)

Latin planta signifiait « bouture, etc.» mais aussi « plante du pied ». Ce dernier s’explique par le fait que pour planter on foule la terre avec la plante du pied. Ce sens vit aussi en italien pianta, en catalan planta des peu où s’est développé le sens « habitation du rez-de-chaussée » et en espagnol llanta «jante d’une roue ».

Platussar

Platussar « bavarder ».    Un verbe très courant en occitan et en français régional.  Platussar « bavarder » est bien attesté dans le Limousin et le Périgord, comme le substantif platussá « femme bavarde » (FEW IX, 50b).  Cf. ce blog . « Quoras auras-tu ‘chabat de platussar ? « .

L’étymologie est le  latin vulgaire plattus « plat », qui a pris le sens « langue » en moyen français dans l’expression jouer du plat et le dérivé platine « Verve, faconde, bagout » (vieilli TLF ) Le Thesoc fournit un seul exemple platinar « bavarder » à Castries(34).  Je pense que le verbe  platussar  a été créé indépendamment du français.

En allemand le mot plat a pris le sens « langue régionale » dans le composé plattdeutsch: « dem norddeutschen flachland angehörend, die volkssprache desselben redend, in ihr geschrieben, den bewohnern desselben eigen » (Source).  La source explique que cette forme de l’allemand est parlé et écrit dans la plaine nord-allemande.  ein plattteutscher, inferioris Saxoniae incola. (Grimm). En néerlandais plat praten signifie « parler avec un accent local prononcé ou parler le parler local ». Les accents et les parlers locaux n’y ont point une image négative comme c’est souvent le cas en France. En allemand existe un  très joli mot pour patois, ou parler local:  Mundart , littéralement « la façon dont est formée la bouche »

Platassejar « jouer du plat de la langue » d’après Alibert. Une expression vieillie en français. Dictionnaire de l’Académie de 1835 et 1878: « Donner du plat de la langue Faire de belles promesses qu’on n a pas dessein d’exécuter,  faire merveille du plat de la langue Chercher à étonner à étourdir par de grandes phrases par des récits extraordinaires » .  La forme platassejar ne se trouve pas dans les dictionnaires occitans consultés par le FEW.

Plegar, plier

Plega(r) « plier » mais aussi « emballer » vient du latin plicare « plier ».

Plier a gardé en français régional le sens « emballer » (Lhubac), qui était encore admis par l’Académie en 1835. Le TLF donne l’exemple suivant :

« il (= Napoléon) est entré à Vilna, chassant devant lui l’Empereur, qui à peine eut le temps de plier sa vaisselle. J. DE MAISTRE, Corresp., 1812, p.169. »

En occitan nous trouvons des expressions qui n’ont jamais eu cours dans la langue d’oïl. Se plega la testo « se coiffer » (S), plüga « fermer les yeux; dormir; jouer au colin-maillard », plegá las espaulos « hausser les épaules, plier les épaules ». L’abbé fait une distinction entre hausser les épaules : « on les hausse pour marque de mépris, de pitié, d’improbation; on les plie pour marque de soumission de résignation » Le sens actuel de hausser est d’après le TLF : « Manifester son indifférence, sa résignation ou son agacement par un léger soulèvement d’épaules ».
De plugous est « à tâtons » (S), en béarnais plegá est « plier les gerbes » d’ou la pléga « récolte ». L’abbé de Sauvages cite aussi le mot plégos « les antoques (=?) ou lunettes des chevaux qui tournent en rond pour fouler le grain ».
Le -ü- dans certaines formes comme plugous  est dû à l’influence du verbe *cludicare « fermer », (dérivé de claudere « fermer ») qui a abouti en occitan clucar, clugar « fermer (les yeux) ».

 

Plegar, plier

Plega(r) « plier » mais aussi « emballer » vient du latin plicare « plier ». Plier a gardé en français régional le sens « emballer » (Lhubac), qui était encore admis par l’Académie en 1835. Le TLF donne l’exemple suivant : « il (= Napoléon) est entré à Vilna, chassant devant lui l’Empereur, qui à peine eut le temps de plier sa vaisselle.J. DE MAISTRE, Corresp., 1812, p.169. »

En occitan nous trouvons des expressions qui n’ont jamais eu cours dans la langue d’oïl. Se plega la testo « se coiffer » (S), plüga « fermer les yeux; dormir; jouer au colin-maillard », plegá las espaulos « hausser les épaules, plier les épaules ». L’abbé fait une distinction entre hausser les épaules : « on les hausse pour marque de mépris, de pitié, d’improbation; on les plie pour marque de soumission de résignation » Le sens actuel de hausser est d’après le TLF : « Manifester son indifférence, sa résignation ou son agacement par un léger soulèvement d’épaules ».

De plugous est « à tâtons » (S), en béarnais plegá est « plier les gerbes » d’ou la pléga « récolte ». L’abbé de Sauvages cite aussi le mot plégos « les antoques  ou lunettes des chevaux qui tournent en rond pour fouler le grain ».

Le -ü- dans certaines formes comme plüga est dû à l’influence du verbe *cludicare « fermer », (dérivé de claudere « fermer ») qui a abouti en occitan clucar, clugar « fermer (les yeux) » (Thesoc).


Podar

Podar, pouda  « tailler, tailler la vigne; trancher, élaguer ». Etymologie : latin putare « tailler »  devenu potar déjà en latin vulgaire. En latin classique putare signifie « nettoyer, éplucher, peigner (la laine) » et dans le milieu viticole cela devient « tailler la vigne ». Il est conservé tel quel autour de la méditerrannée: catalan, espagnol, portugais podar, italien potare.

En galloroman  podar  vit en occitan et en franco-provençal. Dans la langue d’oïl il a été remplacé par le type taliare.
Podar
est la base d’une série de dérivés comme poda « serpette pour tailler la vigne »,  poudé (Alès)ou poudetto « serpette », podador, poudaire « vigneron qui taille la vigne », poudar « grande serpe ». D’après l’abbé de Sauvages, elle est emmanchée d’un long bâton et sert à tailler les haies, les charmilles du jardins ».  Les  poudïos  sont  les « scions qu’on retranche d’un arbre; sarments ». Dans le Périgord on a créé le verbe poudassá « mal tailler ».

poda   le  poudar

Qué poudo lon, béou un an, que poudo court, béou toudjour «  « Celui qui taille long, boit un an, celui qui taille court, boit toujours » en patois de Valleraugue (Gard).

Poleja, poliege

Poleja, polelha s.f. « poulie, bascule de puits, rotule du genou »; poliege  » Système d’irrigation des jardins permettant de remonter l’eau  » jardin arrosable avec poliege de la rivière « (Compoix Valleraugue). . A Nîmes au XIVe s. pulieja  » poulie « .

Poleja a été emprunté au XIIIe s. au grec polidion « poulie « .  La diphtongaison dans pulieja, poliege  fait supposer un latin vulgaire polègia. L’emprunt est donc assez ancien. Le même mot existe en italien : poleggia.  On ne sait pas si le mot grec est venu par Marseille ou directement de l’italien. La forme espagnole  polea est un  emprunt à l’occitan.

Voir l’article posaranca

Polit, polida

 

Avec les jaunes sian poulits. Polit, polida a totalement changé de sens. Comme l’ancien provençal  baizar « embrasser » a suivi l’évolution parisienne.

moustelo

Autrefois : Polit, polida, pouli(t), adj. « beau, joli, mignon » attesté en ancien occitan depuis le 13e s. vient du verbe latin polire « lisser, polir ». Le partcipe passé politus signifie déjà en latin « de bon goût, cultivé, raffiné » et déjà au VIIe siècle politus est devenu synonyme de bellus. Dans une grande partie du domaine occitan polit, pouli(t) a gardé ce sens. Avec l’adverbe plan, cela donne plan pouli « bien beau ».

En languedocien polida(-bèla), polideta, polit  comme substantif désigne la « belette ».  J’ai l’impression qu’il s’agit d’un emprunt/traduction du français belette. Voir l’aticle moustelo

Les Occitans aiment bien parler, ils créent donc des rallongements comme poulidetomen, polidetat, poulidour« beauté », apoulidir « enjoliver », etc.

 

Pompa a l'óli

Pompa a l’óli « pompe à l’huile ».

La pompa a l’ óli [pompaloli] fait partie des treize desserts de Noel en Provence.  En français régional, ce mot donne souvent lieu à un petit sourire et à de la méfiance des belles estrangères.  » Mais non, ça fait pas grossir« ! Je peux le prouver par l’étymologie. Le verbe pompi  signifie  « frapper des pieds en marchant »,  ailleurs « trépigner »,  à Cahors c’est « frapper, battre rudement ». Tout cela ne fait pas grossir, au contraire. En occitan un pompidou (avec minuscule bien sûr) est un « coup retentissant ».

                    
pompa a l’oli  
               Aveyron                            Alpes                                            Provence

L’étymon est une onomatopée pomp- comme pamp-,  pimp-. Pomp- sert à exprimer deux sensations : une acoustique « un coup » ou une visuelle « quelque chose de rond, une boule ». En occitan, sauf en Gascogne, mais aussi en Lyonnais, des pompes sont des petits pains ou des gateaux. Dans les dictionnaires patois nous trouvons des définitions comme « gâteau de toute espèce; galette aux coigns; gateau fait avec la pâte de pain, mince et ajourée en quartiers; pain plat fait avec le reste de pâte ». A Marseille n’appelez par les poumpiers ! ce sont des gens « qui aiment les gâteaux »!

Un visiteur aimable me signale:

« que la poumpo à l’óli est typiquement de la région marseillaise (à ma connaissance), pour le Gard, ce sont les oreillettes qui sont servies à Noël et dans d’autres parties de la Provence, le « gibassier« .

Mistral donne les synonymes suivants: 

En langue d’oïl pomp- sert à désigner des objets de décoration ronds , comme des noeuds de rubans, des touffes. Un nez de pompette est « un nez violacé d’ivrogne » , un pompon « une houppe » et une pomponnette « une chanson à boire populaire ». Depuis le XVIII siècle pomponné veut dire « orné avec recherche ».

       

pompette                         pompon d’or             pompon de soldat

Il n’est pas impossible que le verbe provençal et languedocien espoumpi « gonfler, imbiber du pain dans la soupe », comme verbe réfléchi « se gonfler, s’imbiber d’un liquide » et l’adjectif espoumpi « dodu » ( déjà Sauvages) ont détaché sémantiquement sur la pompa a l’oli.

Il est clair que la pompa a l’oli n’a pas de rapport avec les pompes funèbres qui vient du latin pompa « cortège » , ni avec les pompes à eau ou d’huile de moteur qui nous sont venues des Pays Bas. Ces dernières viennent  du néerlandais pomp « pompe », qui en français, au pluriel, a développé le sens « chaussures ». Voir le TLF à ce propos.

Pompilh "mollet" et l'anglais "...

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Pompilh « mollet »  vient du  latin pulpa « partie charnue du corps des animaux, sans graisse et sans os »  et  par extension « partie tendre de quelque chose, e.a. mie de pain ».

Le sens de pulpe « partie charnue du corps » a été admis par l’Académie Française de 1694 jusqu’à 1878 comme « terme didactique » pour la langue française , mais il n’est vraiment vivant que dans les parlers occitans (poupo) et franco-provençaux (porpa, pourpa), comme ses dérivés poupu, paoupu « potelé ».

A Marseille un poupas est « un morceau de viande de mouton » mais à la montagne, à Barcelonnette un poupas de terre de la »terre trempée par les eaux ».

Le franco-provençal et l’occitan ont gardé poulpe avec le sens « mollet », sens  qui doit avoir existé en latin parlé, parce qu’on le trouve dans toutes les langues romanes, (italien polpa, catalan, portugais polpa « pulpe ») et le mot officiel du latin sura a disparu1.
En occitan comme en franco-provençal2 ce sont des dérivés qui gardent cette signification : Genève porpü, en Savoie porpé, porpet, à Trièves (Isère) pourpi, porpil (SchookT), et dans les Alpes-Maritimes pourpon.  L’italien a un autre dérivé polpaccio « mollet » attesté depuis  1385.

En languedocien on a inséré un -m- : poumpil sous l’influence de la famille pomp- qui dans la même région désigne des « galettes, des gâteaux ronds ». (Nous ne pouvons pas supposer que les Languedociens sont des cannibales, même si, parfois il y a des pompilhs tentants). A Castres pounpilhat se dit de quelqu’un « qui a de gros mollets ». Dans quelques endroits pulpa désigne d’autres parties du corps : Grenoble pourpi, Nice pourpoun « paume », dans le Tarn et Garonne poumpil est la « pommette ».

            

Au XVIe s. latin pulpa a été emprunté par le français avec le sens « partie charnue des fruits et légumes » et remplace l’ancien poulpe qui était homophone de poulpe < polypus « octopus ». Anglais, néerlandais pulp, espagnol pulpo

Anglais pulp a eu une évolution intéressante. Pulp est le mot pour « pâte de fruits » etc, mais aussi pour « pâte à papier » ce qui a abouti à « papier de mauvaise qualité » > « papier utilisé pour les livres bon marché » > « livres bon marché » > « littérature de gare » ou meilleure traduction « de sensation, parlant de crimes, violences, scandales ». dans Pulp fiction 

Il y a maintenant la  Pulp TV!

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  1. Poulpe « mollet » apparaît une fois dans un dictionnaire français, celui de Philibert Monet en 1636, mais le père Monet est Savoyard, il vient de Bonneville (Hte Savoie), et son témoignage est donc suspect
  2. cf. Thesoc pour la répartition géographique