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Chouio, cholha

Cholha, chouio (M), « émincé, griblette, tranche mince de viande pour le gril; côtelette; ami préféré (M): laido chouio « vilain, laideron, maritorne grossière (M); bévue (Alibert) ».  L’occitan chouio, cholha attesté principalement en provençal et  d’origine inconnue.
Le renvoi de Mistral vers l’espagnol chulla « tranche de viande », m’a incité à continuer mes recherches. Le DRAE donne comme origine de chulla le catalan xulla « lard; côtelette ».

Catalan xulla est attesté depuis le 15e siècle  et vient du latin axungia « graisse d’essieu ou de porc » d’après le  DEC , devenue ensunya dont une variante *enxunya a été dissimulée en enxulla et réduite à xulla.

Les deux langues, le catalan et l’occitan formaient une grande zone géographique il n’y a pas très longtemps.  Le mot catalan xulla est mentionné comme faisant partie des représentants d’ axungia (composé de axis « essieu »+ unguere « oindre »)  dans la nouvelle rédaction du premier volume du FEW  (vol. XXV, p.1303b), mais  notre cholha provençal placée dans les Incognita (FEW XXI;490b) a été oublié.

Chourler "boire en aspirant"

Chourla(r) « boire à long traits, buvoter,  beaucoup, longtemps …. » etc.  toujours « en faisant du  bruit »  …chourlant lou vin dous.(Homère1) ,  devenu chourler   en français régional 2; mon tit brapto en train de chourler !!!  une copine(?) à propos de cette photo:

           

L’étymologie est l’onomatopée tšurl- que nous retrouvons en corse chjurlá « boire », en allemand schlürfen, néerlandais slurpen, anglais to slurp « boire en aspirant ». Le verbe existe aussi dans les parlers franco-provençaux et normands. Les attestations occitanes ne sont pas très fréquentes, mais on les trouve de Barcelonnette chourlar « buvoter » jusqu’en Béarn  churla « boire ; terme de cabaret ». A Agen un  tchurlet  est un « enfant qui veut constamment téter ».

Stéphane (voir le commentaire ci-dessous) me rappelle que j’avais déjà écrit l’article  fourrupa  qui a le même sens, mais est placé parmi les mots d’origine inconnue.

  1. Odyssee, Chant X, traduit en provençal par C. Rièu
  2. René Domergue, Les hommes (sc. les gavach, gavot) avaient la réputation de chourler (picoler), mais c’était vrai surtout pour les vendangeur..

Chucar

Chucar  « sucer, savourer, humer » est dérivé du substantif chuc« suc, jus » et vient du latin sucus « suc, jus », devenu suc  « suc, suint » en ancien occitan et su(c) en provençal, chuc en languedocien. Cette famille de mots est limitée à l’occitan. (Français suc a été emprunté au latin à la fin du 15e siècle.) Les Toulousains ont créé une expression ni suc ni muc « sans goût ni valeur », qu’on retrouve en Rouergue. Le verbe sucar « sucer » est attesté depuis le XIVe siècle. Dans les parlers modernes on ne trouve que des formes avec (t)ch-.

En français régional actuel le sens est souvent passé à « boire, boire avec excès », par exemple à Toulouse: tchuquer v.tr. « boire (beaucoup) ». Ils ont tchuqué comme des outres  » (Source). L’auteur ajoute :

 » On peut entendre « tsuquer » chez les personnes de famille tarnaise, lotoise ou tarn-et-Garonnaise, qui veut plutôt dire suçoter, pour les bébés. « 

En béarnais un chucadou est quelqu’un « qui boît beaucoup », et une chucadère « une sucette, un tétin ». A Nice, Carcassonne et dans la Hte-Garonne est attesté chuquet « lathraea,  » une plante parasite stricte dépourvue de chlorophylle. Leur tiges souterraines blanches, recouvertes de feuilles écailleuses charnues, possèdent des suçoirs qui puisent la sève des racines de leur hôte. » (Wikipedia).
Dans le Tarn et Garonne, un chuco-bin est un « bourgeon gourmand sur la vigne ».

chuquet "lathraea"

Photo de lathaea clandestina (Wikipedia)

Cincarat

Cincarat. Jambon en cincarat est du jambon coupé en lamelles.

Voir les autres membres de cette famille de mots dans l’article  quincarlota

Clap, clapàs

Clap « pierre » s.m. clapa « éclat de pierre » s.f., clapàs « tas de pierres ». Ces mots  font partie d’une famille  dont la racine pré-romane klappa est répandue dans le Sud de la France,  le Nord de l’Italie et en Catalogne.  Clapa désigne en général  « une pierre plate». Clap a pris un sens spécifique  dans les Alpes-Maritimes (Thesoc). »auge des porcs ».

Labbé de Sauvages donne aussi le mot clap « pierre » et les proverbes: Las peiros van as clapas « le bien cherche le bien, la balle va au joueur » et Aco’s pourta las peiros as clapas « c’est porter de l’eau à la mer » .

Les dérivés. Clapás (+ –aciu) est provençal et languedocien. Un lecteur me signale que le nom traditionnel  de Montpellier  est masculin : lo Clapás (= le tas de pierres) et non las Clàpas (= les pierres) ».

Clapier est plutôt  provençal.  En ancien provençal un clapier est « l’ensemble des trous où les lapins se retirent; garenne à lapins », prêté au français au XIVe –XVe siècle.

Autres dérivés : languedocien aclapár « couvrir de pierraille; ensevelir »; occitan aclapo-mort « fossoyeur ». a Mende clapisino « terre rocailleuse »,

Un clapas de la Couvertoirade

En ancien occitan a existé  aclapar v. tr.  « couvrir de pierres, ensevelir »  Et an ben conegut vivatz / Que laintz ac home cassat, / Que las peyras an aclapat. Source: Dictionnaire de l’ancien Occitan. (lien direct). Ce sens est conservé dans  aclapo-mort « fossoyeur ».

En français régional aclaper « ensevelir » est utilisé dans la pétanque. Voir René Domergue.

Il n’est pas toujours facile de distinguer la famille  clap « pierre » de le famille  klapp « coup »,  ine onomatopée, comme par exemple claparda « sonnaille »

Clapardo, clapo

Claparda « sonnaille », clapo. Le languedocien clapo « sonnette de mouton », Aveyron clapardo,   Clermont esclapaire « celui qui fabrique des sonnettes », font probablement partie d’un groupe de mots dont la racine est une onomatopée klapp qui imite «un coup, une claque » qu’on trouve dans toutes les langues romanes et germaniques, comme nl. klappen « applaudir » en flamand « bavarder »,  nl. klap « coup », fr. clapoter, s’esclaffer, catalan clapa « tache » (le résultat d’une claque ! »,  etc.

Voir aussi esclapeta « eclat de bois; varicelle »

 

clapo

Clastro

Clastro, clastre, clastra est s.m. ou s.f. Pendant une ballade, à la recherche du moulin vent restauré à Parignargues, près de Nîmes, un panneau La Clastre m’intrigue. Je trouve une réponse dans le dictionnaire de  l’abbé de Sauvages (S1):  clastro est le « presbytère ou la maison curiale » une maison près d’une église pour loger les prêtres. La même définition est donnée pour les parlers d’Aix, Marseille et le languedocien jusq’à St.-Affrique. Dans d’autres endroits comme à Pézenas ou à Castres, clastre est traduit par « cloître ».  Une zone de transition vers la région  restreinte de l’occitan, en particulier le Lot, le Lot et Garonne, l’Aveyron, Albi, où caminada a pris le sens « presbytère ».

Le clastre   en Ardèche

La ferme de Clastres est implantée au sein du petit village ardèchois de Sainte-Eulalie. Clastres (cloître) fut édifiée en 1098 (sous le règne de Philippe Ier de 1060 à 1108), après l’arrivée de deux moines bénédictins de l’abbaye de St Chaffre du Monastier, chargés du service de l’église, après que cette dernière eu été donnée à l’abbaye Saint-Théofrède du Monastier (Haute-Loire).
Ainsi, jusqu’au XVème siècle, le bâtiment servit de prieuré. La construction actuellement visible, aurait été édifié en 1573. Deux portes communiquent avec l’église, le prieuré étant une dépendance.

L’étymologie n’est pas tout à fait la même que celle du français cloître < latin clautrum « tout ce qui sert à fermer une porte, ou empêche un libre passage ». .

La forme occitane clastra vient du pluriel latin claustra pris pour un singulier féminin;  c’est le  -a-  qui  est curieuse. Une faute de frappe? Google me  répond qu’il y a beaucoup de clastres dans le Midi. Dans les textes du Moyen Age nous trouvons toujours le -au- régulier : claustra et parfois crausta. L’explication est peut-être l’influence des mots occitans qui représentent le latin castrum, castra dont les sens est souvent assez proche des représentants de claustra  « fermeture, parc », comme par exemple le languedocien castrou « retranchement qu’on fait avec des claies dans une bergerie pour séparer une partie du bétail » (S1).

Clastra ou clasta existe également en catalan avec le sens « patio empierré au centre ou au devant d’une maison de paysans -cultivateurs- majorquins ». (DE dans l’article cloure).

Clau

Clau « cléf; robinet d’un fut (cf.Thesoc pour la répartition) du latin clavis « clef »

Clau de Sant-Pèire « lézard gris ». Etymologie latin clavis « clef ». Sant-Peire dans le l’Aveyron.  En grec moderne il y a une autre espèce de lézard qui a un nom apparenté : kleidoo tou …(clef de Saint-Jean).  En ce qui concerne  l’origine de cette liaison entre les Saints, leurs clefs et le lézard. Il y a deux suppositions:
1. St.Pierre règne sur la météo, sur le beau temps et quand le lézard  réapparaît il annonce le printemps.  St.Pierre est remplacé par d’autres comme St.Georges, le patron de la Catalogne.
2. Des clefs ou des heurtoirs ont souvent la forme d’un lézard.

Je croix avoir trouvé la solution dans un article d’Albert Dauzat (BDP 3.2.8.4.5.) qui signale qu’ autour du Mont-Dor (Puy de Dôme) le lézard s’appelle « croix al-iva ». A.Dauzat soutient donc ma deuxième hypothèse.

     

 

Clau de Sant-Jordi, Sant Jordi dans l’Aude et le Lot.

Clau tout seul dans l’Aude et l’Hérault.

Claveto diminutif dérivé de clau. Surtout dans l’Aveyron et le Tarn.

Croz al-iva Puy-de-Dôme (Dauzat, voir ci-dessus). Le passage de la clau de Sant Peire à la Croz(de St Peire) ou l’inverse ne pose pas de problème à mon avis. Voir les images ci-dessus.


Clausado "enceinte"

Clausado « enceinte » est dérivé du latin clausus le participe passé du verbe claudere  « fermer ». Dans de nombreux cas cette forme verbale a été substantivé,  comme dans  clau « enclos, jardin ».  Clausado  est un terme de droit ancien comme il ressort du dictionnaire de l’abbé Sauvages (S2):

L’abréviation  v.l.  signifie « vieux langage ». En effet O. de Labrusse  le mentionne dans sa définition des 3 types de Compoix ou  coupés:

Compoix à clausades : « il n’est plus tenu compte de la nature des cultures mais de la proximité de la parcelle cultivée par rapport au village. Le terroir est divisé en zones d’allivrement plus ou moins nombreuses, nommées , selon les régions, cercle, circuit, clauzade, vaute, termine ». C’est la zone la plus rapprochée du village qui est la plus imposée, l’allivrement décroît avec l’éloignement du village ». Exemple de compoix (1597 et 1652) à 3 clausades, celui de Langlade (30) en Vaunage :

Compoix Clausade par Barry J.P.1955

Sur cette carte on note également, que les zones d’allivrement, les clausades, prennent en compte la diversité, les différences de terroir (et pas seulement la distance au village). La clausade 1 est en plaine, la clausade 3  recouvre les reliefs (garrigues) (O. de Labrusse).

Le vocabulaire a changé, mais les principes sont restés! Vous retrouverez  les coumpés  et  clausades  dans votre feuille d’impôts fonciers, qui distingue fonds bâtis et fonds non-bâtis. Cherchez par exemple les définitions du mot allivrement.

 

Clavelada "raie bouclée; potasse"

Clavelado « raia clavata » ou « raie bouclée » est l’espèce la plus importante de cette famille pour la pêche.  Etymologie :  clavelada  est dérivé de clavellus  « petit clou ». Une image explique le nom occitan et latin. Clavada  est attestée en provençal et languedocien, depuis 1373.

clavada

Il y a aussi le cendra clavelada.  « potasse d’une qualité supérieure tirée de la lie de vin séchée et calcinée à l’usage des teinturiers ». L’étymologie est la même, mais je n’ai pas trouvé d’images. L’attestation en ancien occitan senres claveladas , Albi 1200, précède celle de l’ancien français. 1280.

En feuilletant le Cartulaire de Mirepoix,p.233,  je vois qu’en 1343 à Mirepoix la cendre clavelée est lourdement  taxée:  2 deniers par quintal pour le vendeur, l’acheteur et le transporteur.  Cendres clavelées?  des cendres avec des clous?

Le TLF traduit « cendres gravelées »  comme  des « cendre faite de lie de vin ».  Gravelée  a remplacé un plus ancien clavelée  dérivé de clavel  « clou,  pointe »,  la surface semblant garnie de pointes, et me renvoie vers sa source,  le FEW t. 2, p. 758a et 759, note 3.

 

gravelée ou gravelle

Ce qui suit devrait intéresser les archéologues-chimistes.  Par contre si c’est l’histoire de la médecine qui vous intéresse, il faut suivre le lien vers  Bertrand de Gordon (Wiki)  et son  Lilium Medicinae (Gallica) qui utilise la cendre de claveleure.

L’Encyclopédie de Diderot me renseigne:

CENDRES GRAVELEES, (Chimie) elles se font avec de la lie de vin : voici suivant M. Lemery la façon dont on s’y prend. Les Vinaigriers séparent par expression la partie la plus liquide de la lie de vin, dont ils se servent pour faire le vinaigre ; du marc qui leur reste, ils forment des pains ou gâteaux qu’ils font sécher, cette lie ainsi séchée se nomme gravelle ou gravelée : ils la brûlent ou calcinent à feu découvert dans des creux qu’ils font en terre, & pour lors on lui donne le nom de cendres gravelées. Pour qu’elles soient bonnes, elles doivent être d’un blanc verdâtre, en morceaux, avoir été nouvellement faites, & être d’un goût fort acre & fort caustique. L’on s’en sert dans les teintures pour préparer les laines ou les étoffes à recevoir la couleur qu’on veut leur donner. Voyez TEINTURE. On les employe aussi à cause de leur causticité dans la composition de la pierre à cautere, qui se fait avec une partie de chaux vive, & deux parties de cendres gravelées. Voyez CAUTERE.

cendres gravelées

Potasse calcinée

Dans le Nord où le bois est fort abondant on en brûle exprès ainsi que beaucoup déplantes pour retirer de leurs cendres un alkali assez fort mais très impur que l on nomme Potasse Voyez ce mot Cet alkali est toujours très phlogistiqué & contient beaucoup des matières salines étrangères dont on a parlé On emploie la potasse aux usages dont nous venons de parler les Teinturiers s en servent aussi dans quelques unes de leurs opérations On peut purifier le sel de la potasse par les moyens dont on vient de parler & en faire un assez bon alkali Le marc & la lie de vin desséchée que l on nomme gravelle étant brûlés laissent une cendre très riche en sel alkali que l on appelle cendre gravelée Cet alkali est non seulement fort abondant mais encore lorsque les matières qui le fournissent font brûlées proprement & avec attention il est le plus pur de tous ceux qui font dans le commerce s il contient du fer c est en quantité insensible & il est naturellement exempt du mélange des sels étrangers Aussi les teinturiers & autres manufacturiers dont les opérations exigent un alkali pur préfèrent la cendre gravelée aux autres cendres alkalines (Source)