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Bouirons ‘civelles’ et la pisciculture...

Les bouirons  sont les toutes petites anguilles, en français les « civelles : Jeune anguille, de la taille d’un gros ver, ainsi nommée à la fin de sa période larvaire,…TLF). En cherchant des attestations du mot arabic « espèce de moustiques », j’ai suivi les indications de E.Rolland Faune et j’ai retrouvé l’article du baron de Rivière sur les anguilles en Camargue intitulé :

Le baron  de Rivière1, un homme très cultivé, donne un aperçu de l’histoire de la pisciculture depuis l’antiquité.  Il fait des propositions pour  développer l’élevage des anguilles en Camargue. Il a beaucoup voyagé et il conseille aux pêcheurs camarguais de suivre l’exemple des Hollandais.  En effet l’élevage et la consommation de l’anguille  y est/était importante. Mais la capture des civelles pour le marché asiatique et la pollution  menacent la reproduction de l’anguille. Voir l’article dans Wikipedia. Plusieurs copains qui connaissent bien la Camargue, m’ont dit qu’il n’y en a plus pratiquement. Dans le cadre de l’Europe, il y a actuellement des tentatives de faire revivre l’aquaculture ou pisciculture des anguilles. Voir cet article en anglais.

tête de civelle de 12 jours

Dans ses  Considérations2 , le baron nous fournit plusieurs mots locaux camarguais.

Bouirons

      

L’ennemi le plus dangereux a été l’homme. Il n’y en a presque plus.

L’étymologie de bouiron  est le latin botryo, botryonem « grappe de raisins », mot emprunté au grec.   L’image ci-dessus explique bien l’évolution sémantique « grappe de raisins » > « grappe de civelles ». Antoine Thomas  nous fournit une signification analogue et une explication plus précise:

bouiron1Thomas

bouiron2

Le FEW (I, 467a) suit Mistral et  classe birounado  comme dérivé de bouiron. Comme il s’agit d’un article du FEW qui ne sera pas revu ni corrigé, j’ai consulté le LEI  s.v. botryo, -onem. Là, il y a une remarque intéressante concernant l’influence du grec dans la Gallia Narbonenis . Le grécisme botro se serait répandu à partir de la colonie phocéenne en Asie Mineure et le type botryone aurait été créé dans le latin parlé dans la Gallia Narbonensis, ce qui expliquerait la survivance de bouiroun « grappe de vers enfilés pour la pêche des anguilles » en occitan (cf. ci-dessous Mistral)  et botiro  avec le même sens   en catalan.

A plusieurs reprises nous avons constaté qu’un mot grec a été introduit en occitan et notamment en languedocien, directement par les Grecs et non pas par les Romains.  Si cette explication vaut également pour bouiron  c’est le grec βοτρυων évolué en botryon en latin languedocien de l’époque,  qui est à son origine.  Voir aussi l’article petas ou pedas.

Fréderic Mistral  a plusieurs significations et deux dérivés  dans son Trésor:

Bouiroun1 Mistral

 

Les autres mots camarguais que j’ai trouvés dans les Considérations  du baron de Rivière, sont:

Les pougaou « anguilles de 500 gr environ ».

Les bomarenques  « anguilles de 125 gr »

Les pounchurotes  « petites pointues » synonyme de lufru.

Les margagnons  ou  lachinansqu’on appelle  soufflards  dans quelques localités.

Le  cod  « filet à anguilles »

Les   boutiques ou bascules, appelés  serves   dans le Midi. Ce sont des bateaux percés de trous en communication avec l’eau.

Les  anguilles de dégout  et  dégoutter les anguilles.    Degouttar avec le sens  « égoutter » est un dérivé de goutte  du latin gutta qui avait le même sens. Le verbe  et le substantif   dégou(t) sont assez courants en est-occitan.

En languedocien il y a un dicton sé noun plóou dégouto  « se dit par rapport à tous ceux à qui échoit une chance au-dessous de leurs prétentions, mais encore passable »

___________________________________

  1. Il s’agit probablement de Louis de Rivière, maire de Saint-Gilles. C’est lui aussi qui a démontré la possibilité de la culture du riz en Camargue.
  2. Consultable ici en format PDF: Considerations_Rivière

Pougaou "anguille"

Pougaou « anguille ». L’étymologie est l’adjectif  latin pollicaris « de la longueur d’un pouce », qui en occitan est devenu pollicalis par changement de suffixe. Le mot pougaou  est né en combinaison avec anguilla   ce qui se retrouve dans le fait que pougau  est un substantif féminin d’après les dictionnaires. Dans l’Alibert  s.v. pogau on trouve en plus les sens « jeune fille bien prise, tendron ».

anguilla latirostris

anguilla latirostris

 Mais l’histoire n’est pas finie.  Pougaou est attesté dans les Bouches-du-Rhône  et à Palavas comme « anguille de la grosse espèce » . Un copain, bon connaisseur de la Camargue, me le confirme.

Le grand savant du XVIIIe siècle Henri Louis Duhamel du Monceau mentionne pour le Gard la forme pougalle  dans son  Traité général des pesches…

Gazeta, gaseta, gazette

Gazeta s.f. « journal ». Il y a deux propositions concernant l’étymologie du mot gazetta.   Mais  voyons d’abord l’histoire de la première Gazetta « journal ».

Au milieu du XVIe siècle, avant 1580 en tout cas (TLF), les gouvernants de Venise décidaient d’éditer une fois par semaine un petit journal avec des informations sur les voyages des bateaux qui se trouvaient en haute mer un peu partout dans le monde. Le port de Venise était à l’époque un des ports les plus importants du monde occidental.  Ci-dessous  une image d’un chantier naval  à Venise qui date du XVIe siècle.

               

Un chantier naval à Venise au XVIe s.                                                                                 Andrea Gritti, doge de Venise

Dans ce journal étaient  publiées aussi  les nouvelles réglementations et les décisions prises par le doge et ses conseillers . Le titre de cette « feuille volante d’information » était la Gazeta de le novite (TLF).1.

On suppose que le nom Gazeta a été choisi parce qu’elle était vendue une  gazeta ou gazzeta qui valait deux soldi (sous), frappée depuis 1538 par le doge Andrea Gritti .  J’ai trouvé une description de cette pièce de monnaie : Côté face il y a la représentation d’un lion ailé  et côté pile celle de la Justice assise sur deux autres lions, avec la devise Justitiam diligite.   Le titre de la pièce était de 452 carats par marc2.  (Source)  Sur le côté pile est écrit SANCTVS MARCVS VENETVS. Elle était en argent.

gazeta de Venise

Gazeta en argent, frappée de1559-1567

Voici des extraits de deux dictionnaires du vénitien du XIXe siècle:

gazeta    Gaza

(Source de 1821; c’est la 3e éd.)                                                                                     (Source de 1829)

Ensuite le nom  gazetta, gazette   a eu beaucoup de succès depuis  le XVIIe siècle en français, anglais, allemand etc. et a été adopté par beaucoup d’éditeurs.

Voilà pour l’histoire de l’objet.

L’étymologie du mot gazette  la plus répandue3   est gazeta  « petite pie », un dérivé du vénitien gaza « pie ».    Le lien sémantique entre  gaza  « pie » et gazeta « pièce de monnaie »  serait la représentation d’une pie sur la gazeta « monnaie »La linguiste Henriette Walter écrit   « du vénitien gazeta,  piécette sur laquelle se trouvait  représentée une petite pie » (p.170) . D’autres ont écrit qu’il y avait l’image d’une pie sur l’entête du journal, mais  dans les plus anciens numéros conservés  à Florence il n’y en a pas. (Harper)

Pourtant une  gazeta  n’est pas une piécette et il n’y pas de représentation d’une petite pie dessus.  De plus, la renommée de la pie est qu’elle est très bruyante et qu’elle jacasse et bavarde.  Il est inimaginable que les doges de Venise aient approuvé comme  titre de leur bulletin un nom qui signifie quelque chose comme La Bavarde. Ce n’est que plus tard que le mot gazette est devenu péjorative. Selon le Dictionnaire universel de Antoine Furetière (1688-1689),

« Gazette est un mot qui désigne «un petit imprimé qu’on débite toutes les semaines, qui contient des nouvelles de toutes sortes de pays. On appelle figurément Gazette, une femme qui scait toutes les nouvelles de son quartier & qui les va publier en tous lieux de sa connoissance. En ce sens, il ne se prend qu’en mauvaise part. Ce mot vient de gazetta, qui signifie une espèce de monnaie de Venise, qui estoit le prix ordinaire du cahier des nouvelles courantes, Ce nom a été depuis transporté au cahier même. »

L’évolution du contenu des Gazettes,  de « bulletin d’information » vers « un petit imprimé qu’on débite toutes les semaines, qui contient des nouvelles de toutes sortes de pays » a entrainé un jeu de mots avec gaza  « pie », un oiseau qui jacasse.  Ensuite  la comparaison a été complétée par la  transformation  fantaisiste du  leone alato (le lion ailé) de la gazeta vénitienne  en pie.  Les étymologistes avant internet n’avaient pas la possibilité de vérifier l’image frappée sur la gazeta vénitienne. Cette étymologie est donc fausse.

La deuxième étymologie proposée par Devoto et reprise par le TLF  est le latin classique gaza « trésor, richesse » emprunté au grec γ α ́ ζ α (gadza ) « trésor du roi de Perse ».  Le nom gazetta  « petit trésor » aurait plu  à Andrea Gritti.  Quand ses successeurs ont décidé d’éditer un bulletin d’information, ils ont choisi le nom Gazetta  et fixé le prix de ce petit trésor d’information  pour les Vénitiens qui étaient restés sur le quai à  1 gazeta.


leone alata        gaza in bagno

 

  1. Je n’ai pas encore réussi à trouver un exemplaire numérisé, mais je pense que la Gazeta était rédigée en vénitien, puisque destinée aux Venitiens.
  2. Aveva impresso un leone alato  in piedi e la immagine della Giustizia seduta sopra altri due leoni col motto Justitiam diligite Il suo titolo a peggio era di carati 452 per marca  »
  3. Le FEW l’a classé dans l’article gajus « geai ».

Brio, brino, brigno ‘gousse d’ail&rsqu...

Brio, brino, brigno s.f. « gousse d’ail ». L’étymologie est peut-être une racine gauloise *brinos « rejeton, tige » avec le suffixeia , mais jusqu’ici on ne connaît aucun mot celtique qui y correspond. Le 15/7/2016 : Pierre Gastal m’en fournit plusieurs ! Voir ce qu’il écrit en bas de page. .

L’évolution sémantique  « rejeton »  > « gousse  » s’explique peut-être par la forme et la fonction de la gousse.  En néerlandais il y a eu une évolution analogue. Une gousse d’ail  est nommée « teen » mot qui  signifie « tige fine, rejeton ». Je n’en suis pas sûr, parce que le mot teen  signifie aussi « orteil » et je ne connais pas encore l’histoire de teen « gousse d’ail ».

brigno-d'ail               

Il s’agit d’un tout petit groupe d’attestations. La première de ce groupe vient de l’Aveyron  (Vayssier) . Dans le  Gers  et et le  Tarn-et-Garonne la forme est   brio, dans la Hte-Garonne c’est brino. ( Thesoc type brinha)

L’article  brinos  du FEW comprend principalement des mots qui désignent des tiges, verges, rejetons, des brins. etc.  Mistral  fournit le mot brigno pour le Dauphinois avec le sens « plante herbacée très fine, qu’on emploie quelquefois en guise de bruyère pour ramer les vers à soie ».  Avec un sens très proche brinha  « sorte de roseau (pour faire des paillasses), carex; Une herbe coupante des marécages] » il a survécu à Die (Han Schook).

brinha -carex

La graphie donnée par le Thesoc, brinha vient d’Alibert, mais les gens du  Gers  et du Tarn-et-Garonne prononcent  brio, et dans la Hte-Garonne c’est brino.

Pierre Gastal, spécialiste du Celtique, m’écrit  qu’il y a bien des mots celtiques qui correspondent à cette origine:

Il est bien vrai que *brinos, qui serait à l’origine du français “brin” (celui-ci dit “peut-être gaulois” par le Dictionnaire étymologique Larousse) n’est cité ni par G. Dottin, ni par P.-Y. Lambert, et pas davantage dans le dictionnaire gaulois de X. Delamarre.
Cependant le mot est bien présent dans les langues celtiques :
V.bret. breun (breyen déb. XVe s. ; bryenen, au sing. 1732), breton mod. brien-enn, coll., « brins (de filasse, de lin), petites tiges végétales, bribes », corresp. au corn. brewyon et au gall. briwion.
On le trouve même en espagnol sous la forme brizna (brin). Le sens premier de la racine indo-européenne semble être : fragment, miette, petit morceau détaché, brisé de quelque chose de plus gros.

 

 

Gabian ‘mouette’

Gabian « mouette » est attesté en provençal,  à Nice et  en languedocien de l’est,  entre autres au Grau-du-Roi. Cotgrave, un lexicographe anglais de la fin du XVIe siècle et excellent connaisseur de l’occitan,  le mentionne dans son dictionnaire en 1611. Il l’écrit gavian et cette graphie passe en 1845 dans le dictionnaire de Bescherelle et il reste ensuite dans les Larousse jusqu’en 1930 sans qu’il soit vivant en français!

A Hyères et à La Ciotat ainsi que dans le département Bouche-du Rhône,  Edmont (l’enquêteur pour l’Atlas Linguistique de la France, ALF) a noté au début du XXe siècle le dérivé gabino  « mouette », mot déjà attesté en 1300 en Provence.  A Nice  une gabino  est une « mouette à 3 doigts » (Rissa tridactyla; Wikipedia).

D’après Wikipedia  le gabian  est le Goéland leucophée (Larus michahellis)

gabino tridactyle

 

 

 

           gabian goeland

goéland

L’abbé de Sauvages (S1)  écrit que gafêto  est synonyme de banêlo « une mouette de la grosseur d’un pigeon. Elle a le  plumage d’un cendré clair. Le bec qui a un pouce de longueur, a le bout noir, le reste est jaunâtre.  »  ( Si vous pouvez me fournir plus de détails, contactez-moi!).

Je constate avec le web que le mot est très vivant. Par exemple ici « On y trouve une majorité de mouettes rieuses, les plus répandues sur nos côtes ; en Provence, on les appelle des  » gabianolo « , puisqu’elles sont parentes des goélands.  » et surtout les Gabians de Marseille.

Deux gabians  en action.

L’étymologie est le latin gavia   « mouette » qu’on retrouve en  Sicile, et sous forme du dérivé  gavina  « mouette (Larus canus) » en italien, catalan et espagnol. Les étymologistes ne sont pas d’accord sur l’origine du mot gavia. Faut-il le rattacher à gaba « gorge, goître » ou à gava  « cours d’eau ».

Le FEW fournit aussi pour Marseille et Nice le sens au figuré de gabian  « mortier où l’on voit de gros morceaux de chaux non délayée »,  image qu’il explique par le fait que ces morceaux  ressemblent aux ailes blanches des mouettes.   Par contre  gabian  avec les sens de « employé de fermier général » (Marseille); « douanier » (Nice) et  « gabelou » (Puisserguier)   donnés dans le même article  font à mon avis partie de la famille gabela  « gabelle ».

Un visiteur me signale un Entretien avec Pierre Meynadier,  auteur et réalisateur du film Marius Gandolfi, le gabian paru dans le blog de France 3 Provence le 8 avril 2013.

 

Gaba "gave" en Béarn et Bigorre

Gave  « rivière » dans le sud-ouest  est un subst. féminin dans les dép. des Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques : gào  d’après l’ALF, masculin ailleurs.  L’etymologie est moins évidente que je ne croyais.  Je ne voyais  pas de contradiction entre le toponyme Gave, anciennement Gaba « rivière » en Béarn et en Bigorre  et le sens « gorge, jabot; goitre »( cf. gavot). Surtout en montagne, les rivières passent souvent par des gorges. Cf. Wikipedia  Gave  .

Mais d’après le TLF des recherches récentes montrent qu’il s’agit plutôt d’un mot préroman gabatro* :

D’apr. leur forme et celle de leurs dér. Gabarret, Gabarrot (v. Raymond, op. cit.), ces mots semblent reposer sur une base préromane *gabaru, *gabarru (Rohlfs Gasc.3, § 69, 479; cf. fin viiie-début ixes. lat. médiév. gabarus Théodulfe d’apr. Dauzat Topon. éd. 1971, p. 138); v. aussi J. Hubschmid, Pyrenaënwörter vorrom. Ursprungs, § 42 qui rapproche les termes pyrénéens de l’a. prov. gaudre « ravin, ruisseau » reposant sur une base préromane *gabatro à laquelle il rattache le lat. imp. gabata, gavata « jatte, écuelle » [v. jatte] – et Id., Sardische Studien, § 23. Une base préromane *gava « cours d’eau » (FEW t. 4, p. 83a) paraît moins satisfaisante. Bbg. Pégorier (A.). À travers le Lavedan. Vie Lang. 1962, p. 468.

L’histoire des mots  qui appartiennent aux substrats et sont souvent préhistoriques, est souvent difficile à reconstruire et je ne m’y risque pas.  Il y a une littérature abondante, si vous voulez approfondir.

Le FEW  classe le mot marseillais gabin  « petite mare d’eau croupissante » dans le même article et il renvoie vers l’article gavia « mouette » pour d’autres mots qui pourraient appartenir à la même famille. Voir l’article gabian.

 

Le Gave de PauLe Gaver de Pau au printemps

Patrick Bruel et Pieter Breughel ont un étymon en ...

Brueil, bruel  « breuil, petit bois clos ». Un mot du vieux languedocien (v.l.) et’un toponyme :

L’étymologie de l’abbé de Sauvages (S2), le grec bruein  n’est certainement pas la bonne. Le FEW I, 555b propose une origine gauloise, *brogilos « bois clos »  derivé d’un autre mot gaulois broga « bord, limite » (voir mon article broa). qui a été repris par la féodalité carolingienne.  Brŏgilo apparaît pour la première fois dans une des Capitularia de Charlemagne  ( Polyptique de St-Irminon, Capitulare de Villis) vers l’an 800. 1 :

Ut lucos nostros, quos vulgus brogilos vocat, bene custodire faciant. (qu’ils fassent bien garder nos terrain que  le peuple appelle brigilos)(source)

Ce sens féodal « terrain appartenant au seigneur » est attesté en ancien lorrain bruel « pré seigneurial que les habitants d’un village étaient obligés de faucher »  et en ancien alsacien brügel  « pré destiné à être au service privé du seigneur ».

Mais le vol.I du FEW date de 1922. Comme je viens de découvrir que la lettre B du  Lessico Etimologico Italiano  est disponible sur le web, j’en profite pour vous envoyer vers l’article brogilos.  Je n’ai rien à y ajouter, sauf que le même mot existe aussi en néerlandais; voir ci-dessous.

J’ai essayé de traduire le premier paragraphe avec Google traduction, une catastrophe !. Tout francophone et surtout tout occitanophone  comprendra mieux l’italien que la traduction Google. Comme preuve, voici l’original et la « traduction »:

La voce *brogilos, derivato di broga ‘campo, limite’ (scoliaste di Giovenale, Gaff., TLF 4, 944a), pare essere relitto gallico, dato che conti- nua unicamente nell’Italia settentrionale e nella Galloromania (cfr. Pellegrini,SSCISAM 21,459). Il significato più esteso sembra quello di ‘giar- dino cintato; frutteto; verziere’ (I.1.), cfr. friul. broil ‘poderetto annesso alla casa, cinto da un muro, coltivato a viti, alberi da frutta ed erbag- gi’ (PironaN), b.engad. bröl ‘frutteto’ (DRG 2, 522a), occit.a. brolh (1160ca., BernVent, Appel 9,
* Les brogilos ce point, sur le terrain dérivé Broga ‘ Limiter ‘(scholiaste Juvénal, Gaff., TLF 4, 944e), semble être l’épave gallique, comme con- nuent seulement dans le nord et Galloromania (voir Pellegrini, SSCISAM 21.459). Le sens semble plus étendue que «gar- dino clôturé, verger, verger »(I.1.), Cf. Friul. petite ferme du gril »attaché à la maison, entourée d’un mur, planté de vignes, arbres fruitiers et des erbag gi ‘(PironaN), b.engad. Bröl «verger» (DRG 2, 522e), occit.a. brolh (1160ca., BernVent, Appel 9,

Patrick Bruel    Saint-Jean de Bruel (Aveyron)  St-Jean-de-Bruel, Aveyron

Allemand brûl « pré; réserve des cerfs » (plus chez Grimm ) vient également de brogilos.   

A toutes ces attestations je peux apporter une petite contribution:  le mot néerlandais breugel  maintenant vieilli et qu’on ne trouve que dans des noms de lieu et de personnes comme en France, fait partie de la même famille, d’après de Vries,  NEW. (= etymologie-bank) qui écrit que le sens d’origine semble être « terrain clos ».  Il y beaucoup de formes différentes. Cela s’explique par le fait qu’il s’agit d’un emprunt  mal intégré.  Une de ces formes, celle du Brabant, m’ a intrigué particulièrement : bruel.

Le nom  le plus connu est  bien Breughel, graphié  autrefois Bruegel un village dans le Brabant néerlandais et un autre en Belgique. (plus dans le Tijdschrift voor Nederlandse Taal- en Letterkunde. Jaargang 31. E.J. Brill, Leiden 1912   consultable  sur le web).

Notre Patrick Bruel  se trouve donc en très bonne compagnie, Pieter Breughel :

Pieter Breughel

  1. Holder, Alt-Celtischer Sprachschatz I 619 vlg. en Nachtr. 984 vlg.

Brus, brusc "ruche" une étymologie compl...

L’étymologie de brus, brusc, bruk, bru  « ruche » serait d’après  le FEW 1, 575  latin bruscum « noeud de l’érable ».

racine ou loupe d'érable

Mais, comme vous le savez,  le premier volume du FEW  paru en 1922, a été complètement revu et corrigé, SAUF un grand nombre de mots de la lettre B.   L étymologie  bruscum > brusc est entièrement basée sur la phonétique historique.  Le premier problème déjà signalé par von Wartburg est  que  la qualité du –u-, long ou court  est inconnue.  En plus  il est difficile d’établir des  liens sémantiques  entre un « noeud de l’érable » et une « ruche », du « bruyère; broussaille » ou la notion de « rude au toucher » (> « brusque »), tous des sens classés sous cet étymon. Le TLF brusque  renvoie    vers « Cor., hyp. probable », ce qui signifie probablement « Corominas »…… Dans le Diccionari etimològic de Jordi Bruguera, qui est basé sur le travail de Corominas, est noté que le mot brusc « brusque » est probablement  préroman.

Heureusement que le Lessico Etimologico Italiano est plus clair; dans l’article brusk-, brosk-, brisk- ‘radice nocchiuta’ « racine avec des noeuds »; brūscus ‘pungitopo’ « petit houx »; briscus ‘pianta’  est inclus le sens « ruche, rucher « , attesté en Ligure :

Lig.occ. (Olivetta San Michele) brǘsk m. ‘alveare ricavato da un tronco cavo’ AzarettiSt.8037, lig.centr. bṛǘšk ‘apiario, alveare’ Massajoli.

L’article brusk-  etc. du LEI est très complexe; si cela vous intéresse visitez le site. De toute façon la conclusion est  qu’il s’agit d’un mot préroman, et que le latin  bruscum  en est un exemple.

Le Thesoc nous fournit des attestattions de brusc  « ruche » pour la région voisine de la Ligurie, les Alpes-Maritimes,  et de brutse  à Job (Puy-de-Dôme).

Le mot languedocien brus  « bruyère à balai »  fait partie de la même famille. L’abbé de Sauvages donne deux articles brus.

1. Brus « la grande bruyère dont on fait les balais, les rameaux des vers-à-soie »  Brussës dê magnas  « des rameaux ».

2. Brus  « une ruche de mouches ou pour les abeilles, on les fait avec quatre ais1 assemblés ou avec un tronc d’arbre creusé, on les construit aussi avec de l’éclisse, de la paille, du jonc, de l’osier, & l’on dit en conséquence, j’ai cent paniers dans mon rucher. Dans la deuxième édition l’abbé ajoute  brus  ou brés d’abél.

Ci-dessous une image d’une ruche naturelle! (source où vous trouverez beaucoup d’autres images).

ruche naturelle dans un tronc d'abre

Anglais brusque « brusque ».

  1. des bouts de bois, voir TLF

Espanir "sevrer" d'origine gauloise...

Espanir « sevrer ».  L’étymologie a été décrite par Antoine Thomas dans son Mélanges d’étymologie française.  Paris, 1902.  que j’ai retrouvé grâce à Lexilogos. Ci-dessous je copie la page

D’après le données du Thesoc  espanir  a été conservé dans  la CREUSE, DORDOGNE, HAUTE-VIENNE, VIENNE. En cliquant sur ce lien vous verrez aussi que la note 4) de Thomas est toujours valable.

Le  FEW 17, 165  rassemble dans le second article *spannjan « sevrer » (ancien francique) toutes les données connues en 1962. Le verbe  espanir  est attesté en ancien français depuis le XIIe siècle et en ancien limousin depuis le XIVe. On le trouve surtout dans les parlers picards, flamands, wallons et lorrains, ensuite par-ci par-là dans l’ouest de l’occitan; mais le FEW n’a pas non plus  de réponse à la question que Thomas déjà posait : quel est le lien entre le verbe occitan espanir   et le verbe wallon?

Le verbe *spannjan « sevrer » fait partie d’une famille de mots très répandue dans les langues germaniques; néerlandais speen « téton, tétine », spenen  « sevrer », allemand Spanferkel « cochon de lait ».

D’après l’ EWN il y a un lien avec l’ancien irlandais sine (< *spenio) ‘téton’; < pie. *spen-, *span- ‘tétine, sein, téton’ (IEW 990).  Comme on n’arrive pas à expliquer un lien avec le francique, il faudra peut-être penser au gaulois?  Si vous connaissez un mot de la même famille dans  une langue celtique  contactez-moi ou laissez un commentaire.

 

Cacalaouse, cagarol "escargot"

Cacalaouso « escargot de Bourgogne (helix pomiata); escargot » = . Le Thesoc a rangé le type cacalaouso avec le type cagarol.  L’étymologie est en effet presque la même mais  la répartition géographique montre une fois de plus qu’il n’y a pas une  « frontière » entre le provençal et le languedocien. Par exemple dans le Gard:  Gaujac, La Roque sur Cèze, Sernhac et Villeneuve-les-Avignon ont le type provençal  cacalaouso qui d’ailleurs est limité d’après les données du FEW à la Drôme provençale au sud de Monbtélimar, la Vaucluse  et le Gard provençal.  Les autres villages du Gard et le languedocien jusqu’à Carcassonne ont le type  cagarol.

Plusieurs personnes de Manduel m’ont confirmé qu’ils chantaient la comptine suivante quand ils étaient jeunes:

Cacalàusette,
Sors les banettes

Si les sors pas
Deman pleuvra

L’abbé Brunel l’a publié dans la Revue des patois galloromans, vol. 1(1887).(voir Gallica). Pour d’autres rimes sur les cacalause. suivez le lien.

Boucoiran (1898) connaît une recette d’une préparation très estimée en Languedoc d’escargots en sauce, la cacalausado :


Boucoiran cacalausado

Une recette de la cacalausado  d’Elisabeth Augier dans le site de La Roque sur Pernes (84) se trouve ici Recette cacalausado

Il y a différentes propositions en ce qui concerne l’origine. Le FEW en fait le résumé et vient  à la conclusion qu’il s’agit d’un représentant du grec καχλαξ  « caillou comme on en voit au fond de l’eau » 1 croisé avec latin  conchylium « coquillage, huître ».La forme cacalaou  serait alors la plus proche de l’étymon. La forme cagarol   fait l’intermédiaire avec le type caragóu, calagóu  « escargot » et  escaragóu qu’on trouve dispersé dans le dép. des Bouches-du-Rhône jusqu’en les Landes et en béarnais.

Le type escaragóu  a voyagé vers le domaine d’oïl. Le succès du mot occitan  escargot est indubitablement lié au succès de l’emploi culinaire de l’animal.  La plus ancienne attestation en français vient du Ménagier  qui écrit  « limassons que l’en dit escargols ». 

Nous retrouvons le type cagarol  avec une metathèse en Catalan caragol,  comme en espagnol et portugais caracol.   Il a même atteint les Pays Bas méridionaux (= la Belgique) aidé par l’armée espagnole (XVIe siècle), qui  a introduit les caracoles  dans la cuisine,  pour y devenir  des  karkol, karakol  ou  kerrekool. 

Dans un restaurant  de Maastricht vous pouvez toujours commander des karkolle.

adresse karakol

Uitgaan in Maastricht doe je bij:
In de Karkol
Stokstraat 5
6211GB Maastricht

Voir aussi l’article banédja

  1. Je n’ai trouvé qu’une  forme καχληξ