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Brandar, brandado

Brandar « secouer , brandado, brandada « secousse, agitation (Alibert) ; mets provençal composé de morue, d’ail et d’huile », prêté au français  brandade depuis 1788. Spécialité de Nîmes.

Vous  devinez que la préparation demande de secouer la casserole. (Actuellement on ajoute de la crème et utilise un mixer, mais jetez un coup d’oeil sur le site: http://chefsimon.com/brand.htm) .

Etymologie : brandado est dérivé du verbe occitan et catalan branda  « remuer, branler, bouger », un mot d’origine germanique brand « feu ; épée ».   Le premier sens est conservé dans occitan branda « brûler, briller » provençal brandon, languedocien brandoú  « rameau vert que le peuple va chercher à la campagne le dimanche des Brandons » (M) (parce que le 1er dimanche de carême on fait  des torches qu’on agite en chantant). Abrandar (Aude), embrandar (Hérault) « brûler » (Thesoc).

brandons

En Suisse et en Belgique la tradition des Brandons s’est transformée en carnaval.

Le sens « feu » se retrouve en néerlandais branden « brûler », brand « incendie » brandewijn « eau de vie » littéralement « vin brûlé », qui a pénétré jusqu’à Marseille brandevin (Achard), de là anglais brandy. Voir aussi anglais brand « marque » du verbe brand « marquer avec un fer chauffé», appelé chez nous ferrade. Allemand Brand « feu », français brandir ou dans néerlandais branding « ressac » néerlandais brandnieuw « brillant» littéralement : »flambant neuf », comme anglais brand new (voir à ce propos et l’évolution la plus récente en anglais le site World Wide Words), brandish « brandir ».
Le sens  « épée »   est conservé dans bran « lame d’épée ; épée » à Lasalle (30), ancien frison brand « épée », ancien anglais brand « torche ; épée».

L’évolution sémantique a dû être « brûler » > » briller » > « bouger, secouer »

De brand est dérivé le verbe brandá « secouer (un arbre) » (S) et brandado.
A la même racine brand se rattachent languedocien. brandello « farandole languedocienne », le barandelaire « danseur de la brandello » ; léger, étourdi » et le verbe brandussá « agiter, secouer ».  Alès brandinejá « battre le pavé ; fainéanter ». Mme Poveda cite pour le parler de la Camargue se desbrando  » se dit d’un cheval qui se regimbe subitement ».

Farandoulo

Farandoulo « farandole » est passée dans  le Dictionnaire de l’Académie depuis 1835 (TLF) . Le nom farandole n’est pas attesté avant le XVIIIe siècle.

L’étymologie d’après le TLF, qui suit le FEW , est  » incertaine; peut-être altération du provençal barandello, brandello « farandole »  un dérivé de branda « remuer, branler », de même origine que brandir*, sous l’influence de dérivés occitans tels que flandina « cajoler », flandrina « lambiner », flandrin « fainéant » 1

Je ne suis pas très convaincu par cette étymologie et ceci  d’autant plus que b(a)randello est définie comme une « farandole languedocienne »! Voir aussi mon article brandado.

Hector Rivoire Statistique du département du Gard, Tome premier, Nîmes, 1842, p.343 cette danse est décrite ainsi:

Dans un très petit nombre de communes des arrondissemens de Nimes et d Uzès et en traversant les cantons de St Quentin d Uzès de Montaren de Blauzac et de Lussan toute la musique se compose d un hautbois et d un très petit tambour qui sert d accompagnement Dans quelques unes de ces localités la danse y est appelée branle ou baran delle C est une sorte de valse russe extrêmement précipitée dans laquelle on tourne continuellement sur un même plan »

 

une  farandoles (en bas de l’image)

Catalan : farandola « Dansa popular que hom practica actualment encara a Provença, però que també havia estat ballada a Catalunya ».

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  1. FEW t. 15, 1, p. 252, note 14 et t. 15, 2, p. 136b; v. aussi Coromines.

Stocofin, estofi

Stocofin, estofi s.m. « morue séchée à l’air libre ». Les formes courantes en occitan sont estofi ou en provençal (e)stoquofi(n), stocofi  et elles  sont plus proches de l’origine, le néerlandais stokvis, mot composé de stok « bâton » et vis « poisson » parce que anciennement le stokvis était séché étendu sur des bâtons dressés sur les bateaux de pêche ou dans les ports. Le mot stokvis est passé dans d’autres langues : italien stoccofisso, catalan estocfix, estocafis, espagnol estocfiz, allemand Stockfisch, anglais stockfish (belles photos). Voir aussi l’article brandado .

Dans  l’anthologie amusante, Les cris populaires de Marseille: locutions, apostrophes, injures, expressions proverbiales, traits satiriques et jeux du peuple–cris de marchands dans les rues–préjugés, par M. de Regis de la Colombière. Marseille 1868, p.2   il y a l’attestation que voici:

que les gamins hurlaient quand un parrain refusait de leur jeter quelques sous à l’occasion d’un baptême.  Suivez le lien, vous ne reviendrez pas à mon article, mais tant pis, c’est très marrant.

Escafit s.m. « morue séchée à l’air libre ». Les auteurs du dictionnaire Panoccitan ont choisi cette forme atypique de la région de Castres pour toute l’Occitanie. Cette forme a subi l’influence d’un autre mot, peut-être l’adj. escafit. Escafit, escafida adj. »étriqué »  suivez le lien.

La « morue fraîche » appelée cabillaud en français depuis 1278, cabillót dans l’Aveyron, est également d’origine néerlandaise : kabeljauw. Dans les langues romanes c’est plutôt le type bacajaw, devenu bacalao en espagnol, bacallá en catalann, baccalá en italien. Les étymologistes pensent que le mot basque bacailao est à l’origine de cette unité des langues romanes méditerranéennes.

Branda

Branda ‘bruyère; haie (Centre); cloison (Narbonne); maladie de la vigne par le rougissement des feuilles (Rouergue).  : ‘bruyère’ parce qu’elle brûle facilement, comme une torche; d’ailleurs on s’en sert pour (r)allumer le feu.

Ces mots ont la même origine  que brandado.

Par contre le sens ‘cloison’ à Narbonne reste un énigme.??? Il faudra savoir comment on faisait des cloisons dans l’Aude.

Desbrando

Desbrando se v.r. « se regimbe »  cf.brandado